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Du 16 au 19 novembre 2011
RireJ'aimerais pouvoir rire
De Angela Laurier
Mise en scène de Lucie Laurier
Avec Angela et Dominique Laurier

J'aimerais pouvoir rire, l'expression un brin cynique du père d'Angela et Lucie Laurier, est devenue le point de départ d'une pièce émouvante et intime. Présentée comme la suite de Déversoir, cette nouvelle création éveille la part lumineuse de la folie, cette dimension emplie de poésie et de contradictions. Au coeur de ce sujet, c'est surtout le parcours personnel de leur frère, Dominique, diagnostiqué schizophrène, qui transparaît et prend forme. Cherchant à tout prix à « brasser l'histoire familiale », Angela se fait le modèle de son frère pour incarner ses hallucinations et ses paranoïas passées. Dominique se raconte, Angela panse ses plaies. La gestuelle de la sœur s'approprie le propos du frère jusqu'à pénétrer son être profond, à mettre en lumière ses doutes, ses nœuds, ses douleurs à elle.

J'aimerais pouvoir rire est à vivre tel un enchaînement de tableaux flamboyants où fantasmes et visions affrontent la réalité la plus brutale. Scénographie, lumière et musique exacerbent à leur tour cette lutte constante entre la délivrance et l'aliénation. De cette relation particulière entre le frère et la sœur, à la fois dure et tendre, Lucie Laurier a su puiser toute la densité nécessaire pour concevoir une œuvre sublime. Un moment d'une rare humanité pour tous.


Extrait vidéo disponible ici

Coproduction et partenaires : Le Théâtre National de Chaillot (Paris), La Verrerie d'Alès en Cévennes, Pôle Cirque Région Languedoc-Roussillon, Les Nouvelles Subsistances (Lyon), La Brèche, Centre des Arts du Cirque de Basse-Normandie (Cherbourg), Le Trident, Scène Nationale de Cherbourg-Octeville.
Présentation : Usine C


Usine C
1345, avenue Lalonde
Billetterie: (514) 521-4493

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 Critique
Critique

par Sara Fauteux


Crédit photo : Fleur Arens

Après Déversoir, présenté à Montréal à La Chapelle en 2009, Angela Laurier remonte sur scène avec son frère Dominique Laurier pour nous parler de sa famille. Cette fois, c’est Lucie Laurier, leur sœur cadette, qui assure la mise en scène du spectacle, une première pour elle. J’aimerais pouvoir rire aborde l’histoire familiale, plus particulièrement l’histoire de Dominique, diagnostiqué schizophrène.

Le spectacle se décline dans une série de tableaux qui superposent danse, vidéos, peinture et théâtre.  Si certains de ces tableaux sont moins réussis et moins percutants que d’autres, ils créent somme toute un ensemble pertinent et finement construit, autant dans la forme que dans le propos. Malgré la thématique familiale, J’aimerais pouvoir rire ne tombe pas dans le mélodrame ou dans le pathos, et ce, grâce à sa cohérence.

La réalité se mêle à la poésie et au délire et à la folie dans cette performance qui présente un équilibre d’abstraction et de concret révélateur de sens. Chacun des éléments du spectacle, des costumes aux projections, de la musique à la chorégraphie, se déploient et s’expriment entre ces deux langages, les sollicitant en alternance. On fournit ainsi des pistes aussi réfléchies que sensibles au spectateur pour appréhender l’univers familial et le rapport avec la maladie et la folie.

Dominique Laurier apparait d’abord dans des vidéos où il parle de sa maladie et de sa manière de concevoir la vie. Au court du spectacle, sa parole se transforme et devient une voix poétique, une sorte de slam qui transcende le simple témoignage. De la même manière,  le corps de la danseuse s’abandonne à des moments plus abstraits, où l’on joue sur le corps qui se désaxe, mais qui s’impose aussi comme une présence simple et naturelle sur scène.

L’usage de la vidéo dans ce spectacle est particulièrement réussi. Hyper présentes, les projections prennent toutes sortes de formes qui servent réellement la représentation plutôt que de simplement meubler la scène et étourdir le spectateur, comme c’est trop souvent le cas. L’espace, conçu par Richard Croisé, est multiple et se transforme au gré des tableaux, dissimulant ou révélant l’espace arrière qui abrite des musiciens qui assurent l’ambiance sonore.

Ces musiciens ajoutent beaucoup à la représentation ; leur présence, à la fois discrète et centrale, est habilement dosée. L’énergie de la musique en direct traverse le public et accorde un souffle vivant à la scène, presque rock à certains moments.

J’aimerais pouvoir rire est un spectacle dont on ne peut ignorer le caractère autobiographique. Mais, grâce à la solidité de sa vision et à la sincérité de son propos, Lucie Laurier signe ici plus qu’une œuvre touchante et personnelle. On est également un objet maitrisé et artistiquement intéressant.

18-11-2011