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Du 15 mai au 1er juin 2013
Souliers de sableSouliers de sable
pour les 3 à 7 ans
Texte : Suzanne Lebeau
Mise en scène : Gervais Gaudreault
Assistance à la mise en scène : Anne-Catherine Lebeau
Avec Martin Boileau, Marie-Michelle Garon, Joachim Tanguay

Le sablier le montre : le temps est venu de se lever. Mais Élise, qui d’habitude est réglée comme une horloge, rêve paisiblement. Léo, réveillé, rêve lui aussi, mais les yeux ouverts : il désire tant ouvrir la cage des souliers, dans le coin de la chambre. Il décide de commencer sa journée sans Élise et s’empare de la clé. Aussitôt qu’il ouvre la cage, les souliers prennent la poudre d’escampette dans l’air frais du matin. Léo se lance à leur poursuite. Et c’est une Élise affolée qui part à sa recherche avec en tête toutes les catastrophes qui pourraient s’abattre sur Léo. Pourtant, le petit Léo, étonné, constate qu’il est fascinant — et pas si inquiétant — de découvrir « le dehors ».


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Décor, costumes et accessoires : Stéphane Longpré (collaboration spéciale de Katerine Brochu)
Lumière : Dominique Gagnon
Environnement sonore : Nicolas Rollin
Maquillage et coiffure : Pierre Lafontaine
Photo : François-Xavier Gaudreault

Une rencontre avec les artistes aura lieu le dimanche 26 mai, après la représentation de 15 h

Une création de la compagnie de théâtre le Carrousel en résidence au Théâtre de la Ville à Longueuil (Québec) en coproduction avec le Théâtre du Vieux-Terrebonne (Québec) et le Grand Théâtre de Lorient (France).


Maison Théâtre
245, rue Ontario Est
Billetterie : 514-288-7211

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Dates antérieures (entre autres)

Du 17 au 28 octobre 2007 (Gros Becs)
Du 7 au 25 novembre 2007 (Maison Théâtre)

 
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 Critique
Critique

par Olivier Dumas


Crédit photo : site de la Maison Théâtre

« Moi mes souliers ont beaucoup voyagé » chantait Félix Leclerc dans l’une de ses chansons les plus célèbres. Et ce sont de très attrayantes et intrépides chaussures qui servent de canevas à une énième fabuleuse œuvre de Suzanne Lebeau, Souliers de sable. Destinée principalement aux enfants de 3 à 7 ans, la pièce au charme ensorcelant suscite également un enthousiasme contagieux pour les grandes personnes. 

Quarante-cinq petites minutes suffisent à construire un univers à la fois onirique, intrigant et étrange. L’histoire de Souliers de sable se penche sur un microcosme familial où un frère et une sœur vivront le dilemme qui habite chacun de nous entre le confort de nos habituels repères tranquilles et la tentation enivrante de l’inconnu. Elle s’amorce dans une chambre alors que le petit Léo se réveille avant Élise, sa sœur aînée. Une cage trône dans la pièce où sont emprisonnées des chaussures en quête d’aventures et de l’air du dehors, pour reprendre le titre d’une composition de Jérôme Minière. Le garçon les libère, partant lui, sa frangine et les souliers dans un périple à travers le monde. Il semble heureux de profiter du vent, des rayons et de la chaleur du soleil, sans oublier les incontournables grains de sable qui passent entre ses doigts. Mais Élise, dont l’existence se doit d’être réglée comme une horloge, ne veut que s’en tenir aux règles strictes dictées par le Grand livre du Dehors, un bouquin aux dimensions imposantes qui prend pour elle des allures de bible. Leur excursion dure le temps de douze sabliers et le temps de découvrir combien grande est la vie.    

La plume enchanteresse de Suzanne Lebeau sait rendre avec une sensibilité rare et une candeur inimitable la dualité intrinsèque entre le confort parfois étouffant de la famille et les tentations de sortir de sa bulle pour confronter et apprivoiser les milieux lointains. Dans sa partition, les répliques se révèlent d’une superbe précision et d’une économie de mots redoutable dans leur pouvoir d’évocation des enjeux traités. Sans boursouflure, mièvrerie, et sans trace moralisante ou moralisatrice, elles esquissent un plaidoyer pour l’imaginaire, le courage d’affronter ses peurs. La production encourage l’expression d’une farouche liberté souvent brimée des gamins par des parents rigides asservis à des raisonnements obtus. La force de l’écriture de Suzanne Lebeau ne se situe pas qu’à un niveau cérébral: à la représentation de la Maison Théâtre, le public composé principalement d’élèves du primaire a fortement réagi, et ce, à plusieurs reprises. Lorsque les spectateurs se prennent aussi rapidement au jeu des différentes péripéties, on constate que l’effet recherché atteint son objectif. Lorsque par exemple, Élise compte le nombre de sabliers, toute la salle l’accompagne en chœur dans son énumération. La dramaturge inscrit ce texte créé en 2006 parmi ses plus fortes réalisations théâtrales comme Une lune entre deux maisons, Salvador et L’Ogrelet.      

La parole de l’auteure bénéficie d’une mise en scène simple et rigoureuse, mais riche en moments poétiques concoctés par son partenaire du Carrousel Gervais Gaudreault. La conception circulaire du plateau expose judicieusement le cocon douillet des protagonistes qui devra s’ouvrir aux opportunités imprévisibles et aux expériences formatrices de la vie. Les actions s’exécutent dans un rythme continu, mais en préservant à chaque fois les effets de surprise. Les trois interprètes, les excellents Marie-Michelle Garon, Joachim Tanguay et Martin Boileau, insufflent un dynamisme, une sensibilité et une candeur irréprochables, comme en témoigne la réception de leur auditoire à leurs paroles et gestes.

Excellente production pour clôturer la saison de la Maison Théâtre, Souliers de sable exprime encore avec une force évocatrice prodigieuse le désir émancipateur de deux protagonistes face aux obstacles, difficultés et refus autant de nous-mêmes que des autres. Vive, attachante et colorée, cette pièce nous rejoint par son propos universel et indémodable l’enfant frémissant au plus profond de soi. 

20-05-2013


par Magali Paquin (Québec, 2007)

Voilà des souliers qui ont beaucoup voyagé… Et c’est sur les planches des Gros Becs que s’ancre actuellement «Souliers de sable» de la compagnie Le Carrousel, une pièce pour tous ceux et celles qui rêvent de liberté pour mieux découvrir le monde.

Ce matin-là, Léo (Joachim Tanguay) ouvre l’œil avant Élise (Marie-Michèle Garon). De la grande cage près du lit de sa grande soeur, il libère leurs chaussures gardées sous clé (Martin Boileau). C’est qu’ils ont l’esprit d’aventure, ces satanés souliers! En moins de deux, les voilà qui s’échappent, partis pour un grand périple dans le monde extérieur, un Léo ravi sur les talons, lui-même poursuivi à contrecoeur par son aînée. Passé la porte de leur univers douillet, le regard des deux gamins s’ouvre sur un monde inconnu jusqu’alors. Émerveillé, l’un découvre la chaleur du soleil et le sable qui coule en liberté entre ses doigts. Anxieuse, l’autre s’accroche désespérément aux préceptes restrictifs du Grand livre du Dehors, et se fait gardienne des règles et des habitudes qui régissent son quotidien et celui de son frère.

L’attrait de l’aventure et de la découverte est ici confronté aux règles apprises et assimilées. Alors que les libertés de l’enfance sont de plus en plus limitées par les interdits et les normes des adultes, l’auteure Suzanne Lebeau incite les enfants à se réapproprier l’univers qui devrait être le leur, un aspect sur lequel insiste la mise en scène de Gervais Gaudreault. Car les protagonistes de cette histoire sont bel et bien enfermés, malgré leur jeunesse, dans la prison des règles intériorisées et des emplois du temps bien définis. Leur chambre circulaire à la paroi marquée par l’ombre de barreaux en est une métaphore on ne peut plus claire, comme le sont les pyjamas gris à rayures. Le sablier auquel s’accroche désespérément Élise, son désarroi devant l’horaire quotidien chamboulé et sa crainte viscérale de l’inconnu illustrent à quel point les enfants peuvent voir leurs dispositions à découvrir le monde annihilées trop précocement.

En contrepartie, le jeune Léo prend plaisir à s’évader dans un univers qui ne semble avoir aucune limite, à poser son regard candide sur les champs de fleurs, le sable, la rivière. Les changements de décor, bien que particulièrement bruyants, se font relativement en douceur par la rotation des parois. La circularité de l’espace scénique s’ouvre alors sur de larges horizons, tandis que des paysages et différentes textures sont projetés sur la cloison. Pendant que le sablier égrène le temps, l’enfant suit les traces du personnage muet, mais très expressif que sont les chaussures intrépides. Souliers aux mains et aux pieds, sourire aux lèvres, ce drôle de personnage gambade gaiement pour échapper à la vie rangée de ses propriétaires. Mimiques et musique l’animent, ce qui est bien suffisant pour affirmer sa rayonnante désinvolture.

« Souliers de sable » témoigne d’une quête de liberté par deux enfants conditionnés par la routine quotidienne et les interdits sans cesse répétés. Empreinte de douceur et de poésie, cette pièce a le mérite de rendre son propos clair et compréhensible au jeune public, sans pour autant enlever à son pouvoir évocateur.

23-10-2007