Dans un hôtel en bord de mer, un homme vit une relation tarifée avec une femme qui l’y rejoint chaque nuit durant plusieurs semaines. Elle n’est pas une prostituée mais accepte toutes les demandes de l’homme qui cherche à découvrir le continent féminin à travers ce corps consentant, et à comprendre son incapacité d’aimer qui génère en lui une mort de sentiments. Il voudrait enfin ressentir et donner de l’amour, mais il n’y parvient pas. Chaque moment d’intimité l’isole, le confronte au doute, questionne le sens de sa propre existence. Cette absence d’un désir porté par l’amour le rapproche lentement de la mort.
En proposant des acteurs d’âge mûr pour incarner ce texte, la metteure en scène Martine Beaulne a voulu explorer comment l’inassouvissement de leurs actes sexuels à travers une jouissance qui échoue à faire surgir l’amour a crée un lien obsessionnel. À l’aube d’une mort physique éventuelle, à travers ce retour sur les lieux de l’offrande et du désir, la rythmique de l’écrit évoque les mouvements de la mer comme le liquide de la passion amoureuse au moult va-et-vient.
Texte Marguerite Duras
Mise en scène Martine Beaulne
Avec Sylvie Drapeau et Paul Savoie
Crédits supplémentaires et autres informations
Assistance à la mise en scène Valery Drapeau, stagiaire Alexandra Ghezzi
Scénographie Richard Lacroix
Musique Vincent Beaulne
Lumières Guy Simard
Costumes Mérédith Caron
Collaboration au mouvement Mélanie Demers
Maquillage et costumes Angelo Barsetti
Durée -
TARIFS
Scène principale - régulier 37$, 65 ans et + 31$, 30 ans et - / professionnels 29$*, Carte Prospero 28$**
Scène intime - régulier 30$, 65 ans et + 28$, 30 ans et - / professionnels 26$*, Carte Prospero 26$**
Les prix incluent les taxes, commande en ligne ou par téléphone : frais de service de 3$ par billet
* (UDA, UNEQ, CEAD, SACM, SCAM, AQAD, AQM, ATEQ)
** limite de 2 billets par spectacle, par carte Prospero
Tarifs sujet à changement sans préavis
Coproduction Le Groupe de La Veillée et le Collectif d'artistes Les Immortels
Au Prospero, Martine Beaulne s’attaque à mettre en scène La maladie de la mort, de Marguerite Duras, objet étrange à la fois romanesque et théâtral. La pièce se déroule dans le huis clos d’une chambre où un homme et une femme se rencontrent le temps de quelques nuits. L’homme paye la femme pour qu’elle reste là, étendue sur le lit, afin de lui permettre de comprendre son incapacité d’éprouver du désir envers le corps féminin.
La pièce adopte une structure particulière qui fait du texte un matériau avec lequel les metteurs en scène peuvent travailler de multiples façons : les répliques ne sont pas distribuées entre les personnages, les dialogues témoignent d’une action mentale plutôt que d’un véritable récit narratif et les didascalies sont davantage psychologiques que scéniques. Martine Beaulne avait d’ailleurs songé à en faire un spectacle solo avant que la comédienne Fanny Ardant vienne performer ce texte au Festival international de littérature en 2006. À l’image du texte de Duras, la scénographie de Richard Lacroix est froide : un lit recouvert d’un drap blanc, une structure de métal austère et des panneaux translucides qui laissent deviner les silhouettes des comédiens, ou encore la pluie qui tombe au-dehors. Selon les éclairages de Guy Simard, le mur du fond prend la forme d’une paroi rocheuse, d’un réseau de cours d’eau sinueux ou d’un vulgaire mur de stucco.
L’acte sexuel est évoqué par la metteure en scène sans jamais que les comédiens aient à le figurer réellement.
Sylvie Drapeau et Paul Savoie forment le duo parfait pour incarner la parole de Duras. Elle se révèle sensuelle et puissante, lui apparaît imperturbable. Bien qu’écrite en 1982, La maladie de la mort offre une représentation de la femme résolument moderne, alors que son plaisir et sa jouissance sont mis de l’avant « malgré » l’absence de plaisir masculin. La femme devient le catalyseur qui fait en sorte de révéler à l’homme la « maladie » dont il souffre, et que bien des lecteurs ont associé à l’homosexualité : « Vous découvrez que c’est là, en elle, que se fomente la maladie de la mort, que c’est cette forme devant vous déployée qui décrète la maladie de la mort. » Ainsi, l’abandon des corps au cœur de la pièce concorde avec une absence de désir et un amour impossible.
La mise en scène de Martine Beaulne correspond parfaitement aux souhaits de Duras accompagnant la publication de la pièce aux éditions de Minuit. L’acte sexuel est évoqué par la metteure en scène sans jamais que les comédiens aient à le figurer réellement. Les silences, les répétitions et les reformulations du texte prennent des allures incantatoires, alors que la sonorité planante de la flûte alto, qui domine la conception musicale de Vincent Beaulne, participe à la transe dans laquelle est plongé le public. La sobriété et le statisme qu’impose La maladie de la mort sont assumés pleinement par l’équipe de création, même si cela s’accompagne d’un hermétisme parfois rebutant pour le public. Bien que la pièce s’adresse à des spectateurs avertis, elle consiste en un objet esthétique qui peut provoquer une véritable transformation chez certains d’entre eux. En ce sens, saluons l’audace du Prospero qui fait une place dans sa programmation à un théâtre plus intellectuel et exigeant.