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Du 9 au 27 janvier 2008 (Maison Théâtre, Montréal)
Du 14 au 23 février 2008 (Les Gros Becs, Québec)

Les Enchaînés (à partir de 10 ans)

Texte de Philippe Dorin
Mise en scène de Ismael Safwan
Avec Philippe Cousin, Vincent Eloy, Vanessa Rivelaygue, Marie Seux

Vous avez un téléviseur à la maison ? Cela étant, vous êtes conviés au théâtre... Vous y retrouverez, transposé sur la scène, tout l'univers télévisuel vu par les Français. Dans Les Enchaînés, les marionnettistes donnent vie à une trentaine de personnages décapants qui incarnent les enjeux de notre fréquentation du petit écran, nous entraînant dans une succession de sketchs tous plus festifs les uns que les autres. Vedettariat, sensationnalisme à la carte, placements publicitaires intempestifs, tout y est ! Une célébration qui fraye avec l'absurde, dans une langue truculente, jubilatoire et incisive...

Pamphlet ludique contre la télévision, critique cinglante mais humoristique à souhait, Les Enchaînés est un spectacle qui se déchaîne joyeusement contre les chaînes d'un esclavage virtuel mais bien réel : celui des chaînes télévisées. Imaginez que la vie réelle se fige quand vous appuyez sur la touche Pause... Imaginez que vous puissiez zapper au théâtre...

Conception des marionettes Michel Klein, Jaime Olivares
Scénographi eet éclairages Gerdi Nehlig
Décors et accessoires Jaime Olivares
Costumes Françoise Dapp-Tataï

ACTIVITÉS D'ANIMATION THÉÂTRALE
Rencontrez les artistes du spectacle après la représentation.
Le 3 février 2008 à 16h. Gratuit

Une création de Flash Marionnettes (France) en coproduction avec le TJP Strasbourg, le CDN d'Alsace, La Passerelle, centre culturel de Rixheim et le Palais des Arts de Vannes

Maison Théâtre
245, rue Ontario Est
Billetterie :
514-288-7211

Les Gros Becs
1143, rue Saint-Jean
Billetterie : 418-522-7880 poste 1

 

par Magali Paquin

Entre le pop-corn et la télécommande, un couple est rivé à la télévision. Dans l’écran cathodique de tous les possibles, une trentaine de marionnettes parodient les absurdités  télévisuelles, sans faire dans la dentelle. « Les enchaînés », une création de la compagnie  française Flash Marionnettes, dénonce l’aliénation de la boîte à image avec un humour irrévérencieux et sans concession.

Abrutissante, spectaculaire ou kitsch, le portrait de la télé que dresse l’auteur Philippe Dorin est loin d’être édifiant. Les projecteurs sont braqués sur les stéréotypes et tous les protagonistes du petit écran passent à la moulinette, de la godiche blondasse au lecteur de nouvelle, représenté sous les traits d’un primate belliqueux. Le langage est cru, les insultes fusent. Comme les claques, d’ailleurs. Et le tout à la sauce française, bien sûr. Si les spectateurs, particulièrement les plus jeunes, risquent de ne pas saisir toutes les subtilités de la parodie, ils trouvent minimalement de quoi rire entre les gifles et les coups bas que s’infligent les personnages.

Le metteur en scène Ismael Safwan fait s’enchaîner les émissions sous forme de saynètes, revenant sporadiquement au couple hagard affalé devant l’écran cathodique. Il y a bien ça et là quelques liens entre des personnages ou des programmes, mais les anecdotes télévisuelles demeurent dans l’ensemble détachées les unes des autres. Du sport au bulletin de nouvelles, en passant par le téléroman savon, les genres se succèdent de façon parfois décousue. Ce qui est propre à la télé donne ici, sous forme théâtrale, une impression d’éparpillement. Rien pour gâcher le plaisir, cependant.

Les marionnettes de Michel Klein et de Jaime Olivares valent à elles seules le détour. Étant elles-mêmes très typées, il ne pouvait y avoir meilleur choix pour se livrer à l’exercice de la caricature. À la fois superbes et désopilantes, elles se mettent un texte truculent en bouche par l’entremise des comédiens-manipulateurs (Philippe Cousin, Vincent Eloy, Vanessa Rivelaygue, Marie Seux), lesquels ont un talent certain pour jouer du pantin. On vient carrément à les oublier et à croire que la marionnette est animée d’une vie propre.

Pouvant devenir prétexte à une réflexion critique sur les inepties télévisuelles, «Les enchaînés» est avant tout un moment fort d’humour incisif et de délire absurde. Car c’est bien la caricature qui prime dans cette production théâtrale, enchaînant à son tour le spectateur habituellement libre de choisir ses chaînes…

16-02-2008

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par David Lefebvre

Quand Les Enchaînés se déchaînent sur les chaînes...

Les enchaînés est le plus récent spectacle, encore tout chaud, de la troupe française Flash Marionnettes, fondée à Strasbourg en 1981. Farce féroce et cynique sur la télévision, satire sans retenue d'une remarquable intelligence et d'un humour parfois cruel mais totalement irrésistible contre la mass-médiatisation, cette pièce place le spectateur autant devant que dans le petit écran. Et quoi de mieux que des marionnettes pour élaborer sur la pouvoir de manipulation et d'aliénation de la télé? Depuis son arrivée dans les foyers, les habitudes de vie des gens ont été atrocement chamboulées. La télévision est devenue notre principale source de loisir et de discussions. Selon Statistiques Canada, un Québécois moyen aura regardé la télé pendant 10 ans de sa vie! Nous sommes accaparés par cette boîte magique... Comme le dit si bien l'un des personnages de la pièce : «le monde n'est plus rond, il est plat ; rectangulaire.».

Une trentaine de marionnettes, superbement conçues par Michel Klein et Jaime Olivares, défilent sur la scène noire, sans décor (mis à part un panneau, en arrière-plan, éclairé d'une couleur unie (soit vert, bleu, rouge). Au lever du rideau, huit d'entre elles nous chantent la ritournelle «Ainsi font, font, font...» et se font éliminer sans ménagement. Puis, les scènes se succèdent rapidement : d'une émission style télé-achats, où l'on vend des boîtes vides, à un bulletin de nouvelles où des lecteurs de différents réseaux se font la guerre en se menaçant au révolver, pour plonger ensuite dans une parodie de soap plutôt «frappante» et atterrir dans un quiz intitulé «C'est pas gagné» qui place une concurrente face à un chien parlant, le spectacle est une véritable critique mordante, présentant des situations absurdes, des moments percutants, où les personnages et leurs propos, souvent plus profonds qu'il n'y paraît, font flèche de tout bois. On rigole sans arrêt quand ce couple de téléspectateurs nous revient à quelques reprises, assis sur leur sofa, ou quand cet animateur de sport à l'accent marseillais tente de commenter un match de ping-pong ou de football européen, et on sourit quand la petite frimousse de Séverine se ramène ou quand Hippolyte se rend compte que ses copains, avec qui il voudrait bien faire une bêtise ou deux, ont déserté les rues pour regarder la télé...

Toutes ces marionnettes sont manipulées habilement par quatre comédiens, soit Philippe Cousin, Vincent Éloy, Vanessa Rivelaygue et Marie Seux. Même s'ils pratiquent à vue, ils savent efficacement se dissimuler. Ismaïl Safwan offre une mise en scène soignée, musclée, à l'image du texte désopilant de Philippe Dorin. On entre définitivement dans le monde de la télé française, mais les ressemblances avec le nôtre sont nombreuses. Quelques expressions pourraient aussi échapper aux petits spectateurs, tels que R.E.R., dégommer, teuf, cocard ou guiboles ; le programme de la soirée de la Maison Théâtre (merci!) offre la définition de quelques termes utilisés. Alors même si les plus jeunes s'amuseront, ce sont définitivement les plus vieux, voire les parents, qui s'en paieront une tranche, comprenant plus aisément les différentes références et les nombreux liens.

Par le biais de l'humour (parfois virulent), Dorin et Safwan, frappés par la médiocrité et le pathétisme de la télévision d'aujourd'hui, nous proposent une réflexion nécessaire sur les rapports que nous entretenons avec celle-ci, ou du moins sur une partie de ce qu'elle présente et représente. Dénonciation, témoignage, pamphlet guignol, Les enchaînés est un excellent spectacle qu'il ne faut pas rater, ni zapper.

30-01-2008