11 auteurs revisitent La peur d’Armel Roussel / [e]utopia3 créé en 2013 au Théâtre National. Ils ont chacun comme mission d’écrire une partition de 30 minutes pour minibus.
Sorti du théâtre pour naviguer dans la ville, chaque minibus aura un univers propre : science-fiction, studio radio sur thème du polar,… et chaque spectateur choisira à la carte 3 voyages dont il sera complice et interlocuteur. Des personnages tel un flic, un laveur de pare-brise, un livreur de pizza, un invité surprise pour un bout de route… pourront traverser différents trajets. Un rendez-vous au théâtre en une apothéose finale les réunira tel un grand banquet.
Comme une carte routière composée de différentes routes dessine l’ensemble d’un seul et même territoire, Après la peur dessine les frontières de la francophonie dont tous les auteurs sont issus (Belgique, France, Suisse, Canada, Congo,…) et questionne le rapport à la ville et au comment vivre ensemble.
Assistanat artistique Julien Jaillot
Création lumière Amélie Géhin
Création sonore Olivier Girouard, Guillaume Istace
Chargée de production Gabrielle Dailly
Direction technique Remy Brans
Photo Ulysse del Drago
une création de Armel Roussel / [e]utopia3
en coproduction avec le Théâtre Les Tanneurs et le Centre du Théâtre d'Aujourd'hui
en partenariat avec le Festival des Francophonies en Limousin (Limoges), le Nest Théâtre – CDN de Thionville
Après la peur : le théâtre prend la rue
Après la peur est un spectacle déambulatoire, qui, sous sa forme un peu particulière, transforme Montréal en théâtre. À l’arrivée, nous choisissons notre premier parcours un peu au hasard, et nous voilà partis sur la route. Un premier spectacle de théâtre radiophonique nous amène dans un minibus sombre à travers la ville, où l’on meurt dans un accident avant de voyager à travers l’au-delà au son de la radio des morts - qui a beaucoup d’humour. On y entend pêle-mêle Deleuze, une ligne ouverte pour défunts récents ou les dernières nouvelles d’Hitler.
Une demi-heure plus tard, le petit groupe - sept ou huit spectateurs, pas plus - rentre au Théâtre d’Aujourd’hui. C’est un peu le fouillis dans la grande salle, tandis qu’on attend à la table correspondant au nouveau spectacle choisi que les autres groupes de spectateurs reviennent. Au micro, entre deux fonds musicaux, le directeur artistique Armel Roussel fait la promotion de chaque spectacle d’Après la peur. C’est une joyeuse foire où l’on commente ce qu’on vient de voir, où l’on écrit des mots pour les artistes, à laisser dans la boîte aux lettres sur la table, où l’on imagine ce qu’on verra après.
Les pauses entre chaque départ sont un peu longues, mais soulignent aussi le fait qu’on entre chaque fois dans un nouvel univers, avec un nouveau texte, un nouveau ton, une nouvelle mise en scène ou en son. Cette fois, c’est dans la salle de répétition du théâtre, où le petit groupe auquel je prends part se rend en ascenseur. Deux comédiens font revivre, par des échanges au micro et des projections de scènes de films, les trois dernières secondes de la vie du réalisateur Claude Jutra, avant qu’il ne se suicide en se jetant dans le Saint-Laurent glacé, en 1986.
On repart ensuite dans une voiture, qui reste sur place cette fois. Dans l’intérieur aménagé, on écoute une pièce enregistrée, entre les jeux de lumière et les huit voix dispersées dans l’habitacle. Parcours suivant : un véhicule, encore, dans lequel deux comédiens sont installés sur les sièges avant. Dans ce texte d’inspiration teen-movie, on suit deux jeunes gens qui roulent à travers la ville, à travers l’amour. Assis juste derrière ces amoureux qui se croient seuls, on se sentirait presque voyeur. Puis, quelque part dans Rosemont, la voiture s’arrête, et un comédien sort brusquement de la nuit et d’un bosquet, tandis que sa voix résonne dans le véhicule...
Avec Après la peur, on quitte le théâtre sans jamais quitter le Théâtre. Il y a huit parcours en tout, on ne pourra en voir que quatre dans la soirée ; on repart un tantinet frustrés de ne pas en avoir vu plus. Mais le théâtre, c’est aussi des choix, et le hasard des découvertes. Des découvertes qui nous font explorer en petits groupes intimistes toutes les formes du théâtre : radiophonique, mobile, dans la rue, à pied, dans un camion stationné… On ne sait plus trop à quoi s’attendre, tant les formes sont libres, alors on s’attend à être étonné. Et on l’est.