Du 13 avril au 8 mai 2010
Retour à l'accueil Imprimer cette page Archives Accueil Facebook del.icio.us

Sonate d'automne

De Ingmar Bergman
Traduction du manuscrit de Bergman C.G. Bjurström et Lucie Albertini
Mise en scène Marcel Pomerlo
Avec Andrée Lachapelle, Marie-France Marcotte, Chantal Dumoulin et Gabriel Arcand

Après sept ans sans l’avoir vue, Eva retrouve sa mère Charlotte, pianiste de concert de renommée internationale. Eva vit en Norvège dans un presbytère isolé auprès de son mari et de sa soeur handicapée. Cette visite, qui se voulait tranquille et chaleureuse, voit immédiatement renaître les tensions enfouies. Les deux femmes s’affrontent durant une longue nuit d’insomnie à l’issue de laquelle Charlotte s’en va, prétextant un concert et fuyant ainsi ses filles et une partie d’elle-même.

Bergman a d’abord écrit et réalisé cette oeuvre pour le cinéma. Tous les thèmes chers à l’artiste s’y retrouvent : l’abandon, les liens filiaux, la foi, le pardon, la souffrance. Le texte déployé comme une partition musicale découvre l’ampleur des ressentiments et des blessures qui habitent les personnages
du huis clos.

Assistance à la mise en scène Martin Boisjoly
Scénographie Véronique Bertrand
Lumières Lucie Bazzo
Costumes Linda Brunelle
Musique originale Érik Shoup

La production sera présentée au Théâtre français du Centre national des Arts d’Ottawa du 26 au 29 mai 2010.

Bergman à la Cinémathèque québécoise.
La Cinémathèque québécoise, en collaboration avec Le Groupe de la Veillée, présentera le film Sonate d’automne, dimanche le 18 avril, ainsi que Scènes de la vie conjugale, les 16, 23 et 30 avril.

Réservez vos billets promotionnels pour Sonate d'automne sur atuvu.ca Atuvu.ca

Une création du Groupe de La Veillée

Prospero
1371, rue Ontario est
Billetterie : (514) 526-6582

par Olivier Dumas

Difficile d’adapter à la scène les grands classiques du septième art. Maître du cinéma et réputé metteur en scène, Ingmar Bergman a marqué l’esprit des cinéphiles par ses scénarios qui dissèquent avec une précision rare les déchirures humaines, en plus de posséder une virtuosité impressionnante de la caméra. Au Prospero, la production Sonate d’automne qu’a réalisée le Groupe de la Veillée constitue une touchante adaptation qui ne parvient toutefois pas à faire oublier le magnifique et dur film original.

Réalisé en 1978, Sonate d’automne se situe parmi les réussites du cinéaste suédois même si l’œuvre demeure tout de même moins connu que les classiques Cris et chuchotements, ou Scènes de la vie conjugale. Le long métrage était remarquable dans la manière dont la caméra scrutait les deux visages féminins jusqu’à l’insupportable affrontement dans un dépouillement palpable, en plus de bénéficier de la présence de deux actrices extraordinaires et d’une palette de couleur magnifique, représentative de l’automne (jaune, ocre, marron).

Dans un douillet et aseptisé presbytère de campagne, Eva (Marie-France Marcotte) écrit une lettre pour inviter sa mère Charlotte (Andrée Lachapelle), une pianiste professionnelle renommée, chez elle. Les deux femmes ne se sont pas vues depuis sept ans. Victor, pasteur et mari d’Eva (Gabriel Arcand), s’adresse au public pour commenter l’action qui laisse présager une imminente tragédie. Après les témoignages d’affection et de retrouvailles de convenance, la tension monte lentement, toujours en sourdine. Le conflit porte d’abord sur la présence d’Hélène (Chantale Dumoulin), la sœur infirme que Charlotte ne pensait pas retrouver. Par la suite, Eva tente de défier sa mère, en jouant, malheureusement mal, un prélude de Chopin, ce qui permettra à Charlotte de démontrer sa supériorité sur sa progéniture. Les accablements, les aveux et les larmes s’ensuivent, entraînant le départ précipité de Charlotte.


Crédit photo : Le Groupe de La Veillée

Le principal défi du metteur en scène Marcel Pomerlo était de se distancer du travail de Bergman pour tenter de transcender le sentiment de nostalgie souvent ressenti devant les œuvres du cinéaste tant aimé. Il a su, heureusement, transposer cet univers au théâtre sans trop faire regretter le film. Sur scène, la rage et la cruauté prennent un ton plus nuancé dans une progression plus lente, trop parfois, qui peut confiner à l’ennui par moment.

Dans cette tragédie, les comédiens se révèlent pour la plupart justes et émouvants. Andrée Lachapelle dévoile avec sa prestance habituelle toute la déchirure, la rage ravalée d’une femme qui a sacrifié le bonheur de sa famille pour les apparences de bonheurs illusoires. Or, la prestation de Marie-France Marcotte, qui incarne sa fille, ne se révèle toujours de la même intensité. Quelques problèmes de projections de voix le soir de la première nous faisaient perdre certains moments du drame, diminuant la tension qu’on aurait aimée plus marquante. Le duel n’atteint pas toujours ainsi l’effet cathartique espéré. Chantale Dumoulin se glisse à la perfection dans la peau de la sœur déficiente avec une justesse incroyable, sans jamais tomber dans le pathétisme ou la caricature. Plus en retrait, le Victor de Gabriel Arcand sait imposer le silence et le mutisme dont souffre le couple.

Plus qu’un décor, la scénographie de Véronique Bertrand illustre parfaitement l’atmosphère lourde par les non-dits, les espoirs déçus et les trahisons de ce milieu bourgeois lourd de secrets.

Magnifique texte sur la difficulté du pardon et de la réconciliation, Sonate d’automne s’écoute et se regarde avec admiration et émotion, en plus de renouer avec l’univers de Bergman.

17-04-2010

Retour à l'accueil