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Du 11 au 16 juin 2012, 20h30
ScrapScrap
À noter : Le spectacle est présenté à l'extérieur et a lieu beau temps, mauvais temps (à moins d'une pluie torrentielle). Les parapluies sont interdits sur le site; il faut s'habiller en conséquence.
Texte Mathieu Leroux avec la collaboration des membres du collectif
Mise en scène Mathieu Leroux
Avec Sylvestre Caron, Benoît Drouin-Germain, Catherine Lavoie, Mathieu Lepage, Mathieu Leroux, Gabrielle Néron et Antoine Touchette

Scrap, c’est huit individus au centre du désordre. Sylvestre qui perd la foi, Catherine qui met le feu, Benoit qui roule à vive allure, Gabrielle qui pleure en voiture, Helen qui offre son cul, les deux Mathieu qui défoncent tout. Et Antoine, incertain de vouloir faire la révolution. Une meute, un choeur, une grande bouche collective qui beugle, qui crache, qui piaffe. Un portrait accidenté d’une jeunesse qui vit à toute vitesse, qui abuse du temps, du travail, du plaisir, de l'alcool et des autres.

Du 11 au 16 juin prochain à Espace Libre, le collectif Les Néos vous présente leur toute nouvelle création, Scrap, qui se joue à la brunante essentiellement dans la rue Coupal et son parc, qui bordent Espace Libre. Avec pour tout décor des carcasses d’autos accidentées, la pièce écrite et mise en scène par Mathieu Leroux est une pièce coup de poing sur le thème du chaos !

Le collectif de création théâtrale Les Néos favorise une méthode de travail axé pleinement sur la conscience et la créativité brute de l’artiste. L’authenticité et l’honnêteté servent de moteur principal à leur création; plutôt que d’utiliser les conventions théâtrales de personnages et de quatrième mur, le théâtre des Néos se sert de la vie des individus qui composent le collectif. Les spectacles créés ainsi se présentent sans filtres entre le public et les performeurs.

Le groupe se forme à l’automne 2007 à la suite d’un premier stage donné à Montréal par le fondateur du néo-futurisme, Greg Allen. Après avoir envahi quelques lieux durant plusieurs mois, dont le Cabaret du Musée Juste pour rire, le groupe solidifie ses bases auprès de M. Allen à Chicago, pour ensuite s’installer pendant deux ans au Théâtre MainLine avec Pièces pour emporter. S’ensuit une série de spectacles, de tournées et de participations à des festivals… Sept créateurs-performeurs travaillent activement au sein du collectif.


Section vidéo
deux vidéos disponibles

    

Direction de production Gabrielle Néron
Scénographie et costumes Angela Rassenti
Assistance à la mise en scène et soutien à la dramaturgie Sarah-Jeanne Séguin
Conception sonore Steve Lalonde
Photo Marlène Gelineau-Payette

Régulier : 33$
Étudiant : 26$
Prévente : 24$  Offre valable jusqu’au 11 juin pour les représentations des 11, 12 et 13 juin.

Production Les Néos


Espace Libre
1945, rue Fullum
Billetterie : 514-521-4191

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 Critique
Critique

par Olivier Dumas


Crédit photo : Marc Etienne Mongrain

Après une étonnante reprise de leur sympathique Pièces pour emporter en février dernier à La Licorne, le collectif les Néos récidive en cette fin de saison théâtrale avec Scrap, une création plus ambitieuse et plus ancrée dans l’actualité sociopolitique du « Printemps érable ». Si le propos dramatique manque parfois d’originalité, de force et d’intérêt soutenu, l’expérience se démarque davantage par l’énergie brute des corps de la distribution.

Écrite par Mathieu Leroux, l’un de ses membres, la pièce a bénéficié de la patte collaboratrice de ses partenaires de jeu, soit Sylvestre Caron, Benoît Drouin-Germain, Catherine Lavoie, Mathieu Lepage, Gabrielle Néron et Antoine Touchette. Elle s’inspire de la méthode du néofuturisme, inventée par l’Américain Greg Allen, qui a tellement stimulé les Néos qu’ils ont décidé de la propager sur diverses scènes de la métropole. Pour les néophytes, disons que cette technique se base sur la créativité brute et sur la vie personnelle des acteurs sans nécessairement tomber dans l’autofiction. En rupture avec les conventions de la scène, le quatrième mur est aboli, la notion de personnage n’existe pas et les comédiens se présentent au public avec leurs véritables noms.

Multiplication des lieux et éclatement de toute linéarité, Scrap s’amorce dans le petit parc de la rue Coupal, espace public adjacent à l’Espace libre. Les acteurs se regroupent autour de la carcasse d’une voiture. Regards lubriques, poses suggestives, ils représentent une jeunesse un brin idéaliste, mais davantage désabusée devant un présent et un avenir incertain. Un relent des années 1980, décennie où fut instauré le mouvement qui a fédéré le groupe, teinte leurs propos avec son nihilisme profond, sa sexualité paroxystique et sa quête de repères dans une société où s’effritent les projets collectifs. La première partie se déroule de manière sympathique, mais sans marquer les esprits. Quelques rires fusent du public, surtout lorsque Benoit Drouin-Germain prend son cellulaire pour téléphoner à l’une des spectatrices, ou lorsqu’il répond à Gabrielle Néron qui l’implore de lui mentir. Au tiers du parcours, les historiettes font sourires, mais l’ensemble se démarque davantage par une signature expérimentale que par la profondeur de la proposition artistique.

La tension monte de quelques crans lorsque l’action se déplace à quelques pas vers l’ouest. Le texte devient plus intéressant avec ses répliques plus profondes et l’acuité des réflexions abordées. L’échange d’une grande justesse entre Mathieu Leroux et Mathieu Lepage sur l’ambivalence récurrente du peuple quant à son autonomie politique fait écho au spectacle Tout ça m’assassine de Dominique Champagne, présenté l’automne dernier. Catherine Lavoie se révèle particulièrement amusante avec ses citations pétillantes de Michel Foucault, Marguerite Duras et le groupe musical Rage Against the Machine. L’humour teinte également le questionnement spirituel bien senti de Sylvestre Caron. Dans la même portion du spectacle, la simulation d’une orgie où s’enchevêtrent désirs hétérosexuels et homosexuels parait plus plaquée, une redondance par rapport au contenu vu précédemment.

La troisième et dernière partie se déroule à l’intérieur du théâtre. Si les carrés rouges fusent des scènes et des salles de théâtre depuis les derniers mois, c’est probablement dans Scrap que la crise étudiante fait véritablement son apparition sur scène. Certains des comédiens vêtus en policiers en font une allusion bien marrante. Peu de temps après, lorsque les interprètes scandent à tour de rôle des phrases comme des slogans idéologiques, l’effet de conditionnement social se répercute de manière crédible.

Après les 90 minutes que dure la représentation,  il s’en dégage surtout une impression de collage ou de mosaïque hétéroclite avec ses points forts et ses points faibles. Si le néofuturisme est présenté comme une expérience innovatrice, ses fondements ont indirectement imprégné les thèmes et compositions du théâtre contemporain, notamment le répertoire québécois des trente dernières années. Les différentes scènes abordent une multitude de sujets des plus graves aux plus anodins, parfois avec aplomb et vigueur, mais à d’autres moments, on effleure davantage que l’on creuse à la racine des potentiels artistiques.

Heureusement, le talent, la fougue vivifiante et l’énergie des acteurs compensent beaucoup ce sentiment d’inachèvement qui habite cette Scrap aux contours sympathiques. Leur fureur, leur dynamisme frondeur et leur brûlante détermination font des Néos des astres allumés à l’affût de sensations fortes.

13-06-2012