Du 20 au 29 septembre 2007
Théâtre catastrophe
Collectif d'auteurs et de metteurs en scène
Avec Maryvonne Cyr, Étienne Lepage, Emmanuel Reichenbach, Marika Lhoumeau, Martin Dion et Catherine Vidal.
Une catastrophe écologique menace la vie de la cité. Un spectacle en deux parties : une première à l’extérieur, mettant en vedette l’édifice même du théâtre, de façon à ce que ses murs mêmes deviennent l’écran sur lequel se reflètent les événements qui bouleversent la ville ; une deuxième partie, où le public est invité à l’intérieur du théâtre et où il découvre une salle des nouvelles moderne : agitation, reportages, témoignages, une atmosphère de chaos, une sorte d’exercice d’anticipation…
Musique sur scène : Charmaine Leblanc
Scénographie, costumes et accessoires : Geneviève Lizotte
Éclairages : Étienne Boucher
Assistance à la mise en scène et régie : Marjorie Bélanger
Une production du Nouveau théâtre expérimental
Espace Libre
1945, rue Fullum
Billetterie : 514-521-4191
par Mélanie Viau
It’s the end of the world as we know it and I feel fine.
La rentrée théâtrale se joue visionnaire chez Espace Libre cette saison. Fantasme pulsionnel en projection, étrange fantaisie du quotidien, dramatisation extrême d’une inquiétante catastrophe écologique, une équipe de jeunes créateurs brillants nous convie, avec Théâtre Catastrophe, aux derniers instants sordides d’une humanité atomisée riant de sa propre destruction massive. Sans vous alarmer cher public, vous êtes prié de reconsidérer ce périmètre sacré qui entoure votre téléviseur, car cet écran nourrisseur des plaisirs voyeuristes serait peut-être le prophète terriblement sécurisant qui vous bercera jusqu’à ce que tout s’éteigne pour de bon. Vous avez votre billet V.I.P. pour assister à l’événement en direct dans le confort du studio de diffusion des informations ? Parfait. Maintenant, tranquillisez-vous, l’Escouade de Vision Télé s’occupera de vous.
Ils sont professionnels et n’ont lésiné sur aucun détail au niveau de la forme et du contenu. Jouant les actants les plus qualifiés dans le domaine anthropologique de la politique mondiale, les « journalistes et recherchistes » (entendons l’équipe complète d’auteurs, metteurs en scène et acteurs se donnant au jeu avec un plaisir contagieux) nous préparent à l’écrasement du satellite de déchets toxiques Pure 2 dès leur arrivée dans l’aire extérieure du théâtre. En effet, sitôt le contrôle des billets, on entre dans la zone de sécurité pour passer au détecteur de métal, questionnaire médical et contrôle des effets personnels. On entre alors dans le bâtiment (un peu trop tôt peut-être), sur le plateau de tournage de Vision Télé (sublime décor ultra réaliste de Romain Fabre, avec quoi les éclairages de Thomas Godefroid se trouvent en parfaite cohésion) et l’équipe nous accueille avec une introduction musicale toute intimiste et bien jazzée (une mention spéciale pour la voix envoûtante de Catherine Vidal, animatrice pour la soirée). Et l’émission s’enregistre à un rythme effréné, totalement efficace, allant des informations actuelles aux vulgarisations scientifiques du phénomène en crise, passant par des captations visuelles de sociétés « pré armageddon » aux interviews avec physicien, philosophe, théologien, avec un homme d’Hochelaga qui s’enfermera dans son cabinet-bunker pour ne faire plus qu’un avec ce qu’il aime, ou encore avec celui qui aimait une femme et qui ne l’aime plus. Et ce coureur obsessif au courage absurde à côté de l’immensité de la nature qui se manifeste… Mais les pauses commerciales s’enchaînent et l’animatrice de foule (Maryvonne Cyr) explose d’exubérance et d'autodérision, histoire de nous faire rire un bon coup, le temps de déguster les produits de la commandite. L’écriture du spectacle s’articule sans faille et tous ont le mérite de le livrer avec toute la netteté, la simplicité, la sensibilité à l’égard de l’homme et surtout, avec tout le cynisme que porte cette comédie noire. Manifestement, ils ont réussi à surpasser les contraintes données par la direction artistique du NTE pour signer un spectacle intelligent, recherché, articulé, audacieux, arrogant voire, désopilant, d’une forte originalité qu’il fait bon voir au travers de toute la production théâtrale montréalaise.
Alors cher public, qu’allez-vous faire maintenant que votre porte de sortie est soudée et que l’écran télé s’est éteint?
24-09-2007