Texte : Suzanne Lebeau
Mise en scène : Gervais Gaudreault
Avec Marcelo Arroyo, Carole Chatel, Marcela Pizarro, Alejandro Venegas, Jean-Guy Viau
Salvador, un écrivain originaire d’un petit village péruvien, ranime ses souvenirs d’enfance... les premières années de sa vie, sauvé par sa mère alors qu’il n’était pas plus gros qu’une patate, le départ de son père et de son frère, les crayons de couleur d’Ana qui lui a appris à écrire à l’âge de quatre ans. Il se rappelle les cireurs de chaussures dont il aurait dû partager le destin, si sa mère n’avait pas cru si fort en lui, comme elle croyait obstinément que tout manguier peut produire des mangues. Tous ces personnages nous parlent de la vie quotidienne dans les montagnes, souvent attendrissante, parfois festive, malgré les dures conditions et la pauvreté, dépeintes ici, non pas comme une triste fatalité, mais comme un véritable stimulant au rêve.
Histoire de courage, de fierté et de solidarité, Salvador est une véritable leçon d’espoir. Grâce à un texte touchant par sa profonde vérité et à une mise en scène rythmée par les chants et la musique des Andes, ce spectacle nous invite à approfondir une réalité différente et nous permet de mieux saisir l’âme du Sud.
Le 28 septembre à 15h.
Rencontrez les artistes du spectacle après la représentation. Gratuit.
Le 4 octobre à 14h30.
Participez au parcours du spectateur. 10$ par personne, réservations requises.
Assistance à la mise en scène : Monique Corbeil
Scénographie, accessoires et projections : Francine Martin
Costumes : Mireille Vachon
Éclairages : Dominique Gagnon
Recherche musicale : Alejandro Venegas
Une création de la compagnie le Carrousel
Maison Théâtre
245, rue Ontario Est
Billetterie : 514-288-7211
par David Lefebvre
La Maison Théâtre ouvre sa 25e saison avec un spectacle d'une grande richesse culturelle et humaine, qui raconte l'histoire de Salvador (Jean-Guy Viau), petit et pauvre Péruvien des montagnes, de sa naissance difficile et prématurée (il n'était pas plus gros qu'une patate) jusqu'à son départ vers la ville, pour étudier dans un collège, et devenir écrivain. Il nous présence avec une tendresse infinie sa mère Benedicta (Carole Chatel), la meilleure blanchisseuse du village, qui lui a inculqué le travail bien fait et l'amour de la blancheur des nappes. Dans son langage de mère, en le prénommant, elle confond salvador (sauveur) et salvado (sauvé). On fait aussi la connaissance de ses frères et soeurs (dont Ana, jouée par Marcela Pizzaro Minella), de son père (Marcelo Arroyo), qui disparaît lors de ses 5 ans, victime d'un échange sanglant au village entre les paysans et l'armée, et de Bianca (Marcela Pizzaro Minella), une jolie dame du village, qu'il aimera doucement et qui, pour sa part, le prendra en affection, pour le petit poète qu'il est. C'est que Salvador est aussi un amoureux des mots, qu'il découvre par lui-même. À 4 ans, en observant sa soeur jouer avec des bouts de ficelles de laine pour former des lettres, il a appris les sons référents, et par déduction, comment les agencer pour créer des mots. La terre est son premier papier, mais bien vite, petit curieux qu'il est, il se trouve un mentor, un professeur de l'école, et brille par son talent, jusqu'à devenir écrivain public, ramassant quelques sous pour sa famille en composant les lettres des habitants de la région, qui sont pour la plupart analphabètes.
Pièce d'espoir, de courage, Salvador nous transporte tout au sud, sans nous dépayser totalement, plaçant le petit spectateur dans une zone de confort mais ouvrant toute grande la porte de la découverte dans l'imaginaire des petits et grands. C'est grâce au langage (quelques mots et quelques expressions en espagnol, comme "Salvadorsito", qui veut dire "petit Salvador"), que l'auteure Suzanne Lebeau a su si bien manier, et à la mise en scène, de Gervais Gaudreault, d'une belle simplicité et efficacité, que le Pérou, ses habitants et sa réalité difficile nous sont offerts. L'école et l'éducation sont au centre de l'histoire, et sont synonymes d'avenir, de privilège coûteux. Benedicta se bat corps et âme pour qu'aucun de ses petits ne travaille pour l'aider, et qu'ils puissent fréquenter l'école pour s'assurer d'un meilleur futur que ce qu'elle peut leur offrir. C'est une histoire aussi de fierté ; encore ici, la maman le démontre avec passion, elle qui est certaine de manger les mangues de son manguier qu'elle tente de faire pousser dans un pot. La solidarité de cette famille est inspirante, tout le monde s'affaire à ce que chacun ait ce dont il a besoin : le grand frère défiera l'ordre maternel pour se trouver une place comme cireur de souliers, et rapportera quelques sous à la famille qui en a bien besoin.
La musique des Andes, si caractéristique, prend une grande place, égayant la pièce, avec tambour, flûte de pan et charango, une petite guitare typique, jouée par le musicien Alejandro Venegas. La scénographie est passe-partout, composée de rideaux beige-sable, avec un plancher en pente et un mur de fond. Ce sont les éclairages et les projections (de Francine Martin) qui composeront les éléments clé du décor : Salvador arrive sur scène dans un amas de mots, puis l'espace se transforme en flanc de montagne, en maison, en place publique, etc. Simple en apparence, mais efficace.
La compagnie Le Carrousel, depuis ses débuts, a drôlement fait voyager et a diverti des milliers de spectateurs partout à travers le monde, avec, entre autres, Petit navire, L'ogrelet, Petit Pierre, Le pays des genoux et Souliers de sable. Leurs créations ont cette qualité fantastique de présenter aux enfants leur place dans le monde d'aujourd'hui, qu'ils soient d'Amérique du Sud, d'Europe ou du Québec. Salvador, montée à l'origine en 1994, a été traduite en plusieurs langues et a été présentée plus de 200 fois. Elle nous entretient, avec douceur, rires et multiples émotions, d'une tout autre réalité, mais qui pique assurément la curiosité de chaque personne assise dans la salle.