An 1 du Cycle italien. Bar, une œuvre grinçante et émouvante, raconte quatre jours de la vie de deux hommes dépassés par les événements. L’un rêve de faire des cocktails dans des bars prestigieux, l’autre, au chômage, fricote avec la petite mafia. Perdus au fond d’un bar miteux, ils tentent de trouver un moyen de se sortir du marasme.
Spiro Scimone, dramaturge de premier plan parmi la nouvelle génération d’auteurs italiens, fut récompensé par plusieurs prix. Acclamé partout où il est joué, son deuxième texte Bar lui a valu en 1997, lors de la cérémonie annuelle de remise des distinctions théâtrales en Italie, le prix UBU du meilleur nouvel auteur
Assistance à la mise en scène Claire L’Heureux
Scénographie Olivier Landreville
Costumes Francesca Chamberland
Musique Catherine Gadouas
Du mardi au samedi à 20 h, le mercredi à 19 h
ainsi que le lundi 10 janvier à 20 h
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ATTENTION : LA DATE PRÉVUE DU RENDEZ-VOUS A ÉTÉ MODIFIÉE. Le jeudi 20 janvier, le Théâtre de l’Opsis, en collaboration avec Le Groupe de la Veillée, vous convie à une rencontre après le spectacle où les artisans de Bar se joindront au Dr Dario Brancato, professeur à la Faculté d’Arts et Sciences de l’Université Concordia et spécialiste en culture et littérature italienne, pour approfondir les thématiques de la pièce et discuter avec le public. Un rendez-vous incontournable !
Une production du Théâtre de l’Opsis
Prospero
1371, rue Ontario est
Billetterie : (514) 526-6582
par Olivier Dumas
L’automne dernier, le Théâtre de l’Opsis amorçait son cycle italien avec une brillante reprise d’Il Campiello de Carlo Goldoni. Pour la suite cet hiver, Luce Pelletier a privilégié un texte contemporain, intitulé Bar, d’un auteur peu connu sinon inconnu du public québécois, Spiro Scimone. Courte partition exigeante pour deux acteurs, la pièce écrite au milieu des années 1990 atteint parfaitement sa cible grâce à deux comédiens particulièrement allumés.
Si l’œuvre de Goldoni puisait allègrement dans les canevas de la commedia dell’arte, celle de Scimone évoque clairement un univers d’absurdité comique qui rappelle l’inoubliable En attendant Godot de Samuel Beckett. Par son atmosphère d’étrangeté, certains critiques de l’Europe francophone ont même établi des parallèles avec Harold Pinter.
À la fois grinçant, loufoque et émouvant, le récit de Bar se déroule sur une période de quatre jours qui s’annoncent sans histoire palpitante. Il se penche sur les destins de Nino (Pierre-François Legendre) et de Petru (Marc Beaupré), deux hommes cachés dans un bar peu fréquenté. Figures de peu d’envergure, ils se retrouvent rapidement dépassés par les événements. L’un, dominé par une mère castratrice, rêve de concocter des cocktails et apéritifs dans des bars prestigieux qui diffusent de la musique américaine. L’autre, au chômage, fricote avec la petite mafia et perd beaucoup aux cartes. Avec leurs visages pâles, presque blancs, et leurs deux points rouges sur les joues, ces clowns blancs, mélancoliques, tentent de trouver un moyen de se sortir de leur médiocrité en tuant le temps en bavardage inutile. Pourtant, drame il y a, car un meurtre a été commis par l’un des deux protagonistes dont le spectateur n’en connaîtra jamais clairement l’auteur.
L’une des plus belles réussites du spectacle demeure la mise en scène d’une extrême précision de Luce Pelletier. De production en production, cette dernière démontre une capacité à extirper le meilleur de chacun de ses interprètes. Ici, Pierre-François Legendre et Marc Beaupré offrent des prestations autant énergiques que nuancées, et cela sur un minuscule plateau. Par ailleurs, les saisissants contrastes physiques entre les deux acteurs (l’un trapu et grand, l’autre petit et filiforme) ne sont pas sans rappeler certains tandems comiques du septième art, notamment Abbott et Costello. Le passage où Nino raconte avec une naïveté déconcertante certains aspects de sa relation particulière avec sa mère devant un Petru incrédule relève du grand art.
La seule petite réserve se situe au niveau du texte de Spiro Scimone que l’on pourrait qualifier de mineur. Bien qu’efficace et très drôle par moment, l’écriture du dramaturge rappelle trop d’autres œuvres connues (dont le Godot de Beckett) pour véritablement se démarquer. Il lui manque cette petite étincelle pour s’harmoniser à la perfection avec la virtuosité des concepteurs, tous très talentueux.
Sur le plan scénographique, le décor conçu par Olivier Landreville est très ingénieux. L’exigüité du lieu, un bar avec table et chaises qui laissent peu d’espace de jeu pour les acteurs, témoigne merveilleusement bien de l’état d’esprit de ces deux clowns pathétiques et attachants. Legendre et Beaupré y dévoilent une aisance physique particulièrement remarquable. Mentionnons également la trame sonore de Catherine Gadouas qui apporte ponctuellement une dimension sensible à cette histoire baignant autant dans l’absurde ou le fantasme que dans la quotidienneté la plus banale.
Bar, la nouvelle production du Théâtre de l’Opsis ne dure que 55 minutes. L’action se déroule rapidement, sans temps mort, grâce à des artistes inspirés et inspirants. Tout cela laisse augurer d’autres découvertes prometteuses pour l’an 2 du cycle italien.