Lançant comme chaque jour sa ligne à l’eau, Ondin rêve. Les profondeurs de l’océan, et tout ce qui peut se cacher dedans, l’appellent. Or voilà qu’une proie s’accroche à son hameçon et l’entraîne. Commence pour Ondin, devenu poisson, un parcours initiatique au pays des poissons, des raies et des serpents de mer, au cours duquel il affrontera des dangers et sera confronté à la différence chez l’autre. Et si sa plus grande découverte était Mélusine, petit oiseau de mer qui, tel le brouillard, aime à se perdre sur l’horizon ?
Autour d’Ondin, portant Ondin, une mer miroite sous les éclairages bleutés. Soulignant avec fluidité les mouvements et les états d’âme de la petite marionnette, des sons étranges s’élèvent, produits sur scène par une musicienne jouant du tambour d’océan, du tamboa et d’autres instruments mystérieux et captivants. Œuvre contemplative, spectacle de peu de mots reposant sur la manipulation du son, de la lumière, des objets et de l’espace, Ondin enveloppe les jeunes spectateurs dans un univers profond, presque ouaté.
L’Illusion, Théâtre de marionnettes, est fondé en 1979, à Montréal, dans le désir d’offrir aux jeunes un théâtre de haute qualité qui met en valeur toute la richesse des arts de la marionnette. Pour chacune de ses créations, la compagnie explore et réinvente des formes et des techniques inusitées. Ombres, tiges, tringles, fils, tout est mis au service de l’animation de l’inanimé pour défendre un propos mettant en lumière une facette particulière de l’être humain. Chantefable (2011), Histoire à dormir debout (2004) et Tempête dans un verre de lait (2002) ont été vues à la Maison Théâtre. Ondin est la première création solo de Sabrina Baran, codirectrice artistique de L’Illusion.
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Scénographie et costumes : Josée Bergeron-Proulx
Marionnettes : Josée Bergeron-Proulx et Isabelle Chrétien
Lumières : Guy Simard
Univers sonore : Maryse Poulin
Crédit photos : Michel Pineault
Durée 30 minutes
À Québec, aux Gros Becs, les 17 et 18 mai 2014
Une création de L'Illusion Théâtre de marionnettes
Dates antérieures (entre autres)
Créé à l'Illusion Théâtre en mai 2012
du 27 mai au 9 juin 2013, Illusion Théâtre
par Daphné Bathalon
Après avoir été fort bien accueilli par le public et la critique à sa création en 2012, Ondin a fait un retour éclair au petit théâtre de la rue de Bienville pour conclure la saison 2012-2013, juste avant le déménagement de la compagnie, qui prendra ses nouveaux quartiers au début de l’été au coin St-Denis et Beaubien dans Rosemont–Petite-Patrie.
Avec le souci du détail qu’on lui connaît, L’Illusion théâtre de marionnettes parvient à créer un univers marin fantastique dans sa salle intime. Pour pratiquer cette petite magie, la conceptrice et idéatrice d’Ondin, Sabrina Baran, a recours à quelques ingrédients dont L’Illusion a le secret : des marionnettes au charme irrésistible (les yeux toujours surpris d’Ondin, son joli tricot de marin, et que dire de la tignasse qui coiffe l’intrigante Mélusine!), une belle musique qui transporte littéralement la mer dans la salle et, bien sûr, une histoire qui fait rêver. Ondin a vraiment tout pour séduire… aussi sûrement que le chant des sirènes.
Qui n’a jamais rêvé, à l’instar du jeune Ondin, de voir ce qui se cache sous la surface de la mer, sous ce miroir scintillant et impénétrable? D’abord enfant-pêcheur, Ondin se transforme en enfant-poisson sitôt qu’il plonge sous la vague à la découverte du monde sous-marin. À sa suite, nous nous immergeons dans les profondeurs de l’océan pour y observer, fascinés, les différentes créatures qui y habitent. Que la mer soit calme ou houleuse, emportée ou joueuse, elle nous berce magnifiquement pendant ce court spectacle conçu pour les tout-petits de 3 à 6 ans.
Tandis que le souffle de la mer nous emporte, la vague enveloppe tout doucement l’enfant-pêcheur; elle le transforme en triton, afin qu’il puisse danser à son tour avec les poissons et parcourir la mer à toute vitesse. L’ambiance aquatique est parfaitement réussie : bien appuyée d’un côté par les subtils éclairages de Guy Simard, qui jouent avec la transparence de l’eau et ses reflets, et de l’autre par la musique apaisante réalisée en direct par Maryse Poulin. L’apparition de chaque créature est marquée par un son en particulier, et la musique de chacun de ces instruments s’insère en douceur dans la bande sonore du spectacle.
Le joli dispositif scénique signé Josée Bergeron-Proulx rappelle le mécanisme simple des marionnettes à fils. Quelques ficelles font naître les vagues et soulèvent la toile bleue pour offrir aux jeunes spectateurs le plaisir de s’immerger à leur tour. Si simple d’apparence soit-il (presque magique aux yeux des enfants), ce décor permet de faire vivre la mer et la quête d’Ondin. Conçu à partir de bois de marée et d’autres éléments marins, il emprunte à l’océan un petit bout de plage pour mieux transporter sur scène une parcelle de cet univers, nous invitant à voyager « jusque-là où le ciel et la mer se rejoignent ». Ondin est un tableau dans lequel on s’absorbe complètement pendant la petite demi-heure que dure le spectacle et une magnifique fable sur la découverte et l’apprivoisement de l’autre.
par David Lefebvre
L’Illusion Théâtre termine sa saison 2011-2012 d’une douce et très jolie façon. La petite salle accueille Ondin, la première création de Sabrina Baran, jeune femme touche-à-tout et membre de la famille de l’Illusion depuis 2006. Plusieurs gamins curieux auront pu voir cette pièce lors de la plus récente édition des Petits bonheurs, le 4 mai à Montréal et le 13 mai à Longueuil.
Ondin, petit pêcheur, est fasciné par la mer. Il s’interroge sur ce qui se trouve tout au bout, et se questionne sur le monde qu’elle abrite. Un jour, il y tombe, tentant de retenir sa canne à pêche. L’océan le transforme en triton ; il portera ainsi très bien son nom, issu des contes nordiques – l’ondin est un génie des eaux. Pieds palmés, lunettes devant les yeux, cheveux roux dans un casque de bain, le petit homme est prêt à découvrir les mille merveilles de la mer. Il s’amuse avec un poisson, une méduse le tire vers la surface et il chevauche une murène. Tout au bout, il y a Mélusine, petite solitaire au prénom évoquant la fée du même nom des histoires médiévales. Ondin et Mélusine s’apprivoiseront, et vogueront ensemble vers d’autres rivages.
Sabrina Baran offre un premier spectacle presque sans paroles, laissant une place magistrale à la musique et aux images. L’environnement sonore de Maryse Poulin, en direct grâce à des instruments à cordes (violons joués avec les doigts), à vent (flûte traversière) et de percussions (dont un petit sansa, instrument à pouce), et à une bande préenregistrée, est simplement magnifique. Sans diriger l’émotion, elle nous entraîne ; on se laisse bercer au gré de la mélodie, et l'on s’accroche lors des moments plus mouvementés. Les marionnettes de Josée Bergeron-Proulx et Isabelle Chrétien sont craquantes : juste assez grandes, on peut les admirer à notre guise. Celle d’Ondin devient particulièrement intéressante lorsqu’il nage librement sous la surface de la mer, grâce à des mouvements fluides et rapides. La scénographie (Josée Bergeron-Proulx) bouge constamment : une grande voile, prenant la plus grande part de la scène et manipulée par plusieurs fils, donne l’illusion d’une petite mer aux vagues sages ou houleuses. Lorsqu’on la soulève, on accède au monde sous-marin, aux algues et aux poissons. Les éclairages de Guy Simard, aux teintes de bleu et de vert, viennent parfaire l’illusion, même s’il manque parfois de lumière pour apprécier à sa juste valeur le travail des manipulatrices, Sabrina Baran et Gabrielle Garant. Par contre, une scène est particulièrement réussie, celle du combat entre Ondin et le serpent de mer aux yeux lumineux : translucide, la voile permet ainsi d'y voir au travers cette dangereuse danse.
De l’aveu même de la conceptrice, Ondin a été inspiré par trois thèmes précis. La mythologie, d’abord, qui se retrouve dans les noms, dans l’atmosphère de la pièce et dans la construction du récit. Puis, l’univers marin, un endroit qui fascinera toujours petits et grands. Finalement, le rapport à l’autre : Ondin est une fable sur le contact, l’acceptation, l’apprivoisement. Accepter la différence de l’autre pour développer des amitiés, des relations. Si ce thème est le moins flagrant lors du spectacle, il en est pourtant le plus important. Le manque de parole de la part des deux personnages de l’histoire, muets, explique peut-être ce fait, le récit n’ayant droit qu’à quelques lignes de narration. Les plus petits accrocheraient peut-être davantage, surtout vers la fin, si quelques mots entre Ondin et Mélusine se faisaient entendre.
Onirique, ludique, d’une grande douceur, Ondin est une pièce évocatrice, qui fait rêver, qui fait rire, et qui se regarde avec plaisir. Le spectacle ne stagnera certainement pas au fond des eaux et saura trouver son courant-jet pour atteindre sa pleine maturité, et ce, rapidement.