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Du 13 au 27 octobre 2012
CorbeauCorbeau
pour les jeunes de 4 à 9 ans
Idéation : Richard Lacroix, André Laliberté, Jean-Frédéric Messier
Texte : Jean-Frédéric Messier
Mise en scène : André Laliberté
Marionnettistes : Nicolas Germain-Marchand, Anne Lalancette, Estelle Richard, Dominic L. St-Louis

Lorsque Corbeau se pose dans son sac de patates frites, la petite Nukum ne se doute pas que ce « drôle de moineau » sera dans sa vie pour toujours. Intriguée par son nouvel ami qui parle et qui prétend voyager d’un monde à l’autre, Nukum pose beaucoup de questions, mais doit souvent patienter longtemps pour avoir les réponses. Entre les allées et venues de Corbeau, Nukum a le temps de devenir maman et... grand-maman. Entourée de ses petits-enfants, elle raconte toutes les aventures de Corbeau. Mais ces histoires sont-elles bien réelles ou s’agit-il de légendes ?


Scénographie et marionnettes : Richard Lacroix
Musique : Libert Subirana
Éclairages : Gilles Perron

Une rencontre avec les artistes aura lieu le dimanche 14 octobre, après la représentation de 15 h.

Un parcours du spectateur aura lieu le samedi 20 octobre, à 14 h 30.

Une création du Théâtre de l'Oeil


Maison Théâtre
245, rue Ontario Est
Billetterie : 514-288-7211

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 Critique
Critique

par David Lefebvre

Je ne sais pas si mon histoire est vraie, mais je sais que tu vas y croire…


Crédit photo : Léon Gniwesch

Après Hamlet le malécite, le magnifique Wigwam et le récit-fleuve Kanata, Jean-Frédéric Messier poursuit son exploration des légendes amérindiennes et innues avec Corbeau, présenté en primeur à la Maison Théâtre en ce mois d’octobre fort occupé. L’un des grands talents de Messier est de parvenir à s’inspirer de contes millésimes tout en les intégrant avec respect et crédibilité dans un canevas moderne, voire urbain. C’est ainsi que Nukum, de son balcon d’une ville aux grands immeubles cachant l’horizon, fait la rencontre de Corbeau qui n’en veut qu’à ses frites achetées à la pizzeria du coin. Pour une frite ou deux, il échange une histoire, soit celle de sa transformation, de petit garçon tout blanc qui adore le goudron, né d’une femme morte, à cet oiseau noir au cri strident – une jolie façon de raconter la légende du changement de couleur du corbeau à la genèse du monde, une histoire réputée de la mythologie amérindienne.  Sans que Nukum le sache, Corbeau entre dans sa vie pour toujours. Elle le reverra une autre fois, au bord de la mer, où il lui racontera comment il avait dérobé le soleil d’un village qui le gardait prisonnier, et comment, trop excité de jouer avec cet astre chaud et brillant, il l’échappa malencontreusement dans le ciel. Puis, il viendra la visiter une dernière fois, venant la chercher à l’aube de son grand départ, alors qu’elle est huit fois grand-mère, et que Saskia, la plus vieille de ses petits-enfants, s’occupe d’elle tout en raffolant de ses histoires.

Si dans Corbeau, Messier traite de la transmission entre les générations et entre nous-mêmes, il le fait non pas par l’explication, mais par « l’expérience ». Le très jeune public n’en aura que pour les pitreries des nombreux volatiles – canard, pigeons, goéland et hilarante poule –, mais comprendra sans effort, presque inconsciemment ou malgré lui, la notion de transmission, de perpétuation, grâce à la structure simple, mais efficace, du texte de Messier. Comme Saskia le dit à la toute fin, « tant que nous aurons des bouches, elle (Nukum) sera vivante » ; tant que nous parlerons de culture, de langue ou de valeur, nous les garderons bien en vie. N’est-ce pas là la raison intrinsèque de l’existence des histoires?


Crédit photo : Léon Gniwesch

Le choix de la marionnette était tout désigné pour cette fable mi-ancestrale, mi-contemporaine. L’univers et l’expertise d’André Laliberté et le talent du concepteur Richard Lacroix font ici, encore une fois, des merveilles. Les marionnettes sont de toute beauté ; si la plupart d’entre elles sont à tiges, plusieurs techniques sont employées pour les manipuler. Et si certaines sont pleines, d’autres sont formées que d’un squelette esthétique qui nous renvoie à un autre monde. La manipulation des oiseaux, dont le canard en début d’épisode, volant et battant des ailes au bout de deux longues tiges flexibles accrochées au corps du manipulateur, étonne et ravit tout à la fois. La scénographie est superbement épurée, formée de deux petits plateaux en bois sur lesquels déambulent les marionnettes et un large écran en fond de scène. On se sert de celui-ci essentiellement pour de nombreux effets d’ombre, fort bien réussis, qui viennent se juxtaposer à des projections de toutes sortes, des décors de ville, de ciel ou de boisés bricolés dans du papier et du carton, manipulés en direct sous une caméra et une lampe d’appoint. Si les idées ne sont pas nouvelles, et que parfois le résultat sur écran donne l’impression que la caméra capte les images d’un peu trop près, elles sont pourtant exceptionnellement bien maîtrisées, grâce à la direction d’une grande précision d’André Laliberté et au talent des comédiens-marionnettistes Nicolas Germain-Marchand, Anne Lalancette, Estelle Richard et Dominic L. St-Louis.

Le Théâtre de l’œil, qui célébrera ses 40 ans l’an prochain et qui nous a offert certains des plus beaux spectacles de marionnettes des dernières années – mentionnons La Félicité, La cité des loups ou encore Sur 3 pattes – persiste et signe avec ce conte charmant et amusant, à la finale tout aussi belle qu’émouvante.

18-10-2012