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12 à 17 ans

25 octobre 2019, 19h, 27 octobre et 2, 3 novembre 2019, 15h
Dates scolaires : du 25 octobre au 1er novembre 2019

Un père immigrant ayant tout quitté pour offrir une vie meilleure à son fils reproche à celui-ci de ne pas s’intéresser à ses racines. Les « dans mon pays » de l’un se butent aux haussements d’épaules et aux soupirs de l’autre. Mais le vent tourne lorsque le jeune garçon, avide de vérité, questionne son père sur des pans secrets de ses origines familiales. Tiraillés entre deux continents, entre hier et aujourd’hui, trouveront-ils un terrain commun ?

POUPÉES RUSSES
Une histoire en cache souvent une autre. Dans ce face-à-face générationnel et culturel, le récit familial s’immisce dans la grande histoire du XXe siècle, tout comme dans la célèbre pièce de Tchekhov La Cerisaie, dont s’emparent les personnages. À l’aide d’objets au pouvoir d’évocation surprenant et de magnifiques jeux d’ombres, un petit théâtre spontané prend forme, nous transportant vers les lointaines étendues de la Russie, en quête de réponses.

LE THÉÂTRE DES ORIGINES
Comment se construit-on une identité lorsqu’on est à cheval entre deux cultures, dont l’une ne nous est connue qu’à travers les souvenirs, les échos, mais aussi les silences de nos parents ? Notre histoire est-elle fiction ou réalité ? Pétri d’humanité, le récit touchant de cette famille invite à tendre l’oreille et la main à l’autre afin de trouver les mots qui réduiront la distance et de saisir, ensemble, le présent.

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Texte et mise en scène Marie-Christine Lê-Huu
Interprétation Alexandre Nachi et Sasha Samar
Pianiste sur scène Guillaume Martineau

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Thème universaliste souvent exploité dans le répertoire québécois, la quête des origines imprègne l’atmosphère et la trame narrative de Fils de quoi ?, la plus récente et dernière création du Théâtre de l’Avant-Pays (fermé depuis, l’organisme Autels particulier a pris le relais pour la diffusion du spectacle). Signée et orchestrée par Marie-Christine Lê-Huu, la pièce destinée au public adolescent, présentée ces jours-ci à la Maison Théâtre, traite de cette quête initiatique. Dans un traitement sobre, sage en comparaison aux autres créations de la femme de théâtre, l’œuvre scénique réussit néanmoins à toucher et rejoindre son auditoire.

Pendant un peu plus d’une heure, l’histoire se concentre sur la relation tendue, mais où se dégage une certaine affection, entre un père (Sasha Samar), comédien originaire des pays de l’Est exilé au Québec et son fils (Alexandre Nachi), né ici. Peu intéressé à la technologie moderne, le premier idéalise les traditions et sa terre natale (il prononce à quelques reprises des phrases en russe), tandis que son fiston, adepte des téléphones intelligents, cherche des informations sur ses ancêtres pour mieux comprendre son récit personnel. Nous apprenons entretemps que sa mère les a quittés précédemment sans aucune explication. Cette réalité contemporaine donne envie au fils de s’intéresser activement à son arrière-grand-mère paternelle qui a abandonné son époux et sa progéniture mystérieusement...

Pour mieux communiquer avec son garçon, le père a recours à l’un des « chefs d’œuvre » du sixième art : La Cerisaie d’Anton Tchekhov. Son intrigue, autour d’une riche famille sur le point de se départir de sa demeure, permet de mettre en parallèle les filiations intimes et sociales vécues autant par le tandem père-fils que par les figures bourgeoises du dramaturge russe. Si le procédé de la mise en abîme (ou du théâtre dans le théâtre) demeure souvent employé de manière peu concluante, le talent de l’autrice lui permet de jongler astucieusement avec les références d’un classique de la littérature sans s’y complaire.

La proposition théâtrale compte sur deux interprètes doués dont la complicité et le plaisir de jouer ne manquent pas d’entrain.

Sur le plateau derrière son instrument, le musicien Guillaume Martineau accompagne les deux acteurs. Sous ses doigts, l’enrobage sonore donne du relief aux situations parfois loufoques, parfois tristes. Par son traitement visuel, la production a recours au théâtre d’objets. Nous voyons notamment des poupées russes, lors des aventures tchékhoviennes, que manipule Sacha Samar avec drôlerie. Le fiston se sert entre autres des ombres chinoises pour révéler les secrets longtemps tus autour de son aïeule qui a affronté bien des préjugés à son époque.            

En qualifiant l'approche humaniste de Marie-Christine Lê-Huu dans le livre collectif Femmes en scène (Pleine Lune 2018), Véronique Bossé disait d’elle que « c’est quand on s’intéresse réellement à l’autre que la rencontre existe ». Cette volonté de rencontre pour tisser des liens respectueux se répercutait déjà dans ses partitions comme Jouliks (sur une fillette résiliente de sept ans, le film sortira d’ailleurs sous peu) ou Je cherche une maison qui vous ressemble (autour du couple emblématique Pauline Julien et Gérald Godin). Fils de quoi ? ne craint pas, elle non plus, de sonder les souvenirs, les mensonges et la mémoire pour faire émerger la vérité parfois déplaisante. Si trois présences physiques masculines occupent l’espace, le désir perceptible de la dramaturge pour les femmes inspirantes et courageuses se répercute dans le portrait et la description des péripéties vécues par la grand-mère. Son destin difficile se veut à l’image de ces pionnières dont le rôle reste encore ignoré à notre ère. Le spectacle offre alors ses moments les plus forts et les plus bouleversants.   

Pour avoir vu et apprécié le travail de Lê-Huu à diverses reprises, la présente exécution scénique reste trop timide en raison des potentialités du sujet. Rien pour briser le plaisir, mais les talents combinés des collaboratrices et collaborateurs auraient dû provoquer encore plus d’étincelles, surtout avec des thèmes comme la transmission et les confrontations culturelles entre les générations. Fils de quoi ? ne possède pas autant d’imagination débordante ou de folie contagieuse que Ma mère est un poisson rouge (sous la plume et la gouverne de Lê-Huu, en plus de Samar parmi la distribution) ou encore de fébrilité sociopolitique engageante comme dans Je cherche une maison qui vous ressemble. Malgré ces réserves, la magnifique scène finale crée un impact où se conjuguent tendresse et poésie.  

La proposition théâtrale compte sur deux interprètes doués dont la complicité et le plaisir de jouer ne manquent pas d’entrain. Alexandre Nachi rend de manière crédible la rébellion et la curiosité de cet adolescent qui n’accepte pas le défaitisme de son père. Sous les traits de celui-ci, Sacha Samar se démarque une fois de plus par sa composition sensible et nuancée qui laisse percevoir la fragilité de cet homme traqué par un quotidien peu emballant.

Les spectatrices et spectateurs ont chaleureusement applaudi ce Fils de quoi ?, porté par des réflexions émouvantes et l’intemporalité fébrile de son univers.

29-10-2019

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