C’est une patente, une performance, l’idée d'un spectacle incongru, malséant, éclectique et intransigeant. Un cloaque immonde des bas-fonds moraux ou intellectuels. Une liberté rigoriste, fragile et audacieuse pour laquelle il faut être courageux. L’étrangeté captivante de l’animal, de la bête qui est dans l’homme… Empreint de mélancolie et de soubresauts, Concerto pour clavecin et chainsaw célèbre la beauté, le silence, la poésie, la danse et la musique. C’est un raid artistique. Se scalper tous pour voir en dedans. Se saouler de vertige et de brise céleste. Une tentative d’apprivoiser la mort… Un lieu de toutes les manifestations!
Aimé Césaire soutenait au cours des années cinquante, qu’il n’y a que la poésie et l’art pour faire face aux formes de violence exercées par les pouvoirs impériaux et colonisateurs, et il incitait à y avoir recours comme acte de résistance. Éric Robidoux a complété sa formation de comédien à l’École nationale de théâtre du Canada en 2005. Depuis, il a autant travaillé en danse qu’en théâtre. On lui connaît une grande fougue créatrice, mise à contribution dans des collaborations avec Estelle Clareton, Christian Lapointe, Robert Lepage, Jérémie Niel, et Dave St-Pierre, pour ne nommer que celles-là. Concerto pour clavecin et chainsaw est son premier acte de résistance…
Une présentation de La Chapelle
Une production d’Éric Robidoux
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Créée en résidence à La Chapelle
La Chapelle
3700, rue Saint-Dominique
Billetterie : 514-843-7738
par David Lefebvre
Le comédien et danseur Éric Robidoux présente à La Chapelle, pour quelques soirs seulement, son tout premier spectacle intitulé Concerto pour clavecin et chainsaw. Le titre est pour le moins évocateur, annonciateur : l'élégance du baroque, la rudesse de l'homme des bois et l’artiste se rencontrent, ici, entre quelques bûches, un réel clavecin et un homme à la poésie dure et sans contraste.
Concerto est un spectacle performance, fougueux, voire radicale dans sa forme. Façonné de situations appelant quelques côtés personnels du créateur, une mélancolie, une tendresse, une rage, le spectacle peine pourtant à proposer au public un fil conducteur assez solide à saisir pour qu'il pénètre et apprécie à sa juste valeur l'univers de Robidoux. La violence que l'on s'inflige ou à laquelle nous sommes confrontés tous les jours, sous toutes ses formes, semble être le seul point qui relie ensemble les différentes scènes.
On sent chez Robidoux un réel potentiel à l'intérieur des poèmes lus, une expérience spectaculaire derrière les quelques mouvements de danse, un talent indéniable de créateur, mais le spectacle reste trop morcelé, chaotique. Les images qu'il propose ne sont pas assez signifiantes pour justifier une réelle dénonciation, une sincère prise de parole. Certains passages roulent carrément à vide, comme le test Léger Lambert (un examen d'endurance physique contrôlé par une cassette) qui le fait sprinter pendant trop longtemps en fond de scène ou les lectures de certains passages d'un livre de Jack Kerouak, au micro, avec un effet d'écho psychédélique. Si l'effet premier est saisissant, l'abus de celui-ci assomme et lasse. Le slow qu'il exécute avec une spectatrice, sur une chanson de Neil Young, est cocasse, voire attendrissant, et la finale, la tête emprisonnée dans une pellicule de plastique, étouffant, marchant à l'aveugle au travers plusieurs pièges à pattes de type Colibert suspendus et claquants, fait respirer difficilement une partie de l'auditoire, sans pour autant choquer ou ébranler.
Le musicien Martin Robidoux, en chemise à carreaux, exécute en direct quelques Arias et Variations pour accompagner le comédien lors des diverses scènes. Les mélodies de l'instrument créent une distanciation avec le propos brutal de la pièce. Les notes du clavecin se mélangent aussi à la bande-son, composée par Simon Carpentier, qui crée plusieurs ambiances, de sons d'oiseaux jusqu'à de lourds et étranges univers, quand elles ne se perdent pas dans les soubresauts tonitruants d'une scie à chaîne.
Incongru, étrange et éclectique, Concerto pour clavecin et chainsaw, qui affirme être un «raid artistique», ne balance finalement qu'entre l'expérimental, la prise de parole libre et personnelle et le freak show plutôt soft. Reste l'entrée impromptue d'un invité-surprise, un cochonnet noir qui répond au nom de Bacon et qui fait la joie de bien des spectateurs.