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Du 24 février au 21 mars 2015 - supplémentaires 24 mars 19h, 25 mars 20h
EnnemiEnnemi public
Texte et mise en scène Olivier Choinière
Avec Frédéric Blanchette, Muriel Dutil, Amélie Grenier, Alexane Jamieson, Brigitte Lafleur, Steve Laplante, Alexis Plante

Lors d’un souper en famille apparemment ordinaire, France et ses enfants, Jacques, Daniel et Marie-Claude discutent de tout et de rien sans véritablement s’écouter. Qu’il s’agisse de la qualité du français, de l’immigration, de l’inculture des jeunes ou du référendum de 1980, chacun tente d’identifier un responsable au mal qui semble ronger la société québécoise actuelle. Cette recherche désespérée d’un ennemi ne sera pas sans avoir de répercussions sur les petits-enfants Jonathan et Aurélia, pour qui un écureuil est soit un ennemi à abattre, soit une victime à sauver. La discussion des adultes se transforme bientôt en règlement de compte, qui prend tous les aspects d’une guerre sans merci.


Section vidéo


Assistance à la mise en scène et régie Stéphanie Capistran-Lalonde
Conseil dramaturgique Jean Marc Dalpé
Scénographie Jean Bard
Costumes Elen Ewing
Éclairages Mathieu Marcil
Son Éric Forget
Coach marionnettes Olivier Ducas
Maquillages et coiffures Sylvie Rolland Provost

mardis à 19 h
du mercredi au samedi à 20 h
le dimanche 8 mars à 15 h

Mouvements de foule
à l’issue de la représentation du 3 mars
Rencontre avec l’équipe
à l’issue de la représentation du 4 mars

une création du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui et de L’Activité


Centre du Théâtre d'Aujourd'hui
3900, rue Saint-Denis
Billetterie : 514-282-3900 - billetterie.theatredaujourdhui.qc.ca

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 Critique
Critique

par Daphné Bathalon


Crédit photo : Valérie Remise

Autour de la table familiale d’un immeuble à logements, où sont réunis le temps d’un repas la grand-mère, les enfants (tous adultes) et les petits-enfants, les discussions volent dans tous les sens, abordent tous les sujets, se croisent ou s’enterrent.

L’auteur et metteur en scène Olivier Choinière nous offre avec Ennemi public un miroir dérangeant de nos travers, un instantané de la société québécoise d’aujourd’hui, avec ses mouvements d’humeur, ses peurs et ses récriminations. Son écriture rappelle ici celle, hyperréaliste, de Serge Boucher, notamment sa pièce 24 poses (portraits).Ses personnages croient exprimer des avis éclairés, mais tentent surtout d’imposer leurs opinions à l’emporte-pièce sur des sujets qui font « jaser » sur toutes les tribunes au Québec. De Lac-Mégantic au verdict de non-responsabilité de Turcotte, en passant par la charte, les réformes scolaires et l’ignorance supposée des jeunes d’aujourd’hui : toute l’actualité y passe.

La cacophonie des conversations, savamment orchestrée par Choinière et exécutée avec brio par toute la distribution, transforme un débat d’idées en tempête de mots, par lesquels on tente de ventiler toutes ses frustrations, dans une vaine tentative de désigner collectivement un coupable à tous les maux. Au cœur de cette famille, comme en société, il faut avoir un avis sur tout et se faire entendre.

Les comédiens jouent à merveille de cette partition complexe (y compris les deux jeunes, mention spéciale au grand flanc mou incarné par Alexis Plante, criant de réalisme). En deuxième partie de spectacle, la Nancy d’Amélie Grenier vole cependant la vedette et coupe littéralement le sifflet aux membres de la famille. Impossible de ne pas reconnaitre au moins un peu quelqu’un de notre propre entourage dans ce personnage grossier. Muriel Dutil offre quant à elle le portrait d’une grand-mère qui perd lentement le contrôle, et dose avec justesse les opinions tranchées et l’amour pour sa famille.

Le décor, monté sur un plateau, permet au metteur en scène de varier les points de vue du public sur la scène : de la salle à manger, où les adultes discutent, au salon, où les adolescents se chamaillent, puis au balcon, espace où le bruit des conversations fait brièvement place à un silence, pas nécessairement apaisant... La première scène est ainsi rejouée, mais le public l’observe désormais depuis le salon, avec le point de vue des adolescents plutôt que celui des adultes. Répété, le procédé aurait lassé, mais Choinière n’en abuse pas. Il joue habilement de la scénographie tripartite pour fractionner les actions, les paroles et les points de vue. Sa mise en scène alterne par ailleurs entre hyperréalisme et lyrisme, entre les moments de conversations animées et les intermèdes silencieux où seule la fillette se déplace. Ces moments plus poétiques, baignés de projections vidéo, paraissent néanmoins singulièrement détachés du reste.

Avec sa production Ennemi public, Olivier Choinière porte à nouveau un regard aiguisé sur la société québécoise et en trace un microportrait aussi précis qu’incisif.

02-03-2015