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Du 11 au 21 décembre 2013, 20h, 13 et 19 décembre à 19 h, 14 décembre à 16 h et 20 h
Les oiseaux mécaniques
Texte et mise en scène Laurence Brunelle-Côté et Simon Drouin
Avec Laurence Brunelle-Côté et Simon Drouin, Bernard Langevin, Robert Faguy, Benoît Fortier, Gabrielle Bouthillier, Danya Ortmann, Jasmin Cloutier, Julie Delorme et Alain-Martin Richard

Le Bureau de l’APA est de retour à l'Espace Libre avec Les oiseaux mécaniques, une symphonie indisciplinée, ouverte, multidisciplinaire sur l’envoûtement et le pouvoir… Est-ce qu’écouter, c’est obéir ? Qu’est-ce qui nous met en marche ? On peut se bander les yeux, mais comment fermer nos oreilles ? Les musiques risquent-elles de nous assourdir ? Et pourquoi y a-t-il tant de bruit ?

Musique populaire — Pouvoir — Aliénation — Médias de masse — Interdisciplinarité — Performance


Section vidéo

    

Toiles Stéphanie Béliveau
Objets d’art Maxime Rioux, Julie Delorme
Film Alexandre Fatta
Lumières Philippe Lessard-Drolet 
Son Frédérique Auger

Un avant-goût
Voir le chant sur la serinette par Danya Ortmann
Voir la machine à oiseaux conçue par Julie Delorme 

Carte Prem1ères
Cartes Prem1ères
Date Premières : du 3 au 7 décembre
Billet régulier 32$
Billet 30 ans et moins 25$
Billet du Studio Espace Libre 24$
Forfait PréVoir 24$
Carte premières : 16$

Jeudi-discussion
12 décembre 2013 à la suite de la représentation de 19 h — Entrée Libre
Rencontre avec l’équipe artistique animée par Philippe Ducros.

Vendredi-entretien
13 décembre 2013 à la suite de la représentation de 19 h — Entrée Libre
Cette activité prendra la forme d’un forum de discussion philosophique et artistique avec des intervenants en art actuel, les artisans des Oiseaux mécaniques et Paul Lefebvre (CEAD).

Production Le Bureau de l’APA


Espace Libre
1945, rue Fullum
Billetterie : 514-521-4191

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 Critique
Critique

par David Lefebvre


Crédit photo : Christine Bourgier

Les créateurs Laurence Brunelle-Côté et Simon Drouin du Bureau de l’APA, flanqués de plusieurs membres de l’Orchestre d’hommes-orchestre, présentent jusqu’au 21 décembre prochain à Espace Libre leur plus récent projet, intitulé Les oiseaux mécaniques. Création inédite, foisonnante et d’une remarquable densité, elle se veut être une suite plutôt logique à la réflexion sur l’aliénation et le pouvoir initiée lors de leur spectacle précédant, La jeune-fille et la mort.

Il serait hasardeux de décrire en détail Les oiseaux mécaniques, tant la proposition est un joli chaos artistique. Une « chaosphonie », si l’on peut dire, puisque la troupe tente de se réapproprier et de réinterpréter, à leur manière, ce qui est considéré par plusieurs comme l’une des plus grandes symphonies de tous les temps, soit la 9e de Beethoven. Tout comme la composition magistrale de l’Allemand, le spectacle se sépare en quatre mouvements, avec des ouvertures, des thèmes, des développements, des codas et des conclusions. On se questionne sur l’omniprésence de la musique dans nos vies et nos espaces publics, sur le concept de la majorité, sur la puissance et l’influence des sons et de la musique. On aborde des notions d’histoire de la musique et du monde, on détourne les symboles du pouvoir directement dans les accessoires scéniques, on assassine à bout portant les gens qui veulent changer leur nom pour Caroline, portant ainsi un regard caustique sur ce « nom-son » auquel nous répondons toute notre vie.

Le bureau de l’APA ne fait pas les choses comme les autres : ses spectacles sont théâtraux, certes, mais s’approchent davantage de la performance et de l’art visuel, réunissant plusieurs concepteurs de différents milieux. La mise en scène des Oiseaux mécaniques propose de multiples couches, nous stimulant autant visuellement, dans un espace rappelant une scène de concert avec lutrins, musiciens et chanteurs, que par les sons, nombreux, produits par des instruments inventés, comme des violons mécaniques, la guitare de Jasmin Cloutier, le cor français de Benoît Fortier, le DJ set de Julie Delorme ou la voix humaine, dont celle, stupéfiante, de Danya Ortmann. Intellectuellement aussi, grâce à des argumentations, voire des laïus, philosophiques, poétiques, historiques et politiques, grappillés ici et là. Répétés au moins deux fois, de manière identique ou non, ces phrases viennent mettre en lumière notre contraignante réalité d’apprentissage et de pensée, rappelant du coup le titre du spectacle, qui fait référence directe aux serinettes, cet outil de la Renaissance utilisé pour faire apprendre aux serins et aux canaris un chant imposé, leur faisant oublier alors par la force de la répétition leurs gazouillis naturels.


Crédit photo : Christine Bourgier

Polymorphe, Les oiseaux mécaniques est un amalgame de tableaux et de collages parfois étranges, parfois surréalistes, parfois visuellement très fort, souvent décousu et aux nombreuses interruptions – notons celle, à trois reprises, d’un hilarant Johnny Walker, de plus en plus ivre, qui publicise son scotch Red Label, en en buvant deux doigts à chaque reprise –, mais soutenu par une structure sous-jacente réfléchie et solide. Plus le spectacle avance, plus il s’éloigne de la symphonie, se créant son propre univers ludique, brouillé, déstabilisant, indiscipliné, multiple, tonitruant, voire abrutissant, mais toujours fascinant. La complexité et la densité de la proposition nous font immanquablement perdre le sens de celle-ci, si du moins nous en avions capté un (ou plusieurs) depuis le début de la représentation.

« L’art n’est pas le contraire de la barbarie », dit à un moment Alain-Martin Richard, agissant comme membre de la troupe et comme critique du spectacle tout à la fois ; une des nombreuses dualités du projet. Avec ce parapluie déplumé sautillant grâce à la vibration d’une machine à coudre, ces chaises qu’on manipule violemment, ces fusils qui pétaradent, ces sons, cette musique et ces mots martelés, rien n’est plus vrai. « Est-ce qu’écouter c’est obéir? », se demande le Bureau de l’APA. S’il est vrai que nous ne pouvons nous isoler totalement des sons qui nous entourent, leur interprétation nous appartient totalement. Mais pendant combien de temps ? Métissé, fragmenté, mouvant, Les oiseaux mécaniques est un objet insolite, qui ne plaira pas à tous les publics, mais qui charmera assurément par son côté marginal et non-conformiste.

Le spectacle sera aussi présenté lors du prochain Mois Multi à Québec, en février 2014.

12-12-2013