Après le succès des Trois exils de Christian E., pièce coup de cœur débordante d’humanité, le duo de créateurs, Philippe Soldevila et Christian Essiambre, signe avec Pierre Guy Blanchard, compositeur, percussionniste et conteur, une seconde fiction biographique aux couleurs acadiennes.
Ensemble, ils nous convient à une odyssée introspective et échevelée sur le territoire de l’amitié, une ode à l’intégrité et au refus d’un confort engourdissant, autour de la vie tumultueuse du lumineux Pierre-Guy B., ce voyageur vagabond de retour après sept ans d’exil. Un éloge à cet infatigable funambule et à ce qu’il y a de plus authentique en nous.
Section vidéo
Éclairages Marc Paulin
Direction technique et régie François Leclerc
Direction de production et assistance à la création Marc-Antoine Malo
Assistance à la création Alexandre Fecteau
Collaboration artistique Marcia Babineau, Marie-Êve Cormier, Christian Fontaine, Brigitte Haentjens
les mardis à 19 h
du mercredi au samedi à 20 h
le dimanche 31 janvier à 15 h
Rencontre avec l’équipe à l’issue de la représentation du 27 janvier
Production Théâtre Français du Centre National des Arts
Théâtre l'Escaouette
Théâtre Sortie de Secours
en codiffusion avec le Centre du Théâtre d'Aujourd'hui
Dates antérieures (entre autres)
Du 28 octobre au 22 novembre 2014 - La Bordée (Québec)
Parti à l’étranger du jour au lendemain depuis environ sept ans, Pierre-Guy B. est finalement de retour dans son Acadie natale. Ses parents lui ont acheté une maison juste à côté de la leur, il traverse même chez eux pour aller manger du macaroni à la viande. Après sept ans à voyager, apprendre, découvrir, s’extasier sur mille et une merveilles, le voilà de retour à la case départ avec un goût amer dans la bouche. Un soir, il reçoit un appel de son ami de longue date ; Christian E., qui a une faveur à lui demander, mais qui est finalement inquiété par les propos du grand voyageur. Christian E. s’empresse alors de descendre de Lévis vers Charlo, avec sa future femme et leur fillette, afin de rendre visite à son ami. Le trou que Pierre Guy B. a lui-même fait dans le mur de sa propre maison en dit long sur son état. Les deux jeunes hommes se font alors une mise à jour à la fois comique, émouvante et houleuse autour d’une bière.
Inspiré de la vie de Pierre Guy Blanchard, le texte, fruit d’une collaboration entre Philippe Soldevila, Christian Essiambre et Blanchard, est simple, chaleureux, drôle et profondément humain. Un peu lent et épars au démarrage, le récit devient véritablement captivant lorsqu’il se concentre sur le protagoniste, sur ses doutes, ses voyages, sa famille, ses souvenirs, son histoire. L’interprétation de Christian Essiambre et Pierre Guy Blanchard est touchante et habile ; Essiambre ayant à camper rapidement et sans artifices plusieurs personnages dans divers lieux, alors que Blanchard, véritable virtuose, devait manipuler la console et de multiples instruments de musique, en direct, tout au long du spectacle, tout en interprétant son propre personnage. La musique de Blanchard, quant à elle, devient assez centrale ; il s’agit tout de même de la biographie fictive d’un musicien après tout ! Elle nous transporte d’un univers à l’autre sur des rythmes traditionnels du Moyen-Orient, de la musique électro, des ambiances sonores construites à partir des sons de la scène et de plusieurs autres répertoires encore.
Deuxième partie d’une « trilogie de fictions biographiques », Le long voyage de Pierre-Guy B. est en quelque sorte la suite non officielle de Les trois exils de Christian E., pièce ayant remporté un vif succès depuis quelques années en plus de permettre aux auteurs d’obtenir le Prix auteur dramatique BMO Groupe Financier. Il ne reste plus qu’à savoir qui sera le héros de la finale de cette attachante trilogie et quelle histoire savoureuse il aura à nous raconter !
par David Lefebvre critique publiée lors de la création à Québec en février 2015
Que se passe-t-il après l’exil ? Il y a le retour, certes, mais vers quoi, pourquoi ? Et ensuite ? La peur face à la mort et face à la vie demeure la même, au fond. Qu’est-ce qui nous pousse alors à revenir aux racines de notre existence ? Tout ce qui reste à faire, semble-t-il, c’est de « se lever et d’avancer, coûte que coûte, peu importe ». Mais qu’est-ce que ça signifie exactement ?
Coproduction du Théâtre Sortie de Secours, du théâtre l’Escaouette et du Théâtre français du Centre national des Arts d’Ottawa, Le long voyage de Pierre-Guy B. est une suite absolument logique à la pièce Les trois exils de Christian E., spectacle qui a fait l’unanimité chez le public et la critique depuis sa création, et que le Périscope a eu la brillante idée de présenter pour trois jours en prélude à la nouvelle création. Écrite cette fois-ci à six mains, la fascination de Philippe Soldevila et de Christian Essiambre s’est portée vers cet homme atypique, comédien et grand musicien acadien, sanguin, tumultueux et authentique qu’est Pierre Guy Blanchard, alias Pierre-Guy B.
La pièce commence sensiblement de la même manière que Trois exils : les comédiens sont en scène, posés, puis, après une franche accolade, sont doucement plongés dans le noir. Et c’est l’explosion : on retrouve avec plaisir le jeu énergique d’Essiambre dans la peau de son alter ego, qui, cette fois-ci, prépare un one-man-show en même temps que son mariage. Ce grand événement personnel l’amène à vouloir renouer avec un vieil ami, Pierre-Guy B., pour lui demander d’interpréter quelques mélodies lors de la cérémonie nuptiale. Alors qu’il le joint finalement par téléphone, il semble capter un message de détresse dans la voix embuée d’alcool de Pierre-Guy, ce qui pousse la petite famille de Christian E. à rouler des heures vers son Nouveau-Brunswick natal.
La mise en scène de Philippe Soldevila est en parfaite continuité et harmonie avec Trois exils ; éclatée, elle laisse la place au talent et à la remarquable intensité des deux comédiens qui usent de plusieurs chemins pour raconter leurs histoires. La réflexion des trois comparses sur l’existence se veut poussée, viscérale. C’est la quête chaotique et douloureuse d’un homme singulier, intègre, mais vacillant, qui ne sait plus du tout où il en est.
Les démarcations de la scène ressemblent à un court de tennis : les deux comédiens se tiendront chacun de leur côté pour leur partie respective, et se rejoindront lorsque les récits culmineront vers leurs retrouvailles. Si le côté de Christian E. est relativement épuré, encore une fois à l’image de Trois exils, celui de Pierre-Guy B. regorge de systèmes de son et de différents instruments de musique et de percussion, qu’il manipulera pour notre plus grand bonheur. Sa performance, entre autres, au xylophone, d’une rapidité et d’une adresse déconcertante, épate et fait éclater les applaudissements. Près d'une dizaine de microphones sont placés autour de la scène et près de Blanchard ; généralement utilisés à bon escient, pour augmenter la portée ou manipuler la voix grâce à différents effets, leur utilité s'avèrent à quelques (rares) reprises superflus, par exemple lors de discussions simples entre les deux comédiens.
Essiambre récidive : l’acteur réitère l’exploit de se jouer de l’espace-temps en interprétant en même temps plusieurs personnages en trois lieux et autant d’époques, et ce, sans que le spectateur perde le fil du récit. La présence de Pierre-Guy Blanchard, qui prend d'ailleurs un certain temps à s'imposer, est tout aussi stupéfiante que solide : par des flashbacks, des souvenirs ainsi que la présence de son grand-père défunt, l’homme évoque son mal-être et sa souffrance dans sa maison au bord de la baie des Chaleurs, après une errance de plusieurs mois en Europe et au Moyen-Orient, particulièrement à Istanbul, ville qu’il a quittée pour des raisons obscures.
Si la pièce ne répond que rarement aux questions qu’elle soulève – qu’est-il arrivé exactement à Istanbul? Pourquoi Pierre-Guy est-il revenu à Charlo, sa ville natale? Que cherche-t-il réellement en s’aventurant sur la glace de la baie des Chaleurs, jusqu’à ne voir que la mer? –, elle est pourtant la concrétisation sur scène de l'adage « ce n’est pas la destination qui compte, mais le chemin ». Et ce chemin, on le souhaite interminable en compagnie de ces deux hommes qui nous conquièrent le cœur et l’âme, nous touchant profondément par leur authenticité, leur humour, leurs histoires passées et présentes, les flammes qui les font danser et boire, et leurs trous béants dans lequel se reflètent leurs visages, mais aussi le nôtre.
Second volet d’un triptyque souhaité qui explorera le style « fiction biographique », Le long voyage de Pierre-Guy B. est un véritable joyau théâtral, sans fausse note, puissant, désarmant.