Révoltée par la mort de sa grand-mère, Julie enfreint les règles du deuil pour apprivoiser sa peine. Pendant trois semaines, elle attend la Mort pour lui dire sa façon de penser et «lui mettre de la vie plein les yeux». Sous l’œil bienveillant de son chien, la jeune fille cheminera de la révolte à l’acceptation, du chagrin à l’espoir; l’espoir de retrouver un jour ceux qu’on aime au pays de Pacamambo, le lieu de tous les possibles, de toutes les lumières, où notre peau a la couleur de nos désirs. Poétique et direct, Pacamambo nous rappelle l’importance des rituels et aborde de front cette sombre réalité qui préoccupe tous les enfants. À la fois grave et fantaisiste, cette réflexion sans détour sur la mort culmine dans une célébration de la vie.
Cette œuvre de Wajdi Mouawad, auteur de renommée internationale et l’un des plus marquants de sa génération, est devenue un classique de la dramaturgie jeune public. Enveloppé d’un univers sonore pénétrant et porté sans complaisance par de solides interprètes, le texte est livré avec intelligence et sobriété. Il émerge de cette tragédie une fascinante luminosité. À voir ou à revoir.
Décors et accessoires Paul Livernois
Musique Pierre Labbe
Costumes Georges Lévesque
Éclairages Claude Cournoyer
Environ 55 minutes
12-19-25 janv. 10h
13-18-20-26 janv. 13h
14 janv 10h et 19h
16-22-30 janv. 15h
Activités d'animation théâtrale
Le dimanche 16 janvier 2011Une création de L’Arrière Scène
Maison Théâtre
245, rue Ontario Est
Billetterie : 514-288-7211
par David Lefebvre
Wajdi Mouawad signait, au début des années 2000, l’un de ses premiers textes jeune public, qui fut acclamé à l’époque par les critiques et par un large public. Dix ans plus tard, après avoir tourné au Québec, en France et au Maroc, Pacamambo est de retour sur les planches de la Maison Théâtre.
Julie est témoin, en pleine nuit, du décès de sa grand-mère qu’elle adore. Elle s’enfermera à la cave durant 19 jours, avec le cadavre et Le Gros, son chien. C’est qu’elle a deux mots à dire à la Mort, qu’elle entend remettre à sa place. C’est qu’on ne prend pas les gens comme ça !
Par l’entremise de flashbacks, Julie raconte son histoire à un psychologue, qui tente de comprendre pourquoi la jeune fille n’a averti personne durant sa réclusion. Elle lui parlera de sa révolte, de son incompréhension, de sa colère contre la mort, de sa vision de l’empathie, héritée de la vieille dame, et de Pacamambo, ce pays d’Afrique disparu, berceau de l’humanité, où tout le monde se rend lorsque la mort vient nous chercher, et où tous devient chacun.
Grâce à une écriture qui ne fait aucun compromis, tout aussi directe qu’empreinte de poésie, Wajdi Mouawad entraîne le public au cœur d’un rituel difficile à saisir, mais salutaire, essentiel, avec intelligence et humanité. L’imaginaire, la foi et le rêve côtoient une réalité dure à avaler, intolérable : le deuil, la disparition, puis la survie. Il évoque aussi la notion de racisme, de préjugés, et met en place une discussion qui, finalement, n’a que pour seuls sujets la vie et l’amour. Le fantastique est ici un moyen de défense que la jeune fille utilise pour accepter l’évidence, chasser le chagrin, trouver un sens, quel qu’il soit, et pour nourrir l’espoir que sa grand-mère n’est pas disparue pour toujours.
Épurée, symbolique, la mise en scène de Serge Marois évoque des images précises, évocatrices, esthétiquement simples mais abouties, tout comme le jeu des comédiens. Julie Beauchemin interprète une jeune Julie vibrante, allumée, assurée. Denis Lavalou incarne avec autorité et compassion le psychologue, et avec un certain sens surnaturel la courte matérialisation de la Mort. Chantal Dumoulin se glisse avec douceur et amour dans les draps de Marie-Marie, la grand-mère qui ne se tait pas, même au-delà de son trépas. Le chien, sous les traits du comédien Richard Lemire, se veut tout à fait attachant et ludique, un baume dans ce processus grave et sombre.
La scénographie ouverte, reproduisant de multiples escaliers, rappelle toujours les états physiques et psychologiques de la jeune fille et de l’homme qui l’écoute, ainsi que des chemins qu’ils empruntent. Les zones d’ombre sont utilisées avec dextérité, et les éclairages baignent de lumière les lieux où se situe l’action immédiate.
Théâtre de la contestation, de la constatation, théâtre de la magie au cœur des ténèbres, de la résilience, théâtre de la guérison, Pacamambo est une pièce qui pousse à la discussion, fait réfléchir parents et ados, provoque, touche, ébranle.