Du 15 janvier au 9 février 2008
2e rencontre d'Ariane, 31 janv. après la représentation, gratuit, 514-845-5455 poste 201
Ce qui meurt en dernier
Texte de Normand Chaurette
Mise en scène de Denis Marleau
Avec : Christiane Pasquier et Pier Paquette
« Je sais que vous êtes là, juste derrière moi. [...] Montrez-vous. Ne vous contentez pas de chuchoter à mon oreille que vous avez tout votre temps. Je pourrais au moins vous répondre que le fait, pour vous, d’avoir tout votre temps me donne, à moi, l’assurance qu’après, j’aurai toute l’éternité. »
Martha von Geschwitz à Jack l’Éventreur
Une femme lit près de sa lampe à pétrole, seule, dans un quartier de Londres, par un soir brumeux d’octobre 1888.
Elle lit une short story inspirée d’un fait divers qui passionne un millier de lectrices : le récit de l’ultime rencontre entre une comtesse et son tueur. Il est vrai que, depuis peu, la police enquête sur un mystérieux Jack l’Éventreur dont la hantise pousse les londoniennes à se barricader le soir, et à lire.
Tout est calme chez la lectrice qui ne peut que constater d’étranges ressemblances entre elle et l’héroïne de la short story, une certaine Martha. Apparences physiques, odeurs, analogie des décors chez l’une et chez l’autre.
Soudain, le bruit d’une voiture. Un moteur qui ralentit puis s’éteint dans la nuit. Juste devant l’immeuble. Des pas dans l’escalier. Une visite, de celles qu’on redoute et dont on rêve à la fois. À condition que ça demeure de la fiction...
Collaboration artistique et conception vidéo : Stéphanie Jasmin
Conception des décors : Michel Goulet
Musique : Denis Gougeon
Costumes : Isabelle Larivière
Éclairages : Marc Parent
Maquillages et coiffures : Angelo Barsetti
Une création d’UBU, en coproduction avec ESPACE GO
et le Théâtre français du Centre national des Arts du Canada
Du mardi au samedi à 20 h
Et en matinée le samedi à 16 h
ESPACE GO
4890, boul. Saint-Laurent
Billetterie : 514-845-4890
par Sara Fauteux
C’est d’abord un personnage, Martha von Gerschwitz, qui a inspiré la pièce Ce qui meurt en dernier. En effet, ce texte, Normand Chaurette l’a écrit spécialement pour la comédienne Christiane Pasquier dans le but de faire revivre un personnage de la pièce Lulu de Frank Wedekind, créée il y plus de 10 ans par Denis Marlot et le théâtre UBU. Depuis, ces trois artistes de la scène ont collaboré de nombreuses fois et semblent partager une vision commune du théâtre. Ils se retrouvent cet hiver à l’Espace GO autour de personnage de von Gerschwitz et de celui de Jack l’Éventreur (Pier Paquette), dont la présence vient hanter cette femme de la fin du dix-neuvième siècle à qui tout a réussi, mais qui se retrouve en fin de parcours, déchirée entre l’intensité de son désir pour une femme, Lulu, et la tentation d’en finir, de baisser les bras, de s’offrir à l’Éventreur.
Le texte est tout à fait fidèle au style de l’auteur. Il s’agit d’un monologue périlleux qui nous mène au cœur de l’intimité du personnage de von Gerschwitz. La langue de Chaurette est riche, complexe. Le défi est de taille pour l’actrice qui occupe la scène à elle seule durant toute la pièce ; mais elle maintient le rythme qui lui accorde peu de répit. Si la densité du texte pèse un peu parfois, la voix de Pasquier a quelque chose d’ensorceleur, dont la sonorité suffit à nous transporter dans un univers sombre, troublant, un peu effrayant : un univers proche de celui de Poe. Pasquier évolue sur scène entre deux fauteuils et une table à café, dans une mise en scène rodée au quart de tour. Derrière elle, un immense cube de toile représente parfois sa fenêtre contre laquelle la pluie s’acharne, créant ainsi un effet magnifique, fascinant, parfois le voile qui trouble son esprit et derrière lequel Jack l’Éventreur la menace.
Chaurette n’a pas écrit pour le théâtre depuis plusieurs années. Il y revient, fasciné comme Marlot et Pasquier par le personnage de Martha von Gerschwitz. Si la forme du monologue est parfois un peu lourde pour le spectateur, l’énergie créée par la réunion des trois créateurs est des plus intéressantes. La complicité qui les unit transparaît sur scène et c’est sans doute grâce à elle qu’ils peuvent se lancer dans l’exploration troublante des désirs de cette femme. La performance de Pasquier est particulièrement remarquable. Et pour cause, elle peut s’abandonner tout entière à son personnage, elle est définitivement entre de bonnes mains.
20-01-2008