Idée originale, textes et conception Louise Bombardier
Avec Louise Bédard, Louise Bombardier, Paul-Antoine Taillefer
Les « petits fantômes mélancoliques », ce sont les enfants autistes, qui n'apprendront peut-être jamais à communiquer avec leur entourage et dont l'univers nous est à jamais interdit. Avec chaleur et compassion, la comédienne et auteure Louise Bombardier s'insinue dans leur espace mental et leur crée un imaginaire porteur de poésie, imprégné des tableaux du peintre Balthus, dont l'oeuvre a laissé son empreinte sur ces miniatures sensuelles et troublantes.
Conseiller à la mise en scène Claude Poissant
Direction artistique Angelo Barsetti
Musique Hélène Bombardier
Lumières Étienne Boucher
Une présentation de Pigeons International
par David Lefebvre
Quand le silence fait naître des mots spectres, des tristesses solitaires, quand le spleen nous isole de soi-même et nous rend trop vulnérables, quand l'état cathartique dévoile en nous de petits fantômes mélancoliques, on ne peut que créer dans une poésie tendre et impressionniste. Publiés chez Les 400 Coups puis lus pour la première fois devant public lors du FIL (Festival international de la littérature) en 2007, Louise Bombardier nous présente finalement, sur scène, ses contes-portraits, autistes, blessés, doucement baignés dans un univers malade, en deuil.
Lors des vingt et un tableaux proposés, nous faisons la rencontre d'enfants et de gens, victimes d’abus, en carence, qui, d'ordinaire, n'ont pas la chance de prendre la parole. Nous entrons dans leur monde à la fois ludique, tendre, imaginaire, violent, mais aussi très érotique. Il y a la dormeuse du Val, née dans la mauvaise situation, Hélène au corps de marbre, Liliane qui se tient toujours derrière son père, les seins nus, Mathilde qui collectionne les papillons et qui clame son droit d'exister, Hans, à la nature catastrophique, au nez toujours fourré dans le tapis à lire et relire et qui voit sa soeur Athéna partir pour l’Australie. Et Violette, entretenue et violée par son cousin, et Christine, vendeuse de lingerie et souple comme son chat, et Sophie qui jamais ne plie, et Jacynthe qui se fait toucher par son professeur de musique, et Justine et son bébé lynx, et... et... et...
Louise Bombardier joue et narre, de sa voix douce et grave, ses contes, entourée de deux danseurs émérites qui donnent vie et texture à ses mots. Louise Bédard et Paul-Antoine Taillefer, de leur présence, réagissent aux textes de Mme Bombardier et personnifient les enfants, les animaux ou leurs bourreaux. Émanent alors de leurs corps et de leurs gestes ces petits êtres bouillants, pétrifiés, meurtris, abandonnés, qui ne demandent qu'à se faire entendre, qu'à capter un regard bienveillant. La poésie du désarroi imprègne totalement la pièce, de l'étude du mouvement jusque dans la parole de l'auteure, en passant par les éclairages et la scénographie, composée essentiellement d'une quinzaine de lampes allumées, diffusant une chaleureuse lumière orangée, d’un fauteuil renversé et d’une porte, ouverture de l'inconscience.
On ressent aussi l'influence du peintre Balthus, tout autant dans les récits que dans la direction d'acteurs. Il suffit de voir ou de revoir quelques-unes de ses toiles pour y voir une forte source d’inspiration. Par exemple, La leçon de guitare s'apparente directement à l'histoire de Jacynthe, ou encore Therese (qui se rapporte à Christine) ou The Golden Days (à Colette)...
«L'extérieur et l'intérieur sont des mondes fabuleux, mais immensément séparés», dit l'un des personnages, au tout début du spectacle. Vingt et un petits mondes de souffrance repliés sur eux-mêmes, mais tout aussi romantiques qu’attendrissants, teintés d'humour et de fantaisie.
À lire, Petits fantômes mélancoliques - contes autistes, de Louise Bombardier, brillamment illustré par Gérard DuBois, au 400 Coups.