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La vie utile
Du 24 avril au 19 mai 2018, et du 28 au 31 mai 2018 (FTA 2018)

Une chute à cheval. La cavalière tombe sans fin. Des secondes où le temps s’épaissit, où s’accumulent les couches d’une mémoire tissée de toute une vie utile. La femme constate qu’elle a traversé son existence dans une sorte d’indifférence, et tente de regarder le monde à travers une nouvelle fenêtre avant de le quitter pour de bon. Elle veut recommencer. Autrement.

Elle s’engage alors dans une ultime négociation… avec l’au-delà. Elle veut gagner du temps. Retarder le dénouement inéluctable du pacte, cette entente injustement conclue à son insu, qui veut que sans préavis, elle doive abandonner tout ce qu’elle a eu tant de mal à apprendre à nommer.

LA VIE UTILE est inspirée du chantier d’écriture d’Evelyne de la Chenelière. Sur le long mur du café-bar d’ESPACE GO, l’artiste a superposé pendant trois saisons des couches de mots, de lignes, de couleurs et de formes, à l’image du monde tel qu’elle se le représente : trouble, frémissant, instable et palpitant (au sens où sa chair palpite). Le chantier d’écritureportait tout ce qui obsède l’auteure depuis l’éveil de sa conscience d’être. Il y était question de l’enfance, ce temps où on ne sait pas encore dire ce que l’on pense, et de deux livres fondateurs qui ont forgé son imaginaire et son rapport au monde : le Précis de grammaire française (parce que la langue maternelle désigne le réel, le moule et le scelle) et la Bible (car le sort de notre âme pèse comme une malédiction muette sur nos consciences.)


Texte : Evelyne de la Chenelière
Mise en scène : Marie Brassard
Avec Christine Beaulieu, Sophie Cadieux, Evelyne de la Chenelière, Louis Negin, Théodore Pellerin


Crédits supplémentaires et autres informations

Assistance à la mise en scène : Emanuelle Kirouac
Décor : Antonin Sorel
Lumières : Sonoyo Nishikawa
Musique et conception sonore : Jonathan Parant
Vidéo : Karl Lemieux
Costumes : UNTTLD (José Manuel St-Jacques + Simon Bélanger)
Maquillages et coiffures : Angelo Barsett

Les mardis et mercredis à 19 h
Du jeudi au samedi à 20 h
Et les samedis à 16 h

Rencontre avec le public
Jeudi 26 avril 2018, à 18 h 30

Les représentations du 28 au 31 mai sont présentées dans le cadre de l’édition 2018 du FTA.

TARIFS
Général 37$
65 ans et + 30$
30 ans et - 28$
Les prix comprennent les taxes ; les tarifs ne s'appliquent pas aux représentations supplémentaires

Coproduction ESPACE GO + Festival TransAmériques (FTA)
Avec la collaboration d’Infrarouge


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Critique disponible
            
Critique

La vie mystique

De l'aveu même de son autrice, Evelyne de la Chenelière, La vie utile est un chantier. Un chantier d'écriture, un chantier qui sort de toutes les conventions classiques du théâtre. Un objet en mouvement, en paroles, qui brise l'espace-temps et le récit narratif continu pour nous emmener dans un univers unique, éclaté et hors des sentiers battus, littéralement.




Crédit photos : Caroline Laberge

Aboutissement de son chantier d'écriture (dont on peut voir des fragments à même les murs du hall de l'Espace Go) effectué pendant sa résidence au théâtre du boulevard Saint-Laurent, La vie utile, est, pour de la Chenelière, une « durée », c'est-à-dire un objet intemporel dans lequel se mélange plusieurs périodes de la vie son personnage, ainsi que plusieurs de ses personnalités. Marie Brassard, qui avait déjà dirigé la comédienne et autrice dans La Fureur de ce que je pense, s'est rapidement greffée au projet, y apportant sa gestuelle unique dans la mise en scène. Dans La vie utile, les mouvements passent de l'horizontal à la verticale ; une grande échelle traverse littéralement la scène. Cette dernière sera l'endroit de jeu de Sophie Cadieux, qui incarne le personnage plus jeune de la Chenelière, proposant un impressionnant jeu physique, en plus d'un texte au langage dense, poétique et intellectuel à la fois.

La jeune Jeanne (de la Chenelière et Sophie Cadieux), nommée ainsi par ses parents (Christine Beaulieu et Jules Roy Sicotte) en référence à Jeanne d'Arc, se remémore sa jeunesse, en implorant la mort elle-même, incarnée par Louis Negin, de prolonger sa vie. Jeanne imagine, quelques instants avant son trépas, ses parents encore vivants : une mère déconnectée de la réalité à la voix déformée qui tente de montrer un monde somme toute superficiel à sa fille et un père philosophe, amant de jeunes hommes. Elle imagine aussi une version adolescente d'elle-même, qui découvre la vie, et surtout, le sexe et l'érotisme. La mort, qui parle anglais, peut représenter à la fois l'ennemi, celui de la vie, mais aussi celui de la langue, questionnement récurrent dans cette pièce de la Chenelière. La jeunesse, l'éducation, le rapport au temps, à la nature, à l'érotisme, à la parentalité ; de nombreux sujets qui reviennent à travers les monologues des personnages, qui interagissent somme toute peu, laissant place à un discours unique. Celui-ci est rempli de références et d'énumérations rapides de concepts, de moments historiques, d'adjectifs. Ce processus de langage est fortement intéressant et révèle un véritable talent des comédiens à se remémorer autant de mots sans verbe, mais s’avère aussi trop présent, étourdissant parfois le spectateur. Il faut néanmoins admettre que l'écriture de la Chenelière et son interprétation force l'admiration et nous déconcerte, nous sortant, de façon assumée, de la zone de confort habituelle du théâtre. Audace et originalité décrivent bien La vie utile, malgré son côté cryptique et « inaccessible ».

Les personnages évoluent  dans une magnifique scénographie (Antonin Sorel) qui mélange pièces domestiques et jardins, sur fond d'écrans qui projettent forêts, verdure et nuits et nous plongent dans un environnement quasi magique. Les vidéos de Karl Lemieux et leur intégration par Guillaume Arsenault méritent d'être soulignés, puisqu’ils deviennent pratiquement un personnage à part entière de La vie utile.

Il faut être en forme et dans un état d'esprit ouvert et demeurer très concentré pour entrer dans le mysticisme de La vie utile, mais, comme de la Chenelière le décrit si bien elle-même, « c'est plus qu'un texte, c'est une expérience », et on n'en sort pas indifférents, repensant à cet univers et à cette écriture uniques pendant plusieurs jours.

02-05-2018
 

Espace Go
4890, boul. Saint-Laurent
Billetterie : 514-845-4890

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