Mise en scène de Monique Gosselin
Avec Kevin Houle, Milène Leclerc, Julien Lemire, Philippe Robert et Marie-Ève Trudel
Parrains : Geneviève Billette, Steve Gagnon et Michel Ouellette
Les Zurbains 2010 apportent une nouvelle mouture de contes créés à la fois par un auteur de métier et par des adolescents. Si les auteurs des contes zurbains ont les deux pieds dans le macadam, ils ont l’imaginaire dans la tête et prennent la plume pour nous parler d’amour et de liberté, sur fond de révolte et de tendresse. Une parole absolument nécessaire.
Date Premières : 7 mai à 10:30, 10 mai à 13:30, 11 mai à 10:30 et 13:30, 13 mai à 19:30
Régulier 26$
Abonné 13$
12 mai - Soirée bénéfice annuelle, le spectacle sera suivi d'un cocktail - 514-596-1616 ou www.leclou.qc.ca
Une production du Théâtre Le Clou présentée
en collaboration avec le Théâtre Denise-Pelletier,
le Théâtre jeunesse Les Gros Becs à Québec,
le Théâtre français de Toronto
et le Centre national des Arts à Ottawa.
Fred-Barry
4353, rue Sainte-Catherine Est
Billetterie : (514) 253-8974
par David Lefebvre
Les Zurbains se suivent et ne se ressemblent pas. Et c'est tant mieux! La 13e édition de ce rendez-vous maintenant incontournable du conte pour et par des ados, prise en main cette année par Monique Gosselin, prend d'assaut les planches de Fred-Barry en ce début mai. La scénographie de Josée Bergeron-Proulx, composée de trois modules principaux, qui réunit des balançoires, un trapèze et un tape-cul, nous indique rapidement l'ambiance générale du spectacle. Et quand entrent Kevin Houle, Milène Leclerc, Julien Lemire, Philippe Robert et Marie-Ève Trudel, la fête peut réellement commencer.
C'est avec un dynamisme explosif et un peu gamin que les cinq comédiens nous entraînent dans ce spectacle qui propose cinq contes tragicomiques. Cinq récits de souffrance, d'amour, de folie, de réalité, de fantastique, d'excès, de rage, d'ennui, de liberté. Dans un camp scout, un jeune garçon obèse est victime de railleries (d'Alex Carignan par Julien Lemire). Un adolescent n'arrive plus à distinguer la réalité de la fiction. Il mêle sa propre vie à celle, virtuelle, de son personnage préféré d'un jeu vidéo à succès, et ce, jusqu'à ce que la réalité le rattrape dangereusement (de David Le Quéré, par Kevin Houle). Une fille aux os qui s'effritent, à la peau qui se noircit, souffre seule dans son appartement, tentant de s'éloigner de sa mère qui perd l'esprit et qui asperge tout de Windex. Jusqu'au jour où elle croise l'amour dans un Jean-Coutu, qui lui écrase le pied. Et elle se lance, même si l'atterrissage risque de faire mal (d'Alex Viens, par Marie-Ève Trudel). Un cours d'anglais ennuyant, une Alice absente, Sophie n'en peut plus. Mais Alice se pointe dans la porte de la classe, clés d'auto en main, elle a son permis! Sophie se faufile, elles partent, fument des joints, et coursent contre un camion : journée grisante, journée téméraire, journée infernale (de Cleo Beland, par Milène Leclerc).
Après un début fort prometteur, le spectacle surprend, et chaque histoire est plus intéressante que la précédente. Les récits nous happent différemment, nous font rire et réfléchir. Indéniablement, les jeunes auteurs ont un talent fou et beaucoup de potentiel, ce que Monique Gosselin et les comédiens s'assurent de bien faire transparaître. Ces derniers ont plaisir à entrer dans l’univers des auteurs, se donnant corps et cœur aux personnages qu’ils interprètent.
Le tragique de ces quatre contes est contrebalancé, cette année, par un récit séparé en quelques parties, qui met en scène un homme en plein ciel, éjecté d'un avion commercial, tombant en chute libre vers une mort certaine. L'homme, qui menait une vie monotone, se voit dans une position où il n'a plus rien à perdre. Ses nombreuses pensées et ses gestes, souvent positifs, le libèrent totalement, avant le grand «splouch» final. Ce texte du jeune Torontois Caleb Guthrie retient incontestablement notre attention, par son humour, sa construction et son originalité. Interprété par Philippe Robert, ce personnage à l'accent anglophone très amusant, ici, sur une balançoire, là, juché en hauteur, fait sourire immanquablement tout le public, qui attend vivement son retour dès la fin des contes.
Si l'on peut déplorer une seule chose de cette édition, c’est l'abus d'un certain langage qui agresse parfois l'oreille. Il est clair que les sacres font partie intégrante du monde des ados, mais est-ce une raison pour en user autant? De plus, les écoles et les intervenants luttent tous les jours contre l'homophobie, spécialement chez les jeunes. On s'explique alors difficilement l'utilisation à plusieurs reprises du mot «tapette», une insulte qu'on considère comme inoffensive, mais qui peut blesser profondément.
Par les Zurbains, le Théâtre Le Clou donne littéralement la parole aux adolescents, qui la prennent et nous offrent de surprenants moments de théâtre. Cette année ne fait pas exception : entre destin et désir de vivre, entre souffrance et libération, entre fiction et réalité, le voyage est tout aussi palpitant, emballant que réjouissant. Un autre grand succès pour Le Clou !