À travers ce qu'elle laisse en offrande à ses parents et amis, Vickie nous plonge dans son univers déjanté, où sa réaction face à sa mort imminente est multiple, explosive, authentique. Cette autofiction tout en saillie révèle un fort désir de vivre, de laisser se déchaîner les folles pulsions de l’existence, celles des derniers instants, où tout est encore possible.
Cette œuvre est adaptée du roman coup de poing Testament, écrit dans l'urgence par Vickie Gendreau, après qu’on lui eut annoncé qu'elle souffrait d'un cancer incurable.
Ce faux vrai testament fragmenté et brutal dévoile une grande sensibilité et une poésie à couper le souffle, sur toile de fond musicale, dans laquelle le pole dancing côtoie étrangement le pavillon des soins palliatifs.
Assistance à la mise en scène Audrey Lamontagne
Scénographie Pierre-Étienne Locas
Costumes Linda Brunelle
Lumière Martin Sirois
Conception sonore et régie Olivier Gaudet-Savard
Conception sonore et musique originale Vincent Letellier
Vidéo Jérémie Battaglia
Maquillages et coiffures Angelo Barsetti
lundi 10 mars 20h, mardi-mercredi-jeudi 20h, vendredi 19h, samedi 16h et dim. 23 et 30 mars 15h
Une production du Théâtre de Quat’Sous
par Pascale St-Onge
Du trash avec des paillettes
Nous avons tous, d’une manière ou d’une autre, entendu parler de l’histoire de Vickie Gendreau, cette jeune auteure atteinte d’une tumeur au cerveau, décédée au printemps dernier. Moins d’un an s’est écoulé entre le diagnostic et son décès. Entre-temps, elle a écrit deux romans : Drama Queens, à paraître sous peu chez le Quartanier, mais surtout, le roman coup de poing Testament, adapté et mis en scène ces jours-ci au Quat’Sous par Éric Jean.
Vickie Gendreau désirait écrire pour le théâtre, mais le temps lui aura manqué. Cette adaptation témoigne de ce manque de temps, sous la forme d’une urgence de vivre. Malgré l’autofiction du roman, ce théâtre n’est aucunement documentaire ; il est à la fois un vibrant hommage à la jeune femme et à ses mots.
Testament se veut une série de cadeaux laissée aux membres de l’entourage de cette jeune femme qui sait qu’elle mourra sous peu : des mots, des fennecs et quelques objets à la signification particulière. Elle revit, à travers ce qu’elle imagine de chacun d’eux après sa mort, quelques-uns des moments les plus importants de sa trop courte existence. Certaines personnes ont prétendu qu’Éric Jean avait fait une adaptation prudente. Il serait, je crois, plus juste de dire que le metteur en scène a d’abord et avant tout voulu faire vivre les mots de Vickie Gendreau sur scène ; ce qu’il fait d'ailleurs brillamment. L’adaptation prend davantage la forme d’un grand happening déjanté que celle d’une pièce de théâtre et c’est très bien ainsi : ce qu’elle a écrit n’est aucunement dénaturé et sa poésie demeure le point de départ ainsi que le centre du spectacle. Au travers de celui-ci : numéros chantés, pole-dancing, tutus, paillettes, musique électro, bref une jeunesse qui veut vivre à tout prix, éclatante et charismatique.
Les acteurs s’approprient si bien les personnages qu’on croit presque qu’ils les ont personnellement connus. Jade-Mariuka Robitaille, cette jeune diplômée de l’École Nationale de Théâtre, livre une très belle performance dans le premier rôle de Testament, sans jouer littéralement Vickie Gendreau pour autant. L’ensemble de la distribution porte le portrait entier d’une génération, tout ce qu’il y a de beau, mais aussi tout ce qu’il y a de laid en elle. On évite de s’attarder à ce qu’il y avait de scandaleux ou atypique dans la vie de Vickie, sans pourtant s’empêcher de parler d’alcool, de sexe, de viol ou de suicide. Ce qui demeure dans ce spectacle est le côté universel, qui dépasse l’auteure et son histoire personnelle. Éric Jean réussit à en faire une histoire dont tout le monde aurait pu faire partie.
Difficile de ne pas verser une larme devant cette lettre d’amour face à la vie. Les milieux littéraire et théâtral ne sont pas près d’oublier le passage fulgurant de Vickie Gendreau et sa plume directe, poétique et bien vivante. Ce spectacle est d’abord une célébration de la vie, de la littérature et de la force de cette génération dont on a longtemps dit qu’elle ne croyait en rien, accompagné d’une esthétique un peu « trash » et de beaucoup, beaucoup de paillettes.