Après dix ans avec la compagnie Motus, l’incomparable performeuse Silvia Calderoni expérimente à nouveau et met son apparence androgyne au service d’un discrédit de la théorie des genres. Telle un DJ survolté, la performeuse pilote une bande son allant de Buddy Holly aux Smiths en passant par Stromae, joue avec sa propre image filmée et des images documentaires, et dessine dans l’espace une danse électrique. MDLSX se reçoit comme une véritable bombe sensorielle, un hymne à la liberté du devenir et au mélange des genres.
Motus est fondée en 1991 en Italie par deux étudiants en sociologie et économie, Enrico Casagrande et Daniela Nicolò. Nourrie de toutes les contradictions du monde contemporain, la compagnie acquiert une notoriété nationale et internationale et reçoit en 2000 le Prix Ubu, prix de théâtre italien. Après s’être confrontée aux textes de Rainer Werner Fassbinder, Motus développe en 2008 un nouveau projet, Syrma Antigónes, qui aborde les conflits générationnels. Leur Antigone devient alors l’allégorie de la lutte et de la résistance, et donne naissance à Alexis. una tragedia greca, présentée dès 2011. La compagnie fait de nouveau éclat en 2014 avec Nella Tempesta, une création participative qui se veut le reflet des tumultes de notre société : du choc de l’ouragan Sandy aux conséquences de la crise économique.
Dramaturgie Daniela Nicolò et Silvia Calderoni
Son Enrico Casagrande avec Paolo Panella et Damiano Bagli
Lumière et vidéo Alessio Spirli
Photo Matteo Maffesant
Discussion avec le public après la représentation du 23 mars
Tarifs : Rég. 35$ | Ainé 32$ | Réduit 30$
Production Motus 2015
En collaboration avec La Villette - Résidence
D’artistes 2015 Paris, Create To Connect (Eu
Project) Bunker / Mladi Levi Festival Ljubjana,
Santarcangelo 2015 Festival Internazionale Del
Teatro In Piazza, L’arboreto - Teatro Dimora Di
Mondaino, Marche Teatro
Après être montée sur scène au Festival TransAmériques dans Too Late ! (antigone) contest #2, Alexis. Una tragedia greca et Nella Tempesta, la danseuse, performeuse et comédienne Silvia Calderoni revient à Montréal dans la première nord-américaine de MDLSX [Middle Sex], de la compagnie Motus, avec qui elle collabore depuis dix ans. Avec ce nouveau spectacle, les metteurs en scène Enrico Casagrande et Dianiela Nicolò interrogent les questions de l’identité de genre.
À travers 23 tableaux accompagnés de leur propre bande musicale, Silvia Calderoni mélange des vidéos documentaires de son enfance, des photos de son adolescence, des extraits d’œuvres littéraires et des morceaux de musique afin de traiter de sa propre situation d’intersexuelle. Sa parole se mélange à celle de Sophocle, Fassbinder, Genet, Eugenides, Woolf et Pasolini, créant une frontière floue entre réalité et fiction.
Seule sur scène, elle raconte son inconfort à devoir choisir entre son identité féminine ou masculine et dénonce la «binarité» du modèle social auquel nous sommes tous confrontés. S’improvisant DJ, éclairagiste et accessoiriste, elle interagit avec sa propre image filmée et accompagne ses histoires de chansons de Stromae, Buddy Holly, Smiths, Air ou REM. Cet éclectisme musical répond d’ailleurs particulièrement bien à l’ouverture à la diversité qu’elle encourage tout au long du spectacle et à son désir de se défaire de catégories sexuelles trop rigides.
La force du discours de Calderoni tient du fait qu’il évite à la fois le sensationnalisme et le didactisme qu’aurait pu provoquer sa condition biologique d’homme atteint d’hypospadias. Celle qui se fait appeler « Cal » illustre parfaitement le discours de Judith Butler sur la non-concordance entre sexe biologique et identité de genre. Née homme, mais élevée en femme, Calderoni montre que l’identité peut être plurielle et que celle-ci ne mène pas nécessairement à un « trouble » comme le laisse présager le titre de l’ouvrage de Butler, Gender Trouble. Le théâtre étant un art qui permet à l’interprète d’endosser plusieurs personnages, il s’agit d’un canal privilégié pour aborder la question identitaire.
C’est dans une ambiance festive que Calderoni raconte son récit de douleurs, de peine, mais aussi d’inclusion et d’acceptation de soi. La performeuse bouge sans cesse pour danser, changer de costume et manipuler l’espace. L’essentiel de son jeu se passe dans un étroit triangle argenté en tissu déposé sur la scène noire de l’Usine C. Le dévoilement intime auquel elle se livre met en place une rare proximité avec le spectateur et amorce une réflexion en lui qui le travaillera longtemps.
MDLSX est un spectacle qui marque de manière indélébile la mémoire et qui rappelle que le théâtre peut parfois se faire le lieu d’une ouverture sensible à l’autre qui ne peut qu’être bénéfique.