Mois d’août, fin d’après-midi, quatre générations d’une même famille se réunissent à la maison de campagne où tout le monde a vécu. Un rassemblement qui prend les allures d’un rendez-vous imposé pour tous. Pour l’occasion, on attend « ceux qui viennent de la ville » qui, sans le savoir, narguent ceux qui étouffent en campagne et rêvent de liberté, d’intensité et d’accès à une autre vie. Le silence et le déni sont assourdissants par leur présence quasi palpable. Est-ce que le clan résistera à cet après-midi chaud et étouffant?
L’écriture vivante, crue et sans complaisance de Jean Marc Dalpé nous plonge habilement dans des rapports familiaux conflictuels. Une dramaturgie qui dépeint avec beaucoup de justesse les blessures, les désirs assouvis ou non, ainsi que le défi d’exprimer ce qui gronde à l’intérieur de chacun de nous lorsque s’impose le besoin viscéral de rêver plus grand.
Section vidéo
Décor : Richard Lacroix
Costumes : Daniel Fortin
Éclairages : Guy Simard
Conception vidéo : Yves Labelle
Musique : Ludovic Bonnier
Accessoires : Normand Blais
Assistance à la mise en scène : Manon Bouchard
Une production DUCEPPE
par Geneviève Germain
Les relations humaines sont source de complicité, de partage et de bonheur, mais elles peuvent également être source de conflits, de blessures et de déni. Quoi faire quand un proche vit une situation qu’on ne saurait tolérer? Comment réagir quand on se sent impuissants face à une situation? Jean Marc Dalpé, auteur notamment de la série Temps durs, nous a habitués à une langue riche, crue et sans concessions. Sa plus récente pièce, d’abord présentée au théâtre de la Licorne en 2006, puis maintenant au théâtre Duceppe, ne fait pas exception à ce style d’écriture. Toutefois, le trouble qui s’installe est surtout dépeint par de lourds silences et par les interactions d’apparence anodine entre les personnages, interactions qui prennent tout leur sens alors que le tragique de la situation se dévoile.
Août – Un repas à la campagne a une prémisse qui promet tout ce qu’il y a de réconfortant : une famille se réunit pour souligner les récentes fiançailles de Monique (Chantal Baril) et d’André Mathieu (Gilles Renaud), couple de quinquagénaires résolument urbains. Pourtant, un drame gronde silencieusement sur ces terres familiales, un drame qui réside dans les non-dits et dans la complexité des rapports humains. La pièce réunit quatre générations de femmes, Paulette (Nicole Leblanc), dame âgée et délicieusement malcommode, Jeanne (Pierrette Robitaille) la fille de Paulette et mère de Louise (Isabelle Roy), ainsi que Josée (Kim Despatis), fille de Louise. Sur leurs terres familiales résident également le mari de Paulette, Simon (Michel Dumont), qui se remet d’un récent AVC, et Gabriel (Frédéric Blanchette), le mari de Louise et père de Josée.
Alors que toute cette famille se réunit, on découvre peu à peu comment se tissent leurs relations. Josée clame vivre le plus grand moment de sa vie alors qu’elle attend les résultats d’un concours auquel elle est finaliste, mais personne ne semble véritablement s’en soucier, à son grand désarroi. Monique insiste pour gâter sa famille lors de son mariage, mais chacun refuse poliment de dormir dans la suite de l’hôtel qu’elle leur offre. Louise évite son mari et tout rapprochement physique. Jeanne refuse tout terrain d’entente avec Louise et approuve tout ce que Gabriel dit. Au travers de l’ensemble de leurs agissements, un malaise se dévoile, davantage par leur façon d’être que par les mots qu’ils prononcent, que ce soit la rigidité de Jeanne, la joyeuse obstination de Simon, l’hyperactivité anxieuse de Josée ou la sourde frustration de Gabriel.
Alors que tout dans la pièce se rapproche de situations que n’importe quelle famille peut vivre, l’impressionnant décor de Richard Lacroix, constitué d’une maison en bardeaux de bois qui remplit toute la scène, nous éloigne un peu de cette famille qui semble toute petite au pied de cette structure. Pourtant, il témoigne de l’immensité de l’importance du cadre familial en prenant toute la place. Les projections d’arbres et de feuilles sur les planches de bois rappellent habilement que l’action se déroule en campagne, tout comme la balançoire qui pend au bout d’une chaîne rouillée.
Dans cette mise en scène de Martine Beaulne, chacun des acteurs contribue à bâtir la trame dramatique qui se dessine, sachant doser l’humour qui ponctue la pièce et les sentiments refoulés des personnages. Les personnages de Monique et de son fiancé sont toutefois un peu plus glissants, leur habillement les rendant un peu plus caricaturaux. Néanmoins, le désarroi palpable de Louise est criant de vérité, tout comme la complexité des relations qui se devine dans les visages et les regards de chacun des acteurs. Août – Un repas à la campagne est une pièce dure, mais dont on ne peut qu’apprécier la montée dramatique.