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Du 24 novembre au 18 décembre 2010 - Supplémentaire 18 décembre 15h
Les contes urbains
Auteurs Étienne Lepage, Véronique Pascal, Simon Boulerice, Martin Boisclair, Michel Duchesne, Fabien Dupuis, Yvan Bienvenue
Metteur en conte: Martin Desgagné
Avec Suzanne Champagne, Fabien Dupuis, Jean-Marc Dalpé, Roger la Rue, Jean-Robert Bourdages, Véronique Pascal, Frédéric-Antoine Guimond

Un auteur, un acteur et une bonne histoire, il n’en faut pas plus pour faire le meilleur des théâtres. Historiettes ou légendes urbaines, chaque Conte urbain a pour point de départ la ville dans le Temps des Fêtes. Six ou sept acteurs-conteurs se suivent pour vous raconter la ville, leur ville. Un ou des musiciens en direct assurent les liens musicaux entre les contes.

Encore quelques braises
de Martin Boisclair par Jean-Robert Bourdage
Le passé est derrière nous, mais il peut arriver que le miroir de la télé nous en fasse quelquefois apparaitre le reflet. Alors que ses enfants et sa blonde dorment d'un sommeil de temps des fêtes, un homme devra faire face à son passé. Fuir ou faire la paix?

Solange
de Michel Duchesne par Suzanne Champagne
Un Noël montréalais vu de la banlieue peut être source de cocasseries, mais vue des yeux de la Maskoutaine Solange le tout peut ressembler à une rencontre du troisième type.

Ce que Mariah Carey a fait de moi
de Simon Boulerice par Frédéric-Antoine Guimond
Seul ne veut pas dire unique. C'est pourtant l'unicité que cherche le solitaire Ambroise, et c'est l'opportunité que lui donnera le cadeau cheap de son party de bureau.

Isabelle
de et par Fabien Dupuis
L'expression «l'Amour n'a pas d'âge» n'a jamais été aussi bien utilisée que pour parler de cette histoire. Et non, le temps n'arrange pas les choses. Une romance commencée loin dans l'enfance se conclut dans les sandwichs d'un deuil de temps des fêtes. Se conclut?…

L’oncle
d'Étienne Lepage par Roger La Rue
On finit souvent par croire qu'on a la famille la plus fuckée du monde, mais c'est sans compter sur les séjours qu'on peut faire dans une autre famille; qui nous permettent de réaliser qu'en terme de fuckés il y a pire que les nôtres.

Victime de la mode
de et par Véronique Pascal
Quand il y en a pour une, il n'y en a que pour une et quand on se met à croire qu'il y en a une pour toute, on commence à se battre toutes pour une. Une boutique, un back-store et une robe abandonnée à la mégèrerie. Vive la vente, vive la vente, vive la vente de Nouel!

La roulette de la vie
d'Yvan Bienvenue par Jean Marc Dalpé
Elle a de grosses boules. Il n'a pas d'envergure. Ils vivent au-dessus de leurs moyens. Thriller policier tragi-comique de série double D, le destin est à l'oeuvre dans cette histoire où bien qu'on ne soit pas grand-chose, on a quand même le droit de vivre.

Musique Charles Papasoff et Éric Assouad
Éclairage Mathieu Gourd
Régie Annick Asselin
Illustration: Stéphane Poulin

Une production du Théâtre Urbi et Orbi en codiffusion avec le TDP

Fred-Barry
4353, rue Sainte-Catherine Est
Billetterie : (514) 253-8974

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 Critique
Critique
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par David Lefebvre


Crédit photo : Urbi et Orbi

Présentée jusqu’au 18 décembre 2010, cette 16e édition des Contes urbains s’offre un nouvel environnement, soit la salle Fred-Barry. Les rénos effectués à La Licorne poussent effectivement l’événement hors de ses murs pour la première fois depuis qu’ils y sont présentés. Ce changement ne semble pas affecter l’équipe de création ou le plaisir des spectateurs, qui retrouvent, comme une coutume maintenant bien ancrée dans les mœurs théâtrales, leur dose d’histoires ludiques, sombres, qui écorchent, qui émeuvent.

Sept auteurs, sept contes. Cette année, aucun texte ne touche réellement au fantastique – oubliez donc Lucifer et les créatures maléfiques - restant tous bien ancrés dans une certaine réalité.  Suzanne Champagne ouvre en force la représentation avec son personnage de Solange, une femme de la banlieue qui doit se déplacer chez son fils habitant le Plateau et qui ne fête pas Noël comme elle aimerait tant. La comédienne de talent charme toute l’assistance avec cette Solange haute en couleur, qui pousse des airs connus de Noël pour se calmer. L’auteur Michel Duchesne signe un texte d’un humour pétillant, plein de clichés savoureux et cocasses. Jean-Robert Bourdages fait descendre de quelques degrés la température de la salle avec le conte Encore quelques braises de Martin Boisclair, évoquant une jeunesse difficile et des pertes irréparables auxquelles l’homme qu’il incarne doit faire face. Frédéric-Antoine Guimond donne corps à l’histoire de Simon Boulerice, qui aborde la solitude et le sentiment ultime d’être quelqu’un d’unique, quitte à profiter d’un problème de santé plutôt saisissant pour y parvenir. L’univers de Boulerice y est ici aisément reconnaissable, comme une signature. Fabien Dupuis défend très bien son propre texte, qui propose la découverte de l’amour charnel entre cousin-cousine et qui tourne à l’obsession. Dupuis réussit à marcher sur une corde raide, sans tomber dans la perversité gratuite ou le tabou malséant.


Crédit photo : Urbi et Orbi

Avec un air tout aussi délinquant que détaché, Roger La Rue dégoûte tout en faisant rire grâce aux mots d’Étienne Lepage. Il nous raconte ses vacances de Noël chez un oncle, lors de son adolescence de branlettes, loin des cris des parents. Un oncle qui ne dit mot pour se faire écouter : une discipline beaucoup plus vicieuse et efficace qu’elle en a l’air. Suit Véronique Pascal, qui nous entraîne dans un centre d’achats pour assister à un combat singulier entre vendeuses. Si son histoire très « filles » de robes, de back-store et de compétition se veut une critique sur la consommation et sur les relations de couple, celles entre clients-vendeuses et celles des collègues, elle ne parvient pas à l’élever au-delà de la simple anecdote, aussi amusante soit-elle. L’énervement du personnage dès le début du récit sert mal le propos et fait perdre au public certains moments. Par contre, on sent le talent de la jeune femme et le potentiel de son compte-rendu ; la comédienne prendra sûrement de l’assurance et l’histoire du tonus lors des prochaines représentations. Contre toute attente, le conte d’Yvan Bienvenue est le moins réussi de cette édition. La poésie à laquelle il nous avait habitués fait amèrement défaut ; à sa place, on nous présente un scénario banal et mal ficelé de corruption, de boules refaites et de magouilleurs des milieux de la police et de la politique. Même si Jean Marc Dalpé se la joue cool pour relater les faux faits, il n’arrive pas à nous faire apprécier son récit pourtant inspiré de l’actualité.

Les deux excellents musiciens Éric Asswad et Jean-François Ouellet (Charles Papasoff prendra la relève de Ouellet dès décembre) s’occupent à merveille de l’ambiance sonore et musicale de la soirée, en interprétant quelques mélodies planantes ou transformant totalement quelques classiques. Quoique très forte lors de notre entrée en salle, la musique s’harmonise ensuite parfaitement à l’événement.

Le manitou de la soirée, Martin Desgagnés, a su créer une mise en conte/en scène irréprochable pour l’occasion.

À la vue de cette édition, il est donc possible d’affirmer qu’il est révolu l’époque où les comédiens devenaient de simples conteurs, le temps de quelques soirées, pour émoustiller ou galvaniser notre imagination collective par des récits poétiquement urbain ou aussi mordant que le frette de décembre. La place du conteur est maintenant occupée entièrement par un personnage principal, qui nous livre avec générosité son histoire glauque ou abracadabrante. Si certains sont nostalgiques de l’ancienne formule, qui se situait beaucoup plus près de la tradition orale et de la simplicité volontaire, on ne peut nier que la transposition à la première personne apporte finalement couleur, dynamisme et fraicheur à l’entreprise.

Sans être trop politically correct, Les Contes urbains de cette année ne versent pas dans l’excès, en n’étant ni complaisants, ni trash. Le talent des comédiens, des auteurs et l’humour de toutes les couleurs sont les principales qualités de cette veillée qui annonce, comme à chaque année, l’arrivée du temps des Fêtes théâtral. Un buffet plus sucré qu’amer, qui régalera les mordus comme les nouveaux adeptes.

25-11-2010