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Du 30 octobre au 9 novembre 2013, 20h, 7 et 8 novembre à 19h et le 9 novembre à 16h et 20h
AndreïAndreï ou le frère des Trois soeurs
Texte Anton Tchekhov
Mise en scène et adaptation Justin Laramée
Avec Olivier Aubin, Emilie Gilbert et Denis Gravereaux

Andreï ou le frère des Trois soeurs, tragicomédie sur la masculinité et ses dualités, du Collectif Bobik, est une adaptation moderne du chef-d’oeuvre de Tchekhov. Cette fois-ci, la pièce est racontée du point de vue d’Andreï, l’homme de la famille isolé dans sa chambre, le frère sur qui tous les espoirs reposent. Qu’attend-on de l’homme aujourd’hui ? Et comment en parler quand il y a encore tant à dire sur la femme ?

Féminisme — Tchekhov — Relecture — Masculinité — Isolement


Concepteurs : Benoît Côté, Geneviève Lizotte et Alexandre Pilon-Guay

Billet régulier 32$
Billet 30 ans et moins 25$
Billet du Studio Espace Libre 24$
Forfait PréVoir 24$

JEUDI-DISCUSSION
Jeudi 7 novembre, après la représentation de 19 h

ENTRETIEN THÉMATIQUE
Vendredi 8 novembre, après la représentation de 19 h

L’homme québécois est-il mou? Castré? A-t-il peur de s’engager?

Si la question de la place de l’homme au Québec vous intéresse, mais que vous en avez marre des magazines féminins et de leurs titres racoleurs, ne manquez pas l’entretien autour de la pièce Andreï ou le frère des Trois sœurs ce vendredi.

Ce VENDREDI 8 NOVEMBRE, après la représentation de 19h, Paul Lefebvre s’entretiendra avec Maxime-Olivier Moutier, écrivain et psychanalyste, et Simon-Louis Lajeunesse, spécialiste de la question masculine.

Une production Collectif Bobik


Espace Libre
1945, rue Fullum
Billetterie : 514-521-4191

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 Critique
Critique

par David Lefebvre

Armés de la meilleure volonté et sans aucune source de financement (une initiative qu’il faut tout de même saluer), Justin Laramée et sa troupe – Olivier Aubin, Émilie Gilbert et Denis Gravereaux sur scène, Geneviève Lizotte, Benoît Côté et Alexandre Pilon-Guay à la conception des décors, costumes, trame sonore et lumières – propose, sous le nom du Collectif Bobik, de « réhabiliter » le personnage du frère des trois sœurs Prozorov, créé et « condamné »  par son auteur lui-même, Anton Tchekhov. Si cette relecture du célébrissime texte russe, en s’attardant ici sur Andreï, paraît intrigante, voire passionnante, du moins sur papier, elle s’enlise malheureusement dans sa propre inertie pour ne livrer qu’une bien fade histoire tirée d’une tragédie ayant déjà en son cœur le concept de l’ennui.

Andreï (Olivier Aubin) est ce frère surdoué, celui qui aurait pu devenir professeur d’université. Mais l’homme se terre dans sa chambre, joue de la guitare (au lieu du conventionnel violon), marie la première femme venue (Émilie Gilbert), qu’il croit aimer, une créature à la vulgarité toute contemporaine, qui le trompera sans vergogne, et se confie à Tcheboutykine (Denis Gravereaux), vieux médecin buveur et excentrique, qui ne pratique plus.


       
Crédit photos : Théo Gravereaux

Andreï ou le frère des Trois soeurs tente d’aborder cette ennuyante banalité qu’est la vie des Prozorov, loin de leur Moscou chéri, et plus particulièrement celle, privée, d’Andreï : ses peurs, ses indécisions et cette pseudo médiocrité dans laquelle il se complait, de façon inconsciente ou délibérée. Malheureusement, la pièce creuse à peine les réflexions sur cet homme et sa condition, n’apportant qu’un très faible nouvel éclairage sur le personnage. Elle reste étrangement trop solidement enchaînée au texte original. Ce ne sont pourtant pas les tentatives de s’en dégager qui manquent : par exemple, la juxtaposition des époques, soit celle du début du siècle et la nôtre, offre quelques moments intéressants. Les répliques des sœurs sont rendues grâce à des enregistrements, jouées sur un petit radiocasette portatif, ou par la télévision, un soap à l’américaine qu’Andreï et Tcheboutykine suivent avec intérêt, en se commandant du poulet rôti. On s’habille de façon moderne, on cite certains poètes, dont Nelligan et Verlaine ; même l’architecture de l’Espace Libre est mise à contribution pour créer une chambre confortable, à l'allure toute contemporaine, grâce aux murs de béton, aux éclairages et à la chaîne stéréo contrôlés par les comédiens. De ce fait, on projette Andreï dans le monde actuel, et du coup, on démontre, mais sans réelle conviction, que peu de choses ont changé entre les Prozorov d’hier et ceux qu’ils pourraient être aujourd’hui. Si les effets sont à quelques rares moments divertissants, la troupe n’évite pas les clichés, sans pour autant les assumer ou s’en servir adéquatement. On remise la subtilité au placard, alors qu’elle aurait pu, à certains moments, être salutaire. Le cynisme qui aurait dû nourrir la pièce manque à l’appel ; les scènes absurdes se succèdent sans déclencher les réactions attendues et les silences s’avèrent creux, vains. La finale, au son d’une chanson de Dalida, vient presque sauver la mise, mais trop peu, trop tard.

Les comédiens s’en tirent tout de même à bon compte, malgré le fait qu’ils soient aux prises avec un texte anémique. Les personnages ne sont ni sympathiques, ni déplaisants, sauf peut-être la Natacha d’Émilie Gilbert qui, en jeune marâtre, se fait entendre de partout quand elle crie le nom de son mari à n’en plus finir, un des rares moments ou l'on prend Andreï en pitié.

Andreï ou le frère des Trois sœurs n’arrive pas, ou alors très difficilement, à créer un réel intérêt envers les réflexions directes et indirectes qu’offrent ce personnage masculin terrorisé par sa condition, dépassé par les événements et noyé dans un monde féminin tout aussi fort que paralysant - ici, beaucoup plus suggéré que démontré. La pièce peine à exploiter adéquatement le filon pourtant fertile qu’elle avait déniché, pour ne proposer que des miettes, des tableaux parfois teintés d’une lueur d’espoir, parfois d’une décevante futilité.

30-10-2013