Étienne Pilon, acteur tragique, effectue son premier one-man-show. Il a trouvé comment devenir immortel et souhaite propager la bonne nouvelle. Son truc pour éviter l’inéluctable? Cocher tous les vœux de sa « bucket list », la fameuse liste des choses à réaliser avant de mourir. Comment réussir cet exploit? Être productif et efficace. Juste. Tout. Faire. Vivre toutes les vies en une seule et être partout en même temps… même là où on n’est pas.
La tragi-comédie Deux pièces pour Étienne Pilon explore notre rapport au culte de la performance, le don d’ubiquité que la société exige de nous et les conséquences de ce mode de vie. Comment résister à cette tendance? Face à ce rythme effréné, et devant l’abondance de possibilités, sommes-nous davantage tentés de percevoir ce que l’on manque, plutôt que de profiter du moment présent? Au cœur de cette expérience théâtrale différente, le spectateur se retrouvera lui aussi confronté à un déchirant dilemme!
Jean-Philippe Lehoux est de retour avec ce troisième texte écrit dans le cadre de sa résidence d’auteur à La Manufacture, après Napoléon Voyage (2014) et Normal (2015). Charles Dauphinais assure la mise en scène. Les deux complices de création entament ainsi une seconde collaboration, après avoir travaillé ensemble sur L’Écolière de Tokyo, présentée au Théâtre Denise-Pelletier en 2016.
Texte Jean-Philippe Lehoux
Mise en scène Charles Dauphinais
Avec Myriam Fournier, Étienne Pilon et Pascal Rousseau
Crédits supplémentaires et autres informations
Assistance à la mise en scène Andrée-Anne Garneau
Décor et accessoires Julie Vallée-Léger
Costumes Cynthia St-Gelais
Éclairages Marie-Aube St-Amant Duplessis
Musique Patrice d’Aragon et les interprètes
Vidéo Robin Kittel-Ouimet
Tête-à-tête jeudi 29 août
Régulier 35,50$
65 ans et + 29,50$
30 ans et – 25,50$
Le prix de votre billet comprend les taxes, les frais de billetterie et il inclut un montant de 50 sous qui viendra appuyer notre travail de développement dramaturgique.
Une production Théâtre Hors Taxes en codiffusion avec La Manufacture
Dans une société dont la devise semble « être toujours plus » – plus de possessions, plus d'expériences uniques, plus de projets, d'activités, de souvenirs... –, le « ici et maintenant » auquel nous convie le théâtre paraît plus que jamais incongru. Comment peut-on n'être qu'à un seul endroit et jouir du moment présent quand il se passe tellement de choses ailleurs en même temps? Qu'est-on en train de manquer?
Deux pièces pour Étienne Pilon joue de cette perception très humaine et surtout très contemporaine, ce mal du 21e siècle qu'on appelle parfois fear of missing out, pour bâtir une production à deux branches, une dans la Petite Licorne et une dans la Grande Licorne, les deux salles du théâtre de la rue Papineau. Dès le départ, les spectateurs sont appelés à faire un choix tranché et irrémédiable : s'assoiront-ils dans la grande ou dans la petite salle?
Dans l'une des salles, on nous propose une conférence aux accents nouvel-âge qui ne détonne pas dans notre décennie carburant aux motivateurs, influenceurs et coachs de vie de tout acabit. Le conférencier, l'acteur Étienne Pilon, nous y explique avoir vécu un épisode quasi mystique après avoir reçu un coup à la tête lors d'un voyage et lors duquel il ne vivait plus que dans l'instant présent. Pour recréer ce sentiment, il s'efforce de nous démontrer le caractère crucial de la bucket list (cette liste de choses à faire ou à expérimenter avant de mourir) dans notre recherche d'immortalité. Tandis qu'il prétend s'épanouir et avoir trouvé la voie pour devenir un nouveau lui, ancré dans le moment présent, il fait plutôt la démonstration qu'il n'est jamais vraiment là.
Le propos de l'auteur (...) cible notre obsession collective pour la performance et l'hyperconnectivité.
Le propos de l'auteur Jean-Philippe Lehoux (Comment je suis devenu touriste, Napoléon voyage), généralement bien servi par la mise en scène tout en faux-semblants de Charles Dauphinais, cible notre obsession collective pour la performance et l'hyperconnectivité. L'effet comique de la conférence perd toutefois de sa fraîcheur assez rapidement, retardant d'autant l'arrivée du ressort dramatique en milieu de spectacle. Quand la production utilise pleinement le potentiel spatial qu'offre La Licorne et l'humour absurde que Lehoux maîtrise bien, elle multiplie les bonnes idées... avant de retomber dans une formule théâtrale plus conventionnelle, qu'on rattache mal à l'ensemble. Difficile toutefois d'en dire plus sans ruiner l'effet de surprise.
Au-delà de l'exploration que Lehoux, et son personnage pivot d'Étienne Pilon, livre au public de La Licorne, empressé et un peu fébrile en cette soirée de rentrée théâtrale (lors de laquelle, ironiquement, on espère voir les spectacles « qu'il faut voir cette saison »), le spectacle nous laisse sur notre faim. Malgré la performance d'Étienne Pilon, rejoint par Myriam Fournier et Pascal Rousseau, les pistes narratives s'éparpillent et la réflexion se brouille au point de demeurer finalement en surface.
Le procédé dramatique et le dispositif scénique éclaté valent cependant le coup d'oeil, et si vous voulez vraiment être sûr de ne rien manquer, La Licorne propose un tarif réduit aux curieux qui reviendront voir le spectacle pour vivre l'autre parcours...