Alors que les deux fils d’Œdipe s’apprêtent à s’affronter sur le champ de bataille, leur mère Jocaste tente une ultime tentative de conciliation pour empêcher une guerre qui pourrait mettre en péril la cité de Thèbes et la vie de son peuple.
Bloquées dans la ville à cause de la guerre, les Phéniciennes soulèvent en chœur et sur un mode ludique des questions en lien avec les événements qui ont mené à ce conflit. Au fil de leurs interrogations, les « Filles » mettront progressivement en lumière une grande énigme : pourquoi l’être humain est-il impuissant à remédier à sa propre barbarie?
Brillante partition théâtrale contemporaine dotée d’une rare force incisive, LE RESTE VOUS LE CONNAISSEZ PAR LE CINÉMA est une réécriture par Martin Crimp de la pièce Les Phéniciennes d’Euripide. Pour cette leçon de mythologie, le metteur en scène Christian Lapointe nous convie dans une salle de classe où les questions des « Filles » deviennent les armes d’une révolte en marche.
Avec un humour féroce, cette pièce profondément tragique vulgarise l’histoire d’Œdipe et de sa lignée boiteuse pour mieux la mettre en abyme. Pour avoir résolu l’énigme du Sphinx, Œdipe obtient en récompense la main de Jocaste et le trône de la cité de Thèbes. Un jour, il découvre que Jocaste est sa propre mère. À la suite de cette révélation, ses fils Étéocle et Polynice décident de le chasser du trône. Œdipe leur prédit qu’ils auront à se battre et à s’entretuer pour le pouvoir. Craignant cette malédiction, les deux frères font pacte de régner un an chacun, en alternance. Au terme de la première année, Étéocle refuse de laisser le pouvoir à son frère Polynice qui, déterminé à occuper le trône à son tour, revient aujourd’hui à Thèbes à la tête d’une puissante armée.
Texte Martin Crimp d'après Les Phéniciennes d'Euripide
Traduction québécoise et mise en scène : Christian Lapointe
Avec Marc Béland, Florence Blain Mbaye, Lise Castonguay, Claudia Chillis-Rivard, Gabrielle Côté, Laura Côté-Bilodeau, Mellissa Larivière, Nathalie Mallette, Marie-Ève Perron, Ève Pressault, Éric Robidoux, Jules Ronfard, Paul Savoie, Gabriel Szabo
Crédits supplémentaires et autres informations
Assistance à la mise en scène : Emanuelle Kirouac
Dramaturgie : Andréane Roy
Décor : Jean Hazel
Lumières : Sonoyo Nishikawa
Vidéo : Lionel Arnould
Costumes : Elen Ewing
Musique : Nicolas Basque
Accessoires : Claire Renaud
Photo Anouk Lessard | Conception lg2
Martin Crimp est publié et représenté par L’Arche, éditeur & agence théâtrale.
Rencontre avec le public
Jeudi 13 septembre 2018, à 18 h 30
Tarif
Régulier : 37$
65 ans et + : 30$
30 ans et - : 28$
Les tarifs comprennent les taxes ; les tarifs ne s'appliquent pas aux représentations supplémentaires. Ajouter des frais d'envoi de 2,50$ si vous voulez recevoir vos billets par la poste.
Coproduction ESPACE GO + Carte Blanche + Théâtre français du Centre national des Arts
Prémisse intéressante que celle de la production lançant la saison à Espace Go, Le reste vous le connaissez par le cinéma : un texte de Martin Crimp d’après Les Phéniciennes, du grand auteur grec Euripide, et une mise en scène de Christian Lapointe, qui nous a donné d’étonnantes pépites comme Tout Artaud, au FTA, et Dans la république du bonheur, du même Crimp.
Cette fois, cependant, la magie n’opère pas complètement, en partie à cause de choix étranges du côté de la direction d’acteur. Le spectacle débute avec l’entrée en scène fracassante d’un chœur de jeunes filles qui s’émancipent de leurs pupitres et de leur professeure pour dicter avec autorité (et force questions tranchantes) leurs actes à la reine Jocaste puis à sa cour. L’intrigue est bien connue : elle retrace en partie la tragique destinée de la famille d’Œdipe, sacré roi de Thèbes après avoir vaincu le Sphinx, et qui découvre avoir sans le savoir épousé sa propre mère avec qui il a eu deux fils et deux filles. Les Phéniciennes s’intéresse d’abord à la reine Jocaste, puis se penche sur le sort des deux fils, Étéocle et Polynice, qui se disputent le trône jusqu’au fratricide.
Le texte incisif de Crimp et la mise en scène survitaminée de Lapointe passent au tordeur chacun des personnages de cette tragédie pour mieux se moquer de notre démocratie de façade où les décisions se prennent au-dessus de la tête des citoyens et pas toujours pour leur bien. Le metteur en scène et ses 14 interprètes font de cette démocratie une comédie grotesque et mettent en lumière les périls d’une ambition démesurée, ainsi que les limites du système politique et du peu de poids qu’a notre propre détermination face à des décisions qui nous sont, au final, bien plus souvent dictées par notre entourage, par pression sociale ou par une situation donnée. Les deux frères ennemis Étéocle (réjouissant Gabriel Szabo) et Polynice (Jules Ronfard) deviennent ainsi de grands adolescents jouant aux chefs militaires, accoutrés comme des gladiateurs ou des boxeurs de fond de ruelle, et se disputant aussi bien l’attention de leur mère que le droit de vie ou de mort sur la cité de Thèbes.
Le texte incisif de Crimp et la mise en scène survitaminée de Lapointe passent au tordeur chacun des personnages de cette tragédie pour mieux se moquer de notre démocratie de façade où les décisions se prennent au-dessus de la tête des citoyens et pas toujours pour leur bien.
La production est soutenue par une trame musicale qui tonne et claque comme un fouet et par les projections vidéo éclatantes de Lionel Arnould, qui nous envoient au visage la violente lutte du monde. Le dispositif scénique monté comme des estrades de stade permet de jouer sur plus d’un niveau d’ascendance et de pouvoir. Malgré cela et malgré la qualité du texte, pour lequel la traduction de Lapointe équilibre bien la langue des grandes tragédies et le québécois des cours de récré, la pièce souffre de son ton criard.
Des premières minutes du spectacle jusqu’aux derniers instants d’Étéocle et Polynice, les acteurs et actrices s’égosillent, pour la plupart au point d’en avoir déjà par moments la voix qui flanche, enterrant le propos de l’auteur. Si bien qu’on ressent peu la colère des femmes de cette histoire sous les cris qui nous martèlent les tympans. Antigone, à l’intensité collée au plafond, nous perd totalement. Cette direction d’acteur exaltée semble toutefois pleinement assumée par le metteur en scène.
En quittant la salle, la tête bourdonnante, on peine à reconnaître les pistes de réflexion sur lesquelles Lapointe voulait nous lancer avec Le reste vous le connaissez par le cinéma. On en retient tout de même l’absurdité d’une lutte au pouvoir menée par simple ambition personnelle ou orgueil… et une multitude de questions sans réponses.