Du 16 au 27 mars 2010, du mardi au samedi 20h
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C'est ainsi mon amour que j'appris ma blessure

Texte : Fabrice Melquiot
Mise en scène : Denis Lavalou et Marie-Josée Gauthier
Avec : Victoria Diamond, Denis Lavalou

C’est ainsi mon amour que j’appris ma blessure, c’est une heure et quinze minutes passées dans
l’intimité d’un homme qu’une peine d’amour a littéralement cloué au banc d’un aéroport. Assis de dos
à une jeune femme, il soliloque après une nuit d’alcool et de violences. Il parle, commente, interpelle,
questionne et… elle ne répond pas. Sa présence irradiante provoque pourtant une rédemption,
appelle la fin d’une nuit sans fin, l’aube d’un jour nouveau.

Nous sommes toujours ébranlés par ces êtres que l’existence semble avoir laissé sur le bord du
chemin pour des raisons pas toujours décelables et qui souffrent d’autant plus de leur isolement que
le XXIème siècle vit une véritable overdose de communication. C’est donc à une forte expérience de
plongée dans le coeur dévasté d’un être humain que Fabrice Melquiot nous convie et il le fait avec la
spontanéité, la délicatesse, la justesse et l’humour d’une langue qui rend son oeuvre ouverte et
lumineuse, accessible à tous.

Scénographie Cédric Lord
Images Frédéric Saint-Hilaire
Lumières Stéphane Ménigot
Trame sonore Éric Forget
Assistante à la mise en scène et régie Sabrina Gilbert
Direction technique Simon Lachance assisté par Jérémi Guilbault

Une présentation et une production Théâtre Complice
Créée en résidence au Théâtre de la ville à Longueuil et à La Chapelle

La Chapelle
3700, rue Saint-Dominique
Billetterie : 514-843-7738

par Aurélie Olivier


Crédit photo : Robert Etcheverry

C’est ainsi mon amour que j’ai appris ma blessure, de l’auteur français Fabrice Melquiot, nous propose une plongée dans l’esprit d’un homme en peine d’amour, abandonné dans une ville qui n’est pas la sienne, y créant une routine pour mettre un semblant d’ordre dans une existence qui a perdu tous ses repères. Aujourd’hui, c’est samedi, et le samedi, c’est l’aéroport. C’est donc là qu’il est soudain frappé par la présence irradiante d’une belle inconnue venue s’asseoir sur le même banc que lui et qu’il entame avec elle une conversation à laquelle elle ne sera jamais conviée.

La langue de Melquiot est sinueuse (sans être alambiquée), collée au cheminement de la pensée d’un être sans aucune censure qui commente, digresse, se noie dans les mots, tout en gardant une forme de désinvolture malgré l’excès de boisson, de chagrin, de manque de sommeil. On perçoit qu’un travail très rigoureux a été mené sur le texte par les deux acolytes du Théâtre Complice, Marie-Josée Gauthier et Denis Lavalou. Celui-ci livre une interprétation magistrale de cet homme perdu, écarté de son propre chemin de vie, un homme que l’amour a assommé mais que le désir réveille, qui s’accroche à une inconnue comme à une bouée de sauvetage. L’entendre soliloquer nous renvoie immanquablement à notre propre solitude : solitude de pensées, solitude de douleurs, solitude comme un refuge aussi, parfois. De son côté, la jeune Victoria Diamond semble flotter, mi-langoureuse mi-ennuyée, tranquillement immobile et silencieuse, contrastant fortement avec le pauvre hère qui s’adresse à elle en pensée et qui fait d’elle le vecteur de sa catharsis.

La scénographie est magnifique, avec des vitres immenses rappelant un aéroport et un écran géant sur lequel défilent tantôt des ombres de passagers, tantôt des silhouettes d’avions. On regrettera simplement le choix, dans la seconde partie du spectacle, de projeter une silhouette floue de Lavalou, quand celui-ci ne s’adresse plus à l’inconnue, mais à lui-même. Voilà un parti pris qui nous sort abruptement de l’imaginaire et intervient comme un parasite agaçant. À part ce regrettable manque de confiance dans les capacités d’interprétation du spectateur, cette production est une vraie réussite.

22-03-2010

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