Texte et mise en scène Jean-Philippe Baril-Guérard
Avec Andrée-Anne Lacasse, Maxime de Munck, Aurélie Morgane, Pierre-Yves Cardinal et Mathieu Handfielde
Après 7 ans de vie commune, Anne-Marie surprend son copain en flagrant délit d’infidélité dans les toilettes d’un bar, le soir de son party d’anniversaire. Elle l’expulse hors de son appartement et hors de sa vie assez rapidement, et se retrouve vite devant un vide béant : elle est célibataire et n’a connu, malgré ses 24 ans, qu’un seul homme. Avec un humour grinçant et acéré, Baiseries questionne la sexualité des 18-25 ans, le lien ou l’absence de lien entre sexe et amour, et l’apparente nécessité de « tout connaître » au niveau de la sexualité
En Petites Coupures veut en faire plus avec moins : la mission de ses créateurs est de produire un théâtre nécessitant peu de moyens tout en tentant de raconter une histoire en donnant le meilleur d’eux-mêmes.
Décors et costumes : Cloé Alain Gendreau
Conception son et lumières: Marie-Hélène Boisvert
Musique originale: Cynthia Bourgeois, Maxime de Munck, Mathieu Handfield, Guillaume Caron, Valérie Toupin
Chorégraphies: Myriam Baril
Date Premières : du 16 au 20 mars 2010
Régulier 20$
Abonné 10$
Étudiants: 15$
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Production En Petites Coupure
Espace 4001 (Geordie)
4001, rue Berri
Billetterie : 514 903-8946
enpetitescoupures@gmail.com
par David Lefebvre
Avec un tel titre, il est clair que les Productions En Petites Coupures n'allaient pas faire dans la dentelle et l'eau de rose. Baiseries raconte l'histoire d'Anne-Marie, une jeune femme de 25 ans qui célèbre son anniversaire dans un bar. Elle surprend son copain, le seul avec qui elle a partagé son lit jusqu'ici, en flagrant délit avec une poulette de 19 ans. Elle le chasse de sa vie et chamboule complètement ses habitudes. Elle se dévergonde, accumulant beuveries, expériences sexuelles de toute sorte et absences prolongées au travail.
Dans la très jeune vingtaine, l'auteur et metteur en scène prometteur Jean-Philippe Baril-Guérard puise son inspiration dans un puits sans fond, soit celui de la sexualité des jeunes adultes d'aujourd'hui. Il explore les fantasmes, le masochisme, les bonnes et moins bonnes expériences, la pornographie, la nymphomanie (ou la recherche de l'affection par la baise), les ITSS, l'attirance physique, le rejet et le détachement. Le langage est cru et très direct, on ne trébuche pas dans les mots : au diable les tabous et la censure. L'humour passe du cocasse au noir, le rire se fait franc ou jaune. On s'amuse des expériences d'Anne-Marie (Andrée-Anne Lacasse), on rit de l'exaspération et des emportements de son frère Guillaume (Maxime de Munck). Mais une scène, opposant Alex le toxicomane (Mathieu Handfield) et Anne-Marie, est particulièrement réussie, où désespoir, désir d'être accepté, aimé, et violence physique se mélangent ; troublant de vérité. La mise en scène fait preuve d'un énorme dynamisme et maintient toujours un rapport privilégié et audacieux avec le public. Les comédiens, Andrée-Anne Lacasse, Maxime de Munck, Aurélie Morgane, Pierre-Yves Cardinal et Mathieu Handfield, cassent la glace et commencent le spectacle avec une confession : leur première fois. Ce type d'intervention revient à quelques reprises, surtout lors de transitions : l'une parle du fantasme d'un viol à cinq, l'autre de son incapacité à «fourrer sa blonde» parce qu'il l'aime trop, ou encore on effectue un sondage à main levée sur les pratiques sexuelles des spectateurs. Ces confessions, mi-véridiques mi-écrites, dépeignent sans contredit une réalité de la génération des 19-25 ans qui sont les progénitures de la révolution sexuelle, les dénaturés de l'hypersexualisation médiatique. Malgré la particularité de la mise en scène, le spectacle s’étire, et certaines situations deviennent carrément redondantes.
Quoique divertissant, la pièce nous laisse un goût amer de déresponsabilisation et de triste banalité. Dans un monde où la fellation est rendue un jeu de société, où le nombre de partenaires se transforme en score personnel et où un gangbang devient aussi naturel qu'un verre entre amis, comment se définit-on? Comment arrive-t-on, entre jeunes adultes, à bâtir quelque chose de solide et de durable? Est-ce encore possible? Jean-Philippe Baril-Guérard expose et dénonce, par Baiseries, ce vide, cette futilité de la recherche d’une échappatoire dans une sexualité sans borne, sans pour autant répondre ou offrir de porte de sortie à ces personnes de plus en plus désensibilisée qui se perdent et sont englouties dans cette vicieuse situation. La finale, loin d'être porteuse d'espoir mais tout à fait réaliste, vient assombrir le portrait, déjà peu reluisant.