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Du 7 novembre au 2 décembre 2016, jeudi 20h, vendredi 19h et samedi 16h, dimanche 20 novembre, 15h
Le Joker
(ENTREVUE) Un as de l’étrangeté : entrevue avec Larry Tremblay pour «Le Joker» et «Le garçon au visage disparu»
Texte Larry Tremblay
Mise en scène Eric Jean
Avec Louise Cardinal, Marilyn Castonguay, Normand Daneau, Pascale Montpetit, André Robillard

Le Joker se déroule au cours d’une seule nuit. Mais cette nuit en recèle plusieurs : nuit du vent fracassant les fenêtres, d’une clameur grandissante, de frontières dévastées, d’une foule avançant invisible ou encore d‘une histoire d’amour dérisoire. Comme si, au cœur de cette obscurité, un accélérateur de particules permettait à la réalité d’atteindre une quatrième dimension : là où le temps ne suit plus son cours normal. Quatre personnages subissent les effets de cette accélération et sont confrontés au Joker, qui les interpelle, les pousse dans leurs derniers retranchements.

Ce nouvel opus de Larry Tremblay, écrit pour Eric Jean avec qui il entame une troisième collaboration, propose un langage narratif déconcertant et acéré qui dérègle les mœurs, voile nos perceptions et sème l’ambiguïté.

Dans cette étrange marche nocturne où le monde ne tient plus en place, on interroge la peur de l’autre, qui n’est, peut-être, que soi-même.


Assistance à la mise en scène Chloé Ekker
Décor Pierre-Etienne Locas
Costumes Cynthia St-Gelais
Lumière Martin Sirois
Maquillages et coiffures Florence Cornet
Musique originale Laurier Rajotte
Environnement sonore et régie Olivier Gaudet-Savard

les vendredis - 5@7 Vendredi c'est Grilled-cheese !
17 novembre - Soirée des Noctambules
20 novembre - Activité L'Heure du conte

L'HEURE DU CONTE

Caroline Lavigne

Pour une huitième année, le Quat’Sous contribue à la vie culturelle des familles! Pendant que vous assistez à la représentation dans la grande salle le dimanche après-midi, vos enfants, petits-enfants, filleuls ou neveux de 5 à 9 ans assistent à un spectacle de contes, donné par des artistes professionnels dans la salle de répétition. Le conte est suivi d’une pause-collation et se termine par une activité de bricolage animée par Dominique Loiselle.

Activité gratuite pour les enfants des spectateurs
Réservation requise

Avant la première 25$
En prévente jusqu’au soir de la première représentation de chacun des spectacles.
À compter de la première 36$
2 pour 1 - 36$
Les samedis et dimanches, selon les disponibilités, le soir même au guichet.
Groupe (10 et +) 21$
* Ajoutez 3$ pour les achats au téléphone et en ligne

Une production du Théâtre de Quat’Sous


Quat'Sous
100, ave. des Pins Est
Billetterie : 514-845-7277

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Critique

Le théâtre de Larry Tremblay est travaillé par certaines thématiques, qui reviennent de manière récurrente dans son œuvre : le double, la confrontation des identités, le morcellement de la langue, le rapport entre l’individu et le social. Le corps occupe également une place essentielle dans l’élaboration de la dramaturgie tremblayenne, centrée sur le personnage. Avec Le Joker, mis en scène par Éric Jean, le dramaturge cherche à donner corps aux voix qui cohabitent dans nos têtes et tentent de répondre à la question suivante : sommes-nous réellement seuls lorsque nous pensons?


Crédit photo : Yanick Macdonald

Comme c’était le cas avec Le Ventriloque et Abraham Lincoln va au théâtre, l’auteur fait du dédoublement le moteur de sa pièce. La figure du Joker en elle-même est hautement théâtrale, référant autant au farceur joyeux qu’au clown maléfique et malveillant. S’ajoute à la figure du Joker celle du zombie, pris dans une posture oscillant entre la vie et la mort.

La scénographie de Pierre-Étienne Locas oppose le salon de l’appartement de Julianne et la chambre de celui d’Alice. Au-dessus, une passerelle évoque les rues inquiétantes de la ville. Conçus par Martin Sirois, les lumières tamisées et les effets stroboscopiques participent également à créer un univers insolite et déstabilisant où les règles du réel et de la logique n’ont plus d’emprise.

Avec sa structure fragmentée et ses références hétéroclites, la pièce de Tremblay appelle une grande polyvalence des acteurs, qui doivent s’ajuster au mélange des tonalités. Les personnages, à mi-chemin entre le sommeil et l’éveil, ne semblent pas pleinement en contrôle de leurs pensées. Marilyn Castonguay incarne Alice, une jeune femme étrange aux allures de poupée, qui choisit de devenir danseuse auprès des malades d’un hôpital ; Louise Cardinal joue Julianne, une mère suicidée-ressuscitée, qui passe ses journées à regarder impassiblement des films d’horreur gore ; Normand Daneau joue Simon, le mauvais père de famille comptable qui se recycle en policier et André Robillard joue leur fils Olivier, un poète raté qui manque de confiance en lui. Ces quatre personnages voient leur existence bouleversée par la rencontre du Joker, qui les pousse à réfléchir à leur action, à légitimer les gestes qu’ils posent ou à les informer des revirements de situation de l’histoire. C’est le Joker qui annonce par exemple à Olivier qu’Alice est désormais en couple avec son père, ou encore qui l’amène à trouver un nouveau vocabulaire pour renouveler sa prose.

C’est Pascale Montpetit qui incarne avec justesse et subtilité cette présence obsédante et angoissante pour le spectateur. Apparaissant d’abord comme un personnage omniscient, dont seule la tête dépasse du sol pour assister les autres personnages dans leurs questionnements existentiels, le Joker se métamorphose ensuite pour emprunter tour à tour les traits d’Alice, puis ceux de Julianne.  En conservant toutefois son visage maquillé de blanc, ses lèvres rouges, ses yeux cernés, ses sourires et ses rictus, le Joker ne laisse jamais oublier sa présence et donne à la représentation des allures cauchemardesques.

Avec Le Joker,Éric Jean clôt ses douze ans à la direction artistique du Théâtre de Quat’sous d’une bien belle façon en mettant à profit tout le talent et l’ingéniosité de metteur en scène qu’on lui connaît.

11-11-2016