Texte Reginald Rose
Mise en scène :
Michel Leduc
Avec Arnaud Beauchamp,
Olivier Chartrand,
Philippe Desaulniers,
Sylvain Dubois,
Johnny Forget Jr,
Yves Gauthier,
Pierre Lalancette,
Michel Leduc,
Antoine Michaud,
Carl Ringuette,
Gregory Saget-Rudd,
Claude Thériault,
François Thibodeau
Un jury doit statuer sur le cas d'un jeune homme de 18 ans, issu d’un quartier difficile, accusé du meurtre de son père. Les preuves sont accablantes, les hommes sont pressés d'en finir, mais il faut l'unanimité des votes pour condamner l'accusé. Or sur les douze jurés, un d’entre eux a un doute sur sa culpabilité. Commence alors un vif débat au cours duquel chacun devra défendre ses convictions.
Un chat, un coq, un koala, un oursin, un crocodile, un pigeon, un requin, un zèbre, un chien, un mulot, un raton et un rhinocéros. Tous coincés dans une boîte en carton. Et qui doivent s’entendre. Douze hommes en colère, c’est un peu ça. Et c’est aussi autre chose, mais là, il ne faudrait tout de même pas tout vous dire…
Une production Histrion
Salle Paul Buissonneau du Centre Culturel Calixa-Lavallée
3819 Calixa-Lavallée, dans le coeur du Parc Lafontaine
Réservation en ligne au www.histrion.org
12$
par Mélanie Viau
Au moment même où le New-Yorkais Reginald Rose se trouvait aux côtés des autres membres du jury, il ne savait pas encore que l’histoire de ce procès allait lui inspirer une des œuvres les plus jouées de par le monde. Aujourd’hui, elle fait encore courir les foules. Quel est le secret ? Qu’est-ce qui fait qu’on est si intéressé à voir et revoir Douze hommes en colère?
Cette pièce à succès, visitée par les plus grands noms de l’univers théâtral, gagnante d’un Oscar et adaptée à maintes reprises, n’a pas effrayé les Productions Histrion (« On fait ce qu’on peut avec ce qu’on a ») et sa troupe de comédiens – membres du théâtre salvateur et amateur de jeu - qui, pour quelques jours seulement, mènent le débat corsé sur le droit de vie ou de mort d’un jeune noir accusé de parricide. Installé assez confortablement dans ce petit théâtre au cœur du Parc Lafontaine, on se dit, dans la salle comble, bruyante, festive, que c’est ça, la pleine démocratie au théâtre. Une vraie démocratie. Dépouillée de tout élitisme. En marge de l’institution.
Sans réinventer la roue – pourquoi le faire d’ailleurs ? -, la mise en scène de Michel Leduc respecte le cadre réaliste dans lequel Rose a installé le huis clos, défini le profil et dirigé le point de vue de chaque personnage. Autour de la longue table, sous le tic-tac irritant d’une horloge, devant une fenêtre séparant la petite salle trop chaude d’un orage tropical qui annule du coup le match des Yankees, se joue une humanité sans artifices autres que ceux dont peuvent se gonfler les hommes pour se protéger de leurs semblables. Instinctifs, énergiques, coriaces, convaincants, les douze comédiens - une distribution franchement réussie - mènent la barre avec fermeté en dosant bien le rythme de ce long voyage dans les méandres de la perception. Le jeune homme, visiblement coupable – et ethniquement coupable - est-il hors de tout doute raisonnable ? Peut-on envoyer un inconnu mal nanti sur la chaise électrique en faisant fi de notre propre émotivité, aussi virile soit-elle ? Le témoignage sous serment nous protège-t-il des fausses vérités ? Happé par l’attraction des enjeux et la haute tension dramatique, le public reste sérieusement attentif à tous les moindres détails, histoire de ne pas faire le mouton et gober tout ce qui est dit, les yeux fermés. Faire l’effort de se questionner.
Pourquoi retourner voir Douze hommes en colère ? Parce que c’est l’histoire d’un espace public qui continuera de s’actualiser tant et aussi longtemps qu’on décidera d’y revenir pour réfléchir, collectivement, sur notre rapport avec le monde véhiculé par le regard et la parole d’autrui. Et voir douze hommes en colère, ça a déjà un quelque chose de divertissant, non ?