(extraits du communiqué)
Pour cette édition 2014, les Contes urbains auront une facture plus théâtrale. Une représentation chorale, sans entracte. Huit comédiennes, une musicienne, une scénographe, une éclairagiste et une metteure en scène. Les hommes s'y comptent sur les doigts de la main, littéralement, ils sont cinq, du côté des textes. Bien que des hommes aient écrit cinq des huit histoires, on peut appeler cette édition: «Paroles de femmes. Histoires de femmes»
20 ans déjà que le Théâtre Urbi et Orbi venait faire son nid sur Papineau, dans ce douillet chez soi, chaudement soutenu et accueilli par l'équipe de La Licorne.
À l'approche du 40e anniversaire du Théâtre de La Manufacture, souffle un vent de renouveau. Il va de soi qu'Urbi et Orbi participe à l'aventure en proposant un concept élargi de spectacle de temps des Fêtes. Une veillée. Comme le protocole des Contes urbains nous limiterait, nous décidons d'ajouter un nouveau concept à nos inventeries.
L'édition 2014 des Contes urbains sera donc la dernière à La Licorne. À partir de l'an prochain, le Théâtre Urbi et Orbi présentera dans le même créneau une toute nouvelle folie de mots, une veillée de parole et de musique, un nouveau plaisir de temps des fêtes qui, nous l'espérons, aura une vie aussi longue et heureuse que les Contes urbains auront eu.
Cela implique évidemment que nous ne présentions plus les Contes urbains à La Licorne. On ne peut pas présenter deux spectacles en même temps dans une même salle. Ceci dit les Contes urbains ne meurent pas pour autant. N'ayez crainte zamoureux zé zamoureuses des Contes urbains, la pérennité du concept n'est pas en danger. Urbi et Orbi ne les abandonne pas. Il y aura éventuellement d'autres Contes urbains d'Urbi et Orbi, ici ou là, et pas nécessairement dans le temps des fêtes d'ailleurs. Il nous reste beaucoup à dire avec ce concept. Bien des formes à explorer. Bien des manières de faire à expérimenter. Avec ce désir constant de se rapprocher de la pureté du dire.
Profitez donc de la dernière édition des Contes urbains à La Licorne. Que la fête continue et que les événements se multiplient.
Éclairages Lucie Bazzo
Scénographie Karine Galarneau
Musique Jackie Gallant
Régulier : 32,25$
30 ans et - : 22,25$
65 ans et + : 27,25$
Une production Urbi et Orbi
par Geneviève Germain
Les contes urbains sont devenus une véritable tradition du temps des Fêtes pour les amateurs de théâtre. Ce concept imaginé il y a plus de deux décennies par Stéphane Jacques et Yvan Bienvenue permet de livrer des récits inédits sur les thèmes de la ville et du temps des Fêtes où l’oralité est à l’honneur. Chaque soirée de contes met en scène plusieurs histoires, chacune étant écrite par un auteur différent et livrée par un acteur avec qui il travaille de paire. Pour cette 20e et ultime édition, Les contes urbains cèdent la parole aux femmes avec huit actrices sur scène et Brigitte Poupart à la mise en conte.
Pour cette toute dernière cuvée des Contes urbains au Théâtre de la Licorne, Brigitte Poupart a choisi de retenir une approche plus près du théâtre où le lien avec le public est un peu plus distant, notamment à cause de l’éclairage très sombre, de la scène centrale qui sépare le public en deux et surtout parce que les actrices font l’objet d’une complète mise en scène. Elles se déplacent, font face au public, se retournent et attendent pour la plupart la fin de leur récit avant de s’asseoir définitivement sur leur tabouret. Aussi, il n’y a aucun entracte au programme et la musicienne Jackie Gallant se fait discrète derrière sa table de régie. La signature est classique et épurée alors que les contes se font très intimistes.
C’est Diane Lavallée qui brise la glace avec le conte Le joyeux Noël de Stéphane Jacques où la narratrice se paie le plus beau cadeau de Noël, soit de déménager à Laval (!). Elle nous raconte la goutte qui a fait déborder son trop-plein de petites humiliations dans ce Plateau où les voisins se soucient peu des autres. Ce premier récit mordant et rythmé laisse ensuite place au plus lent, mais tout aussi senti, Snob? de Stéphane Lafleur, habilement livré par Brigitte Poupart. Dans ce conte, le voisinage ne se fait pas nécessairement plus agréable. Victime de vandalisme dans le quartier Hochelaga, la femme ressasse cet incident et fait le tour de sa maison pour s’assurer que tout est en place et que rien ne manque. Alors que le conte explore la mince différence entre le snobisme et le bon goût, c’est surtout la solitude de cette femme qui nous frappe et sa fragilité sous une apparente contenance.
Le troisième conte intitulé Prédateur (Christine Germain) est inspiré d’un fait divers datant des années 90 où deux jeunes femmes ont été assassinées rue Laurier. L’interprète Léa Simard emprunte la voix d’une vendeuse de la rue St-Denis qui croise le chemin de ce prédateur et qui conserve le souvenir frissonnant de cette rencontre où elle a sans doute frôlé la mort de près. Elle réussit à transmettre justement l’inquiétude et le mystère entourant cette rencontre. Le conte suivant relate l’histoire d’une femme qui reçoit un diagnostic de cancer du sein à la veille de Noël. Dans Noël à vie de Chantal Cadieux, l’actrice Martine Francke livre avec douceur ce récit intimiste et sensible.
Tout ce qu’y donne se brise de l’auteur Justin Laramée détonne des premiers contes présentés. Résolument plus ludique, le récit livré avec vigueur par Dominique Quesnel décrit l’histoire d’un homme qui n’ose plus donner de cadeaux, car ils se brisent tous et blessent du même coup les gens à qui il les offre. Il est suivi du conte Moé c’est ça Noël, écrit et joué par Michelle Blanc, un récit à l’état brut d’une femme qui s’est vue privée des célébrations de Noël auprès de sa famille suite à l’annonce de sa transsexualité. L’histoire est débordante d’amour et sincère malgré quelques imperfections. Avec Obélisque (La fille de Francine) de Marcel Pomerlo, Sandrine Brisson nous ramène vers un côté plus sombre qui était commun aux premiers contes. Elle raconte la dernière nuit de sa mère, celle où en pleine rémission d’un cancer, une simple marche dans le parc Lafontaine à proximité de l’hôpital où elle est traitée lui sera fatale. La poésie des mots de l’auteur est livrée avec un émoi justement contenu, rendant la chute plus douce, mais néanmoins brutale.
Enfin, c’est Cocaline d’Yvan Bienvenue qui clôt définitivement les Contes urbains tels qu’on les connaît. Ce conte déjà présenté en 1995 ainsi que lors de l’édition Best of 10e anniversaire en 2004 est de nouveau livré par France Arbour, incarnant une vieille vivant dans un CHSLD qui se paie un jeune gigolo pour Noël dont le récit surprend et déstabilise par sa description sans détour de ses pulsions sexuelles.
Les contes urbains édition 2014 sont à l’image des dernières années de ce rendez-vous qui était devenu un incontournable de nos débuts d’hiver : un accès privilégié à des histoires inédites, écrites par différents auteurs et portées par des acteurs qui apportent une saveur particulière à chacun des contes mis de l’avant. Cette formule, qui s’est théâtralisée avec une mise en scène plus poussée ou placée avec les années, n’est pas parfaite et peut parfois donner lieu à un alliage inégal de récits, mais la découverte vaut le détour. On nous promet que d’autres Contes urbains referont éventuellement surface et que dès l’an prochain un nouveau concept de veillée de parole et de musique sera présenté par le Théâtre Urbi et Orbi. C’est tout de même avec regret que nous quittons ces contes qui ont pendant de nombreuses années habité nos temps des Fêtes.