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Lamelles
Du 2 au 4 mai 2018, 20h

Toute expérience de l’architecture est multisensorielle, que ce soit dans l’appréhension de ses espaces, de ses matières, de ses échelles ou de sa part d’ombre et de lumière. Avec Lamelles, le scénographe Cédric Delorme-Bouchard sonde la notion de seuil et de limite telle que théorisée dans la pratique architecturale contemporaine. Sur scène, des projecteurs sont alignés par une ceinture de fer et c’est leur faisceau qui incarne la délimitation des formes, parfois de façon tranchée, souvent de manière plus poreuse. Le découpage et la transformation de l’espace deviennent une aventure sensible et phénoménologique, offrant aux spectateurs une série d’actes chorégraphiques d’une magnifique étrangeté.

Cédric Delorme-Bouchard a conçu les lumières et la scénographie de plus d’une soixantaine de créations sur la scène montréalaise en théâtre, danse et opéra. Il a aussi signé la conception de plusieurs projets d’envergure à l’étranger, notamment en Amérique du Sud, en Europe et en Asie. Depuis plusieurs années, il s’associe de manière récurrente à la metteure en scène Angela Konrad et la compagnie LA FABRIK (Macbeth, Le royaume des animaux, Last Night I Dreamt that Somebody Loved Me, Les robots font-ils l’amour ? ) ainsi qu’à plusieurs autres créateurs.


Mise en scène, conception lumières et scénographie Cédric Delorme-Bouchard
Performeurs Laurence Castonguay Emery, Mélanie Chouinard, Jennyfer Desbiens, Danielle Lecourtois, Myriam Foisy, Emanuel Robichaud, Alexis Trépanier


Entrevue

L’architecture organique de Cédric Delorme-Bouchard dans Lamelles

Par Alexane Roy


Cédric Delorme-Bouchard

En mai prochain, l’architecture de marbre connaîtra une petite révolution puisqu’avec Lamelles, une nouvelle création sans paroles, Cédric Delorme-Bouchard entend bien défaire cette idée de pierre en explorant les notions de seuil et de limite, avec seulement un mur, sept corps et la lumière.

Rencontré au Prospero à la veille de la première de Le Nom, pièce dont il a signé la conception d'éclairage, Cédric Delorme-Bouchard semblait emballé à l'idée de pouvoir discuter de Lamelles, spectacle résultant de sa maîtrise en théâtre à l'UQAM. Malgré la tempête d’imprévus présagée en ce jour de générale, le calme qui règne dans le hall d’entrée du théâtre de la rue Ontario annonce un échange de qualité entre un concepteur passionné et une journaliste intriguée.
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Crédits supplémentaires et autres informations

Assistance à la mise en scène et dramaturgie William Durbau
Accompagnement et dramaturgie à la création Christelle Franca
Conception sonore et musique originale Simon Gauthier
Conseil en mouvement Camille Lacelle-Wilsey
Costumes Camille Jupa en collaboration avec la designer de mode Tricia Crivellaro et sa collection Aikido
Regard extérieur Angela Konrad
Photo Maxime Robert-Lachaine

Discussion avec le public après la représentation du 3 mai

Durée 1h

Tarifs
Régulier 33$
Aîné 30$
Réduit 28$

Coproduction La Chambre Noire et Cédric Delorme-Bouchard, avec le soutien de l’École supérieure de théâtre de l’UQAM et d’Hexagram
Présentation Usine C


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Critique disponible
            
Critique

Avec Lamelles, Cédric Delorme-Bouchard signe une première mise en scène des plus fascinantes. Agençant des corps et la lumière dans un spectacle sans paroles où la musique est omniprésente, le diplômé de l’UQAM dissèque l’anatomie humaine sous les yeux intrigués des spectateurs de l’Usine C. Tel un architecte, celui qui est plus connu en tant que concepteur d’éclairage s’est évertué à créer un dispositif de lumières représentant, à lui seul, les notions de seuil et de limite explorées durant ses études universitaires. Basée d’après plusieurs théories architecturales sur le sujet, la mise en scène tente de faire rendre compte de l’aspect multisensoriel de cette forme d’art à partir duquel chacun peut s’inventer une trame narrative personnelle.

Véritable travail de précision, ce projet réunit sept artistes de talent qui proviennent autant du milieu de la danse que celui du théâtre corporel. Vêtus de noir de la tête aux pieds lorsqu’ils ne sont pas en scène, ceux-ci montrent la nécessité du travail de la costumière Camille Jupa. Multipliant les prouesses acrobatiques dans la noirceur, ils réussissent l’exploit de ne rendre visible qu’une partie de leur corps. Une aussi grande habileté corporelle vaut à elle seule le déplacement. Tous constitués d’un « marbre » d’une souplesse étonnante, ceux-ci s’avèrent un excellent matériel pour tailler plusieurs espaces bien distincts. Même si l’interprétation de chaque tableau peut varier d’un spectateur à l’autre, Delorme-Bouchard parvient facilement à partager la sensation corporelle ressentie par les interprètes à l’ensemble de l’auditoire. Ainsi impliqué, le public devient rapidement un acteur important du spectacle auquel il assiste, provoquant une certaine instabilité captivante chez plusieurs.

Le travail de Simon Gauthier à la conception sonore mérite également d’être souligné. Accueillant le public dès l’entrée en salle, les effets sonores suggèrent une intensité à la représentation en plus de dicter le rythme de celle-ci. Utilisant plusieurs bruits de la nature, le concepteur permet de figurer efficacement la dominance de cette dernière sur les êtres qui exécutent des mouvements selon son tempo. Malgré ses nombreuses tonalités agressantes, son pouvoir de donner vie à une obscurité quasi totale garde l’intérêt général. En référence à son titre, Lamelles emploie l’éclairage telle une plaque de verre qui expose, sous le microscope qu’est la scène, les différents reliefs des corps humains nus sur scène. Sans montrer des images nécessairement esthétiques, l’éventail impressionnant de détails qu’il rend clairement perceptible jusqu’à la dernière rangée de spectateurs confirme la maîtrise du metteur en scène dans ce domaine.

Terminant avec une finale qui nous laisse stupéfaits, Cédric Delorme-Bouchard s’attire de chaleureux applaudissements pour son travail. Même si tous ne peuvent pas se vanter d’avoir trouvé un sens à la succession de tableaux présentée, Lamelles demeure un spectacle où il est possible de constater l’influence majeure qu’une excellente conception d’ensemble a sur la perception du savoir-faire de chaque interprète. Même dans l’obscurité, la coopération de ces derniers ne peut qu’être félicitée. Devant autant de possibilités d’interprétations, il est plus sage de résumer Lamelles comme une preuve irréfutable qu’en dépit des perceptions qui divisent, la condition humaine ne peut qu’être partagée.

03-05-2018


 
Usine C - petite salle
1345, avenue Lalonde
Billetterie: 514-521-4493

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