Il est metteur en scène, elle est actrice. Ils se retrouvent sur un plateau, à un moment inéluctable de leur relation. Là, Stan et Audrey se taillent, se parent et s’estoquent, dans un combat lexical où il ne peut y avoir de vainqueur.
Cette guerre d’usure inquiétante, empruntant la voie des grandes tragédies antiques, se révèle une réflexion des plus moderne et contemporaine sur la relation avec l'Autre.
Dans une langue syncopée et chirurgicale, l’auteur français Pascal Rambert nous tient en équilibre sur ce mince fil tendu au-dessus de la topographie amoureuse, ce terreau dramaturgique fertile, tout en montagnes vertigineuses et en sombres vallées. Il y revisite l’idée de la rupture avec un regard singulier, un style abrupt et déroutant, dans un exercice de haute voltige pour deux acteurs d'exception.
Assistance à la mise en scène et régie Roxanne
Henry
Décor et costumes Marc Senécal
Éclairages Francis Hamel
Conception sonore Michel F. Côté
Maquillages Florence Cornet
Une production du Théâtre de Quat'Sous
par Sara Fauteux
Dans Clôture de l’amour, Stan et Audrey se séparent. En fait, Stan laisse Audrey. Pendant une heure. Puis, pendant une autre heure, Audrey réagit. Il n’y aura pas de dialogue, aucune interaction, à tout le moins aucune interaction verbale. Sur la scène pratiquement vide, il n’y a que deux comédiens et deux monologues.
La mise en scène de Christina Vézina est aussi minimale que le décor de Marc Senécal, laissant toute la place au texte. Pour les comédiens Christian Bégin et Maude Guérin, monologuer pendant une heure, puis recevoir une immense charge durant le même laps de temps sans une seule chance de répliquer constitue un défi d’interprétation peu commun. Défi que tous deux relèvent avec succès. La performance de Maude Guérin est particulièrement remarquable, celle-ci déployant une fougue et une intensité saisissante.
Le texte de Pascal Rambert est habilement adapté pour le public québécois. Le ton est soutenu, mais l’on rencontre quelques expressions plus familières et même quelques sacres bien sentis. Les ex-amoureux se livrent à une guerre de vocabulaire jouissive, un combat lexical riche et percutant. La langue est redoutable de précision et, dans la bouche de ses personnages, les mots deviennent de véritables grenades prêtes à exploser. Pour ces deux créateurs (Stan est metteur en scène et Audrey, comédienne), les mots prennent une importance capitale. Rambert métaphorise d’ailleurs très bien les liens qui existent entre l’amour et la création.
Malgré l’adresse de l’auteur, Clôture de l’amour reste une pièce d’un convenu désolant. Bourré de clichés, le texte de Rambert reconduit des stéréotypes déplorables sur les femmes et le couple en général. La forme particulière de la partition textuelle ne parvient pas à faire apparaître une réelle théâtralité sur scène. Le spectateur a ainsi l’impression d’assister à une très longue scène d’un très bon téléroman.
Est-ce bien là ce qu’il faut souhaiter lorsqu’on va au théâtre? Et en quoi est-ce qu’une telle production s’inscrit dans le mandat d’un théâtre comme le Quat’Sous ? Il n’y a, dans cette pièce, aucune forme d’originalité ou de recherche théâtrale. Le discours sur l’amour est, certes, livré dans une langue pleine de qualités, mais cela n’atténue en rien (ou si peu) sa banalité, impardonnable même quand on aborde ce sujet si universel.