Texte et mise en scène de Reynald Robinson
Avec (par ordre alphabétique) : Mathilde Addy-Laird, Yannick Chapdelaine, Robin-Joël Cool, Romy Daniel, Myriam Fournier, Catherine LeGresley, Guillaume Regaudie, Isabelle Sasseville, Guillaume Tremblay
À la campagne. C’est l’été des Indiens; il fait beau. On est sur la terrasse d’une belle maison près du fleuve. Deux sœurs ont invité des amis pour la fin de semaine. Pendant le souper, les deux sœurs auront une bonne nouvelle à annoncer : tout le monde le sait déjà, elles hériteront bientôt de la maison. Cependant, ce genre d’histoire n’est jamais simple…
Écrite en 2007, la pièce a été présentée en avril 2008 au Conservatoire d’art dramatique de Montréal par un groupe de neufs jeunes comédiens et comédiennes finissants, qui ont fondé par la suite la compagnie le Théâtre Passé Minuit. Le spectacle est ici présenté pour la première fois sur une scène professionnelle.
Concepteurs : Francis Farley-Lemieux, Isabelle St-Louis, Frédéric Janelle, Émilie Voyer, Sophie Vaillancourt Vaillancourt
Carte Prem1ère
Régulier : 26$
Abonnés : 13$
Dates Prem1ères : 9 au 13 septembre 2008
Une production du Théâtre Passé Minuit en collaboration avec le Conservatoire d’art dramatique de Montréal
Crédit photo: Robert Etcheverry
Fred-Barry - Caserne Létourneux
411, avenue Létourneux (angle Notre-Dame Est)
Métro Pie-IX, autobus 139 sud jusqu’à Notre-Dame
Billetterie : (514) 253-8974 ou réseau Admission (514) 790-1245
par Daphné Bathalon
Pour trouver Fred-Barry cette année, on doit bien savoir où l’on se rend. Passé la rue Notre-Dame, il faut dénicher entre deux usines le très bel édifice de la Caserne Letourneux. C’est dans les locaux gracieusement prêtés par le Théâtre sans fil que les productions de la salle Fred-Barry s’installent pour l’année. La saison 2008-2009 commence avec une reprise de « Il était onze heures le soir » par les diplômés 2008 du Conservatoire d’art dramatique de Montréal.
« Il était onze heures » déclare d’emblée l’un des personnages de la pièce écrite et mise en scène par Reynald Robinson. Il était onze heures le soir lorsqu’un drame, encore inconnu des spectateurs, a eu lieu. Pour annoncer une grande nouvelle, deux sœurs invitent leurs amis, tous dans la vingtaine, dans leur maison au bord du fleuve, mais la fête ne se passe évidemment pas tout à fait comme elles l’avaient prévu. Sur la terrasse, vaste espace de jeu signé Francis Farley-Lemieux, les amis dévoilent ou dissimulent leurs secrets. Toute la journée, ils se lancent des semi-vérités, de préférence, celles qui font le plus mal possible.
Cependant, la trame temporelle de la pièce est construite de telle manière, entre retours et avancées dans le temps, que la scène du drame ne prend place qu’à la fin de la représentation. Soit en avançant, soit en reculant sur l’aire de jeu et dans le temps, les comédiens marquent chaque changement dans l’ordre des scènes. Ces chorégraphies, soulignées par un changement d’éclairage, ponctuent les échanges verbaux entre les personnages. Lors de la scène finale, une autre chorégraphie, faite de déplacements frénétiques et d’encouragements à la querelle, est très bien exécutée par la troupe.
Quoique l’ambiance créée par la musique et ces chorégraphies simples soit réussie, ce sont les tensions entre les personnages qui captent le plus l’attention du public. Les petites et les grosses explosions de colère, les élans d’énervement et d’agacement entre les amis, les chums, les blondes, les invités que personne n’attendait… Tout cela concourt à plomber l’ambiance de la fête. Chaque discussion dégénère, peu importe les protagonistes en présence et le sujet de départ, souvent léger. C’est à se demander pourquoi ces personnes continuent de se fréquenter si elles se détestent à ce point. Toutefois, cette montée émotive, parfaitement rendue par les comédiens, donne parfois l’impression de faire grimper les voix trop haut dans les aigus, ce qui semble autant porter sur les nerfs des autres personnages que des spectateurs.
Robinson atteint cependant l’objectif qu’il s’était fixé, celui de faire une pièce qui mette en scène des êtres fuyant leur vraie nature, cherchant à la dissimuler par tous les moyens pour montrer aux autres qu’ils ont changé, qu’ils ont vieilli. Au milieu d’eux tous, Pierrot, l’indésiré-l’indésirable, est le seul à dire tout ce qui lui passe par la tête, pas nécessairement pour faire mal, mais seulement pour le dire. Robin-Joël Cool prête ses traits et son accent à ce personnage tout à la fois inquiétant et attachant.
Finalement, on ne sait pas si cette journée aura permis aux amis d’en apprendre davantage sur eux-mêmes et sur les autres, mais les spectateurs qui auront fait le chemin jusqu’à la Caserne Letourneux auront pu passer un bon moment.