Texte Marius von Mayenburg
Traduction Hélène Mauler, René Zahnd
Mise en scène et scénographie Gaétan Paré
Avec Sébastien Dodge, Jean-Moïse Martin, Véronique Rodrigue et un autre comédien
Monsieur Lette, ingénieur doué, fait une découverte fatale : sa laideur. Il n’ira donc pas présenter sa plus récente invention au congrès de Brigue. Son collègue Karlmann ira à sa place. C’est ce que Scheffler, le chef de l’entreprise, a décidé. Monsieur Lette confronte sa femme et va chez le chirurgien se faire recomposer le visage.
Depuis sa création en 1998, le Théâtre de la Pacotille défend des textes tirés de la dramaturgie contemporaine. Il a présenté un cycle sur l’auteur Hervé Blutsch et poursuit un travail de recherche sur la mise en scène, la condition humaine et les possibilités du langage théâtral.
Costumes Linda Brunelle
Date Premières : du 18 au 22 mai 2010
Régulier 25$
Abonné 12,50$
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(Le texte dans sa traduction française est déposé chez L’Arche Éditeur et représenté par les Éditions de L’Arche, Paris, tous droits réservés)
Production La Pacotille
Espace 4001 (Geordie)
4001, rue Berri
Billetterie : 514 934-1001
par Olivier Dumas
À l’exception de l’incandescent Visage de feu au Prospero en 2005, le théâtre de Marius von Mayenburg demeure absent des scènes québécoises. C’est pourquoi il faut se réjouir de voir sa pièce Le moche montée par le Théâtre de Pacotille à l’Espace 4001. Dans une mise en scène alerte, cette farce actuelle divertit sur un propos peu réjouissant.
Écrite en 2007, cette œuvre aborde avec humour le diktat de l’apparence corporelle et le recours abusif de la chirurgie esthétique. L’intrigue s’articule autour de Lette (Sébastien Dodge), un brillant ingénieur à qui on refuse d’aller promouvoir le produit vedette de son entreprise, en raison de sa laideur. On lui préfère son assistant, jugé plus conforme aux critères de l’esthétisme contemporain. Tel un Faust du 21e siècle, Lette se laisse tenter de passer sous le bistouri dans l’espoir de récolter amour et succès. Mais faire un pacte avec le diable entraîne-t-il des répercussions éthiques et humaines?
Dans un espace relativement exigu, l’énergie propice est au rendez-vous pour cette joute oratoire d’une heure. Quelques accessoires, fauteuils et tabourets suffisent au metteur en scène Gaétan Paré pour représenter les différents lieux de l’action. D’une grande précision, la gestuelle de ses interprètes allumés s’imprègne de la course effrénée de cette société marchande esclave du néolibéralisme.
L’une des grandes qualités de ce spectacle demeure sa compréhension intrinsèque des mécanismes de l’écriture de von Mayenburg qui s’apparente ici à un bon match sportif. Sans une véritable progression dramatique, ce sont les répliques acidulées qui maintiennent l’intérêt pour une trame narrative rapidement saugrenue.
Les quatre acteurs prennent plaisir à incarner ces personnages farfelus qui se débattent entre l’hilarité et le pathos. Dans le rôle principal, Sébastien Dodge démontre une incroyable aisance physique et mimique qui rappelle ses compositions antérieures dans Une fête pour Boris et Huis clos. Avec un soupçon de Méphistophélès, le docteur interprété par Yannick Chapdelaine fait rigoler, tout comme le fils à maman aux penchants homosexuels de Jean-Moïse Martin. On retient de Véronic Rodrigue en particulier son interprétation d’une vieille riche à la plastique maintes fois retouchée.
Une petite réserve s’impose. Bien que la représentation théâtrale ne dure que 65 minutes, l’intérêt s’estompe toutefois légèrement dans le dernier quart d’heure. Ainsi, le public ne se plaint pas quand les lumières se rallument après un dénouement confus qui aurait mérité plus de clarté et d’impact.
Le Théâtre de Pacotille poursuit son exploration de textes méconnus d’auteurs actuels avec Le moche. Cette création a le mérite de pousser d’un cran la réflexion sur notre société esclave du paraître au détriment de l’être, sous le masque de l’humour grinçant.