Du 16 octobre au 3 novembre 2007
Du mardi au samedi à 19 h 30
Tendres totems et croquis cruels
Texte de Francis Monty
Mise en scène de Benoît Vermeulen
Avec Francois Arnaud, Véronique Beaudet, Anne-Élizabeth Bossé, Nicolas Gendron, Vincent Faffard, Stéphanie Labbé, Eve Landry, Charles-Smith Métellus, Jean-Simon Traversy, Cinthia Wu-Maheux
Dix personnages évoluent dans un univers scénique épuré, conscients du regard du spectateur, conscients du regard de l’autre sur eux. Lentement, chacun se dévoile, entre en contact, se positionne. Les jeux scéniques déstabilisants se multiplient : entrevues cruelles imposées, simulations de scènes d’affranchissement, jeux de rôles, frôlements de mains et de hanches, jeux ambigus de séduction. Mais est-on purement dans le jeu ou dans la réalité? Tout se passe au moment présent. Les lieux et le temps se dilatent, éclatent : on est hier, on est aujourd’hui et on joue à être demain. L’histoire se dessine.
Le Théâtre Juré Craché regroupe des finissants de la promotion 2007 du Conservatoire d’art dramatique de Montréal. La présentation à la Salle Fred-Barry de cette pièce initialement montée dans le cadre de leur formation leur fournit une occasion de rencontrer le public et de se familiariser avec les rouages de la production théâtrale professionnelle.
Une création du Théâtre Juré Craché en collaboration avec le Conservatoire d’Art dramatique de Montréal
PÉRIODE PREMIÈRES
16 au 20 octobre à 19h30
régulier 24,50 $
carte premières 12,25 $
Salle Fred-Barry
4533, rue Sainte-Catherine Est
Billetterie : 514-253-8974
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Crédit photo : Robert Etcheverry
par Sara Fauteux
C’est à une représentation animée que nous convient les plus récents diplômés du Conservatoire d’art dramatique de Montréal. Avec l’aide du metteur en scène Benoît Vermeulen et de l’auteur Francis Monty, ils ont monté un spectacle étonnant. Codirecteur du Théatre de la Pire Espèce, Monty a travaillé en collaboration avec les comédiens et le metteur en scène pour élaborer ce work-in-progress où se mêle télé-réalité et expérimentation théâtrale. Si cette démarche particulière est à l’image du Théâtre de la Pire Espèce, elle est également cohérente avec le cheminement artistique des comédiens qui terminent tout juste une formation durant laquelle ils ont pu explorer les différentes techniques de la scène et leurs propres possibilités en profondeur. Tout sauf conventionnelle, la pièce Tendre Totems et Croquis Cruels leur permet de mettre de l’avant leur curiosité artistique et de nous faire découvrir leur appétit de la vie et du jeu.
Dix jeunes se rencontrent dans un vieil autobus pour se livrer à une expérience qui leur permet de repousser leurs limites. Dans une succession de tableaux où chacun expose ses dons, ses talents, ses histoires de cœurs ou de famille, ils jouent à se mettre en danger. Ils se livrent à différents exercices (lectures, danses, culture, boxe, séances romantiques…) pour combler un manque qui n’est jamais tout à fait nommé. Sans doute veulent-ils simplement, comme tout le monde, comprendre un peu le monde qui les entoure. Et sans doute sont-ils, comme tous les jeunes, confrontés à un monde qui change trop vite, à des bouleversements qui les dépassent, à leur méconnaissance d’hier et à leur peur de demain. Chacun est aux prises avec ses démons et ses dépendances, prisonniers de ses peurs. En se confrontant au regard de leurs pairs, ils quittent tranquillement le monde de l’adolescence pour accéder à celui des adultes. Ils structurent leur rencontre autour de différents thèmes qui les forcent à se révéler. Dans certains tableaux, ils interagissent comme tous les autres jeunes, tombant amoureux, se chicanant, s’insultant ou se supportant dans leurs difficultés. À d’autres moments par contre, ils se lancent dans des danses effrénées, des courses et des monologues, tentant de repousser les limites de leur univers pour accéder à quelque chose de plus grand.
À travers leurs recherches existentielles, ils effectuent également une exploration artistique. En effet, ils jouent à remettre en question les principes et concepts du théâtre, à repousser les limites de la représentation. Brisant le quatrième mur de la scène, le maître de cérémonie s’adresse directement au public au début de la pièce pour lui souhaiter la bienvenue et lui adresser ses recommandations : le spectacle qui lui sera présenté n’est pas une œuvre achevée. Rien n’est certain dans cet univers d’exploration où ils ont parfois l’impression de toucher à quelque chose de très important et d’autres fois de tourner en rond en passant à côté de l’essentiel. Cette impression est d’ailleurs partagée par le spectateur. À certains moments, on se questionne sur la pertinence des différents exercices que les comédiens exécutent et sur la cohérence de ce spectacle fragmenté en tableau. Les personnages stéréotypés nous empêchent, au début, de réellement s’attacher à eux et de croire à l’histoire qui se construit au fil des différents sketches. Mais plus la représentation avance, plus on apprend à les connaître et plus leur quête nous touche. Si on se demande parfois où tout cela s’en va, notre attention est toujours regagnée par l’énergie qui habite la scène. L’excellent travail effectué par le dj qui anime le spectacle de sa musique live participe également à rendre le tout très vivant. De plus, les comédiens ont recours à une caméra pour se filmer entre eux et introduire des personnages qui évoluent parfois à l’extérieur de l’espace scénique.
Plusieurs idées intéressantes émergent donc de cette expérience théâtrale. Si le tout est parfois un peu décousu, l’énergie qui règne sur scène et les différents effets utilisés parviennent à captiver l’auditoire durant toute la représentation. Mais l’exploration et la remise en question de leur art sur laquelle ils ont misé pour construire ce spectacle lui confèrent un côté un peu amateur ou trop personnel. En effet, on sent que les personnages sont très proches des comédiens eux-mêmes et qu’ils ont élaboré ce spectacle en se penchant sur leur propre questionnement, en utilisant leurs propres références. Dans le cadre d’un spectacle pour adolescent, cela constitue certainement une richesse. Mais, pour une première expérience sur les planches en tant qu’acteurs professionnels, nous aurions aimé voir ces artistes prendre une plus grande distance par rapport à leur expérience étudiante dans une production un peu moins inachevée, un peu moins expérimentale.
20-10-2007