Gravel Works, musique live et chorégraphie, est un présentoir d’humeurs, d’humour, d’états de corps, de chansons pop, de personnalités et d’impertinences sympathiques. Intégrale d’une œuvre à géométrie élastique commencée en 2006 et proposée depuis à la carte ou au menu, elle met en scène les « bons coups » de la danse contemporaine entre virtuosité brute et coexistence des genres artistiques. Cultivant le paradoxe et l’ironie, l’air de ne pas y toucher, le maître d’œuvre Frédérick Gravel, commentateur lucide, retourne le spectacle comme un gant et révèle la « traçabilité » du processus artistique. Complice du spectateur, il fait un pied de nez aux avant-gardes de tout poil, aux chasses gardées des élites. Avec désinvolture, il sort des territoires assignés à la culture populaire et à celle de l’establishment, et les fait s’acoquiner. De haut en bas ou de bas en haut : pour la tête, le cœur et le sexe — ensemble ou séparément.
Gravel et ses acolytes font partie de la même génération d’artistes issus de nos écoles et universités, diplômés en danse, en théâtre ou en musique, tous plus ou moins polyvalents. On les a vus, entre autres, avec les chorégraphes Dave St-Pierre (F. Gravel, Robidoux, Ducharme), Daniel Léveillé (Milicevic), José Navas (Wright), Roger Sinha et Marie Chouinard (Vigneault), avec les groupes musicaux Basta (Boucher), The Ease Down (H. Gravel). Le GAG est un collectif temporaire et variable de personnalités actives dans le processus de création, réunies pour « créer beaucoup, essayer abondamment, s’obstiner énormément » et (se) donner du plaisir. Intelligemment.
Dramaturgie Katya Montaignac
Lumière Alexandre Pilon-Guay
Sonorisation Louis Carpentier
Répétitrice Anne Lebeau
Une présentation de La Chapelle
Une production de Grouped’ArtGravelArtGroup
En collaboration avec le Festival TransAmériques et Tangente
La Chapelle
3700, rue Saint-Dominique
Billetterie : 514-843-7738
par Mélanie Thibault
Tous les possibles
Le mouvement chorégraphique se libère des grandes utopies avec Frédérick Gravel et ses interprètes dans le feu de l’action. Le corps appelle à la réalité sans fioriture, tout près d’une satire de la danse contemporaine, le sourire en coin.
C’est l’histoire du GAG (Grouped’artGravelartGroup), de ses recherches, de passages favoris du créateur comme les fins et les débuts de spectacles, de connections tête-cœur-sexe, de sensations, d’échanges avec le spectateur, de moments guitare-batterie, de performances course-frite-chanson, de danse post-coïtale et autres plaisirs uniques. Un lieu de tous les possibles. Ceux dont on rêve adolescent et qui se perdent souvent au nom du plus grand, du plus élogieux, du « mieux », qui souvent rime avec « peu ».
C’est fort de pouvoir s’exprimer comme le fait Gravel au micro, sans se la jouer, avec pédagogie, mais sans se prendre la tête. Pour le spectateur qui cherche à voir ce qui se cache derrière la création, il y a cette place dans Gravel Works. Pas évident de rendre compte de ce projet tant il est près du créateur et des interprètes, tant il est direct et clair en lui-même. C’est une expérience rare, simple, belle, touchante même.
Le spectacle dure deux heures, avec un entracte pour encourager La Chapelle par l’achat d’une bière, à la demande bien justifiée de Gravel lui-même. Moment favori : la cause art contemporain soutenue par des danseurs en position fœtale, torse nu, le regard lointain. C’est avec des spectacles comme celui-ci que l’art actuel prend son sens, celui du moment- séquence, cette liberté de déconstruire la narration. Just do it baby, go see Gravel Works before it’s too late.