Chaque année, Le Scriptarium accueille un nouveau commissaire qui oriente le travail d’écriture en classe. Pour l’édition 2019, Didier Lucien a invité les adolescents à explorer l’univers du rêve, cet espace-temps qui se pose dans leurs esprits une fois les yeux fermés… et même quelques fois ouverts! Inspirés par cette proposition artistique, plus de 1 500 jeunes de la région de Montréal et de Québec ont pris la plume. Au terme d’un processus de sélection, 23 auteurs ont été invités à participer à un stage de création pour créer la matière première du spectacle. C’est de cette matière que s’est inspiré l’auteur Mathieu Gosselin pour écrire le texte du spectacle.
 
Orchestré par le metteur en scène Sylvain Scott, Le Scriptarium 2019 brosse les portraits de quatre personnages, portraits à la fois réels et à la fois rêvés. C’est l’histoire difficile de Caleb qui doit continuer à vivre malgré la mort de son meilleur ami Rayan. C’est l’histoire de son père Gaston, psychologue, épuisé par l’imaginaire débordant de ses patients. C’est l’histoire de Louise, qui accomplit la nuit, au moment de ses rêves, tout ce qu’elle désire. Et finalement, c’est l’histoire de Dolores la mère de Louise, femme adolescente, à l’imagination déjantée et à la psyché twistée. Dans l’histoire tricotée de tous ces personnages, le rêve empiète de plus en plus sur la réalité, afin de la comprendre, de la fuir ou de la magnifier. Intégrant théâtre, musique et chant, le spectacle s’inscrit dans la démarche artistique du metteur en scène qui, depuis plus d’une dizaine d’années, approfondit sa recherche en théâtre musical.

Commissaire : Didier Lucien
Mise en scène : Sylvain Scott
Texte : un bricolage de Mathieu Gosselin, à partir des textes de Marigane Branchaud, Elliot Brie, Jean-Thomas Chartrand, Sarah Desmeules, Mïa Dominique, Marilou Dubois, Yannick Duprez-Goulet, Damien Formichelli, Samuel Gill, Émile Gruda-Mediavilla, Loïc Hébert, Omar Hemissi, Léa Laflamme-Favre, Juliette Mercier, Léa Richard-Cormier, Tomàs Ross, Gaëlle Sweeney, Adèle Tremblay et Anaïs Vaillancourt
Distribution : Maude Desrosiers, Émanuel Frappier, Laurence Latreille et Sébastien Rajotte

Crédit photos : Jean-Charles Labarre

Pour sa deuxième année, la création collective Le Scriptarium s’invite au pays des songes, offrant une étrange et fascinante topographie des reliefs variés de nos rêves.

Avec les mots d’adolescents qui ont répondu à l’appel du commissaire invité de cette année, Didier Lucien, le Théâtre Le Clou laisse libre cours à la fantaisie dans un monde où la frontière entre réalité, rêves et cauchemars se trouble. Sur ce vaste terrain de jeu, l’auteur-coordonnateur Mathieu Gosselin s’en est donné à cœur joie, bricolant à partir des textes de 19 adolescents et adolescentes pour raconter l’histoire de quatre personnages.

Le Scriptarium 2019, c’est Caleb (touchant Émanuel Frappier), qui vit le deuil difficile de son meilleur ami Rayan (Mike Clay, en vidéo), c’est aussi Gaston (Sébastien Rajotte), son père psychologue épuisé par ses patients, la jeune Louise (Laurence Latreille), qui trouve dans la nuit un refuge où personne ne peut la juger, et sa mère Dolorès (hilarante Maude Desrosiers), à l’imagination débordante et à la maternité à géométrie variable.

Sur ce vaste terrain de jeu, l’auteur-coordonnateur Mathieu Gosselin s’en est donné à cœur joie, bricolant à partir des textes de 19 adolescents et adolescentes pour raconter l’histoire de quatre personnages.

La mise en scène de Sylvain Scott, très présente, mais jamais lourde, guide les personnages et le public dans un voyage onirique qui alterne moments d’angoisse et d’apaisement. La production joue habilement sur ce constant glissement du rêve au réel, ou inversement, pour mieux entrer dans la tête des personnages alors que leurs rêves en dévoilent plus sur ce qu’ils vivent et ressentent que leurs paroles.

Réunis et réorchestrés avec doigté par Gosselin et portés par le très bel environnement sonore d’Ariane Bisson McLernon, les textes foisonnent de thèmes inspirants. Il y est bien sûr question d’amour (celui qu’on cherche pour tromper la solitude, par exemple) et de mort, mais aussi d’imagination, d’identité, d’amitié et d’indignation. Plusieurs beaux passages dans ce spectacle poétique, décalé et revendicateur, dont des perles comme celle-ci : « Pas surprenant qu’on soit devenu des bombes à force de faire pousser des allumettes » et des moments très doux.

Ne perdant jamais le fil des multiples changements de ton et de rythme, les quatre interprètes sur scène insufflent à ce songe à multiples facettes toute une gamme d’émotions, car Le Scriptarium 2019 ne manque pas non plus d’humour. La scène rêvée entre Caleb et son père psychologue prend ainsi des allures de pièce de Molière en alexandrins tandis que les récits des rêves de Dolorès nous plongent dans des aventures rocambolesques dont les revirements sont plus loufoques les uns que les autres.

Soutenue par des éclairages toujours changeants qui prolongent la scène dans la psyché des personnages et nous entraînent d’un ciel étoilé au noir profond de la forêt, la production s’apprécie comme un rêve : dans un état trouble oscillant entre l’hyperlucidité et la sensation de perdre pied.

Dans ce territoire de tous les possibles, mais rempli d’incertitudes, comme l’adolescence, Le Scriptarium 2019 ouvre comme il se doit une fenêtre sur les grands talents d’écriture des jeunes auteurs du Québec.