Texte Sarah Ruhl
Traduction Fanny Britt
Mise en scène Martin Faucher
Avec Émilie Bibeau, Hélène Mercier, Patricia Nolin, Denis Roy et Monique Spaziani
Mathilda, une jeune Brésilienne experte faiseuse de blagues, s’est résignée, en attendant de faire carrière comme humoriste, à gagner sa vie en faisant le ménage de la maison de médecins brillants, Lane et Charles, un couple totalement à la dérive. La soeur de Lane, une folle du ménage, remplacera Mathilda dans ses fonctions afin de lui permettre de trouver « la blague parfaite ». La situation se complique quand Charles trouve l’âme soeur, une patiente atteinte d’un cancer qu’il vient d’opérer. Bien malgré elle, tous ceux que croise Mathilda retrouveront un sens à leur vie, à l’amour, à la mort. Drôle, acide et insolite, un drame domestique signé Sarah Ruhl, une toute nouvelle voix prometteuse de la dramaturgie américaine.
Conception des éclairages Erwann Bernard
Photo K-O/Chaos
TARIF :
24.80 $
Redevance incluse. Frais et taxes en sus.
*TARIFS SPÉCIAUX :
30 ans et moins : rabais d'environ 30%
(une pièce d’identité valide sera exigée à l’entrée du spectacle)
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Une production du Théâtre de l'Opsis
Cinquième salle de la Place des Arts [lien]
175, rue Sainte-Catherine Ouest
Billetterie : 514 842-2112
par David Lefebvre
Une maison propre est l'adaptation de la pièce The Clean House, récipiendaire du Susan Smith Blackburn Prize et finaliste au prix Pulitzer. Monté pour la première fois en 2004, ce texte de l'Américaine Sarah Ruhl aborde plus ou moins directement les thèmes de l'immigration, des cultures, des différents rangs sociaux et de l'importance du travail et de l'ordre - dans notre propre vie comme dans notre environnement. Les relations basées sur l'amour pratique, la découverte de l'âme soeur ainsi que l'euthanasie, font aussi partie des sujets plus sérieux de la pièce.
Dans cette maison se trouve la jeune femme de ménage Mathilda (Émilie Bibeau), une Brésilienne nouvellement arrivée aux États-Unis après la mort de ses parents «les gens les plus drôles du pays». Mathilda aspire à percer comme comédienne humoriste. Dépressive, elle ne fait rien de ses journées, détestant ranger. Elle tente en fait de créer la blague parfaite, même si elle sait qu'elle pourrait en mourir. Il y a Lane (Monique Spaziani) la maîtresse de maison, médecin réputée, qui perd son mari, Charles (Denis Roy ou Michel Laperrière, en alternance), tombé amoureux d'Ana (Patricia Nolin) une Argentine à l'esprit libéré, mais mourante. Mathilda trouve une certaine aide chez Virginia (Hélène Mercier), la soeur de Lane, qui ne tolère pas le désordre, et qui fait le ménage pour elle, question de se désennuyer.
Une maison propre fait partie du cycle états-unien de l'Opsis et a été jouée en 2008, à l'Espace Libre, lors de Famille Made in USA. Cet événement théâtral réunissait, pour quelques soirs, trois pièces de jeunes auteurs américains. La pièce de Ruhl s'était démarquée du lot, par sa «mise en scène vive et l'excellente prestation des comédiennes», selon les critiques de l'époque. Il est agréable d'avoir la chance de voir ou de revoir la pièce, un an plus tard.
Traduite par Fanny Britt, la pièce dégage une énergie de légèreté, malgré certains sujets plutôt sombres. La mise en scène de Martin Faucher impose un rythme généralement soutenu. Découpées en tableaux, les scènes alternent entre la vie dans cette maison tout de blanc meublée et quelques moments de confession des différents personnages, au moyen d’un microphone rappelant le style stand up dont les Américains raffolent. Mais quelques décisions minent notre plaisir. Par exemple, d’entrée de jeu, le long monologue en portugais d'Émilie Bibeau vient faire grincer la machine en marche. Le lien culturel du personnage est très clair, mais ne rien comprendre au texte dès les premières minutes peut occasionner une sensation d’amertume. Puis, il y a ce style «mise en lecture», comme l'a brillamment soulevé un de mes collègues, qui se sent dans les déplacements et le ton des répliques. Martin Faucher joue au narrateur distant, appelant les scènes et décrivant quelques situations. Cela permet, certes, plusieurs moments inventifs, mais crée aussi un effet de suspension. La direction d'acteur de Faucher est par contre impeccable ; Monique Spaziani brille dans son rôle de docteure qui n'arrive pas du tout à imposer son autorité chez elle, entrant à pas de loup pour ne pas déranger la bonne. Hélène Mercier incarne Virginia avec promptitude, au tempérament obsessionnel. Les comédiennes forment un quatuor attachant, éloquent, et s’amusent à incarner ces êtres psychologiquement atteints au comportement parfois invraisemblable. Le seul homme de la distribution, Denis Roy (lors de la première), fait sourire en être nouvellement et amoureusement illuminé.
On a porté une attention particulière à la scénographie : celle-ci, avec peu de moyens et en occupant le même espace, permet facilement d'afficher et de délimiter le style des deux femmes de la vie de Charles. Au centre, le divan chic et la table basse de Lane nous situent dans un salon de banlieue ; à gauche, la petite table et les chaises dépareillées sont les meubles qui occupent la terrasse de bord de mer de l'appartement d'Ana.
La pièce pose un regard comique sur une névrose généralisée chez les Américains blasés, obnubilés par le travail. On rit de bon coeur des élans saugrenus et des répliques expéditives de Virginia, ou alors on est charmé par la savoureuse Mathilda ou par l'élégance et la sérénité d’Ana. Pourtant, la pièce n'arrive pas à satisfaire totalement notre appétit.