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Du 27 décembre 2007 au 19 janvier 2008

Odyssées de l'espace

Création : Vincent Côté, très librement inspirée du film culte de Stanley Kubrick 2001: L'Odyssée de l'espace et de l'oeuvre musicale de Gustav Malher
Avec Geneviève Bélisle, Geneviève Côté, Vincent Côté, Nicolas Germain-Marchand, Martine-Marie Lalande, Philippe Lonergan, Lise Martin, Aurélie Morgane, KIm Lavack Paquin, Thomas Perreault, Raphaël Roussel, Mariflore Véronneau

Sur Terre, dans la deuxième décennie du 22e siècle, les États-Unis demeurent une puissance mondiale et, à leur tête, nous retrouvons la Présidente Susan Jefferson. Les relations internationales sont instables et les conflits mondiaux vont bon train. C'est dans ce contexte que le spectateur suit le parcours de sept astronautes et un prêtre, partis en mission pour explorer les lunes de Jupiter. Ils découvriront le véritable enjeu de la mission Odyssée, un an plus tard, tout près de Mars...

Odyssées de l'espace est une oeuvre théâtrale de science-fiction traîtant de l'évolution de l'homme dans l'unvers, de sa destinée inconnue et de ses fantômes.

Mot de l'auteur et du metteur en scène:

Parler du spectacle Odyssées de l’espace n’est pas chose aisée.  Tout d’abord parce que le spectacle lui-même a quelque chose de mystérieux et d’un peu inexpliqué.  Aussi, parce que le spectacle n’est pas un récit de science-fiction comme les autres.  En effet, habituellement, les auteurs de science-fiction font presque toujours la même chose : ils regardent le futur comme quelque chose de connu.  En étudiant minutieusement le présent, ils extrapolent ce qui pourrait arriver dans l’avenir proche ou éloigné.  Or selon moi, le futur est quelque chose de fondamentalement inconnu.  Odyssées de l’espace ne donne pas réponses à notre avenir, loin de là… Il nous confronte à un combat avec notre destinée et nous-même.

En tant qu’auteur de la pièce, je me suis très librement inspiré du film et du roman 2001 : L’Odyssée de l’espace (de Stanley Kubrick et Arthur C. Clarke) comme matériau premier de création.  Bien que le texte de la pièce soit du matériel original, 2001 a agi comme matière d’inspiration initiale.  La musique symphonique de Gustav Mahler a également servi de base à l’écriture de plusieurs scènes, d’ailleurs toute musique entendue dans la pièce sont des extraits de Mahler. Je me suis également lancé dans une recherche intense sur différentes théories d’astrophysique et de cosmologie.  Écrivant pour des comédiens que je connais et pour une troupe de théâtre dans laquelle je fais partie, j’ai demandé aux comédiens de répondre à un questionnaire très personnel qui m’a servi à donner chair à certains personnages.  Une fois un canevas de base complété, nous avons entamé un processus d’exploration et de répétitions sur certaines scènes.  Ce travail d’exploration a mené à l’élaboration finale d’un texte, que nous avons ensuite monté.

Bien qu’inspiré d’éléments qui peuvent sembler disparates, Odyssées de l’espace est un texte et un spectacle complet ayant un fil conducteur à découvrir.  Car tout au long du spectacle, le véritable acteur du spectacle sera le cheminement intérieur du spectateur vis-à-vis quelque chose qui lui est très familier.  Oui, Odyssées de l’espace traite des origines de l’homme, de la conquête de l’espace, se questionne sur l’existence ou non d’extra-terrestres, parle de la peur de l’Autre, s’intéresse à la notion de machine intelligente…  Oui, on va y explorer l’infiniment grand, mais la pièce cache également un voyage secret qu’il vous reste à découvrir.

Odyssées de l’espace est une expérience théâtrale fascinante pleine de rebondissements, mais qui fait également réfléchir.  Il s’agit d’un spectacle qui est aussi beau qu’effrayant, aussi excitant qu’angoissant.  Il est à l’image de l’infinie complexité de l’Univers et de l’homme,  et aussi, paradoxalement, de leurs très étroite simplicité également. 

Assistance mise en scène et régie : Alexandra Sutto
Concepteurs : Mélina Dupin-Girod, Fruzsina Lanyi, Carol Eveno, Vincent Lavigne, Éric Lapointe, Simon Cloutier, Gustav Mahler

Une création du Théâtre du Vaisseau d'Or

Du 27 décembre au 19 janvier, à 20h, et les dimanches 30 décembre et 6 janvier à 15h

Collège Jean-de-Brébeuf
5575 Av. Decelles
Téléphone: 514-790-1245 (Admission)

 

par David Lefebvre

La beauté de l’incertain

Après leur plus récent spectacle, intitulé “Théâtre Extrême”, le Théâtre du Vaisseau d’Or nous propose un voyage tout à fait différent. Écrit et mis en scène par le comédien Vincent Côté, Odyssées de l’espace est sans contredit complexe, intelligent et intrigant.

L’histoire se découpe en deux parties et cinq tableaux. Le tout débute dans un musée d’histoire naturelle, aujourd’hui. Des statues d’hommes préhistoriques, style néandertalien, prennent vie. On retourne au début des temps : deux clans se disputent un point d’eau et de la nourriture. Puis un d’eux finit par se lever sur ses jambes et aider son clan contre les envahisseurs, après avoir vu une “lumière” (ici sortant d’une trappe du plancher), symbolisant l’Évolution. La transition vers la deuxième scène est plutôt drastique, puisque déjà debout, les hommes de la préhistoire se métamorphosent en athlètes aryens, aux jeux de Berlin. Hitler fait un discours, sous l’œil attentif de la caméra de Leni Riefenstahl. L’évolution, toujours : les scientifiques allemands développent des formules pour améliorer les capacités humaines. La Terre devient alors trop petite, l’homme a envie d’aller plus loin. La technologie permet maintenant de réaliser l’un de ses rêves les plus chers : voler. Ce sont désormais les étoiles qui l’appellent. Ce vaste champ inconnu, est maintenant à sa portée. Youri Gagarine nous entretient sur la course aux étoiles de la Russie, qui n’est pas sans heurts. John F. Kennedy fait la promesse qu’un homme marchera sur la lune, et Neil Armstrong, maintenant âgé de plus de 70 ans, plutôt avare dans ses paroles, s’ouvre enfin au monde à propos de ce grand voyage qu’il a effectué. Encore ici, l’entretien est pourvu de minutieuses informations passionnantes sur l’homme et ses connaissances. On se transporte finalement en 2110 : la situation géopolitique est instable, mais les États-Unis, la présidente Susan Jefferson à sa tête, donne le feu vert à la fameuse exploration des lunes de Jupiter. Mais la véritable mission, secrète, est tout autre : après une découverte extraordinaire dans un cratère sur la lune, qui pourrait prouver l’existence des extra-terrestres, les astronautes doivent trouver vers qui ou quoi se dirige un message diffusé à partir de la lune. Pendant le voyage de l’USS Odyssey, qui se déroule difficilement à cause des différentes croyances et origines des membres de l’équipage et de la rébellion du super ordinateur I.A.H.N. (Intelligence Artificielle Holistique Numérisée), contre les humains du vaisseau, la guerre sur Terre fait rage et éclipse une grande partie de la population, qui se réfugie sous la surface de la Terre. Quand l’évolution devient alors une malédiction…

Odyssées de l’espace rend hommage aux très nombreuses sources d’inspiration du spectacle, ce qui peut être la principale qualité comme le principal défaut de la pièce. On peut facilement y voir les influences de 2001 (le film de Kubrick et le roman de Clark), bien entendu, mais aussi de Conquest of Space ou Minority Report (les comédiens actionnent des boutons sur des écrans qu’eux seuls peuvent voir, holographiques – c’est dans ces moments que les initiés prendront assurément plus de plaisir au spectacle, faisant des liens rapidement, que les néophytes, qui pourraient rester perplexes face aux simagrées des comédiens). La facture générale du spectacle est beaucoup plus cinématographique que théâtrale, ce qui pourrait déplaire à certains, et intéresser les autres… Mais au fond, aurait-on pu faire vraiment autrement, quand on plonge dans une aventure de la sorte, soit de présenter un spectacle futuriste, de science-fiction ? Pourtant, même si quelques spectateurs peuvent ressentir certaines appréhensions, le tout, incluant le jeu des acteurs, est pourtant cohérent et captivant. Sans pour autant se prendre totalement au sérieux, le travail à la mise en scène, l’écriture et la conception est si passionnée (rappelons que les comédiens ont répondu à un petit questionnaire personnel pour aider à la création du spectacle) qu’on ne peut qu’applaudir le projet.

Un autre grand intérêt de la pièce est son discours intelligent : les recherches semblent avoir été faites avec minutie, principalement dans les travaux et études d’Hubert Reeves, au niveau scientifique, et à travers Internet pour tout ce qui est des conspirations diverses et de la présence extra-terrestre sur Terre depuis les années 50. Par exemple, le personnage paranoïaque Travis O’Neil, interprété par Vincent Côté, est un amalgame du geek moderne et des Lone Gunmen de la série X-Files. Le côté suspense du récit est bien ficelé, tournant presque au paranormal dans le vaisseau. Le côté spirituel est loin d’être mis de côté : la religion est abordée à plusieurs reprises ; un révérend fait même partie de l’équipe des astronautes. Va-t-il chercher dans les étoiles un Dieu en qui il croit de moins en moins? Cherche-t-il sa présence dans l’immensité du cosmos? Quoi qu’il en soit, chaque personnage suit sa propre quête, porte son propre fardeau.

Du côté de la scénographie, l’équipe a accompli avec peu de choses quelques exploits. L’utilisation astucieuse des rideaux du théâtre, quelques chaises, tables, toiles… mais surtout, la conception des éclairages inventive et très habile, créant des zones obscures, mystérieuses, ou des effets futuristes convaincants, au néon, donnent un ton visuel juste au spectacle. Alors que dans le long métrage, c’est la musique de Strauss qui rend le film de Kubrick mémorable, les concepteurs ici ont privilégié les créations du compositeur Gustav Mahler. Mahler est à l’origine de la construction de plusieurs scènes, ce qui explique qu’elles collent parfaitement bien à la trame intrigante et émotionnelle du spectacle.

Alors que Odyssées de l’espace aurait pu noyer le poisson par le nombre effarant de personnages, par le concept poussé et terriblement difficile de la science-fiction mis en scène, le tout reste étonnamment concis : on se laisse raconter la Vie dans le premier tableau et l’on suit avec intérêt le deuxième, soit le USS Odyssey, puis on plonge avec lui vers les lunes de Jupiter, sous l’emprise d’un super ordinateur qui se rebelle, et on craint pour la population de la Terre qui, au même moment, se réfugie dans les entrailles de la mère nourricière aux mots de l’Apocalypse. Le spectacle ne répond peut-être pas aux questions qu’il soulève, mais ose au moins les poser sur les planches, et ce, avec efficacité et beaucoup de plaisir.

07-01-2008