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Du 29 janvier au 16 février 2011, samedi au mercredi 20h30, relâche 14 février
Judith, l'adieu au corps
Texte de Howard Barker
Traduction Maryse Warda
Mise en scène Geneviève L. Blais
Avec Élisabeth Chouvalidzé, Catherine De Léan et Pierre-Antoine Lasnier

Judith, c’est cette jeune veuve de Béthulie qui, pour sauver sa ville assiégée par la redoutable armée assyrienne, va se rendre dans le camp ennemi, séduire le général Holopherne et lui trancher la tête pendant son sommeil, provoquant la déroute de son armée. Revisitant cet épisode biblique, Howard Barker brouille la frontière entre héroïsme et barbarie, questionnant le rapport entre l’être (son corps, ses désirs, sa soif d’absolu) et ce qui dicte ses actes (l’idéologie, la religion, le sens du devoir). Barker explore la complexité des personnages du mythe, inscrivant le geste de Judith dans un contexte riche d’enjeux avoués et inavouables.

Scénographie Angela Rassenti
Costumes Fruzsina Lanyi
Musique Jimmie Leblanc
Éclairage Stéphanie Raymond
Direction de production Élyse Vézina
Direction technique Michaël Fortin
Crédit photo : Daniel Leblanc (graphisme de Catherine Parent).

Carte Premières
Cartes Prem1ères
Date Premières : 29 janvier au 2 février 2011
Régulier : 24$
Carte premières : 12$

Une création de Théâtre À corps perdus

Stationnement souterrain du Marché Jean-Talon
Réservation 514-910-4420 info@acorpsperdus.com
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 Critique
Critique
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par David Lefebvre

Inspirée d'un passage de l'Ancien Testament, la pièce Judith, l'adieu au corps, du dramaturge anglais Howard Barker, nous entraîne dans la tente du général assyrien Holopherne, la veille du massacre de la ville de Béthulie. Judith, une jeune femme veuve d'une grande beauté, se porte volontaire pour l'assassiner. Mais ici, le chef militaire n'est ni enivré, ni endormi ; il pense longuement et veut s'entretenir sur la mort. La puissance d'Holopherne succombera sous le joug de Judith, qui, elle aussi, verra le doute et l'amour faire fléchir sa détermination avant le coup fatal.

L'histoire originale, millénaire, parle de séduction comme arme, et a su inspirer de très grands artistes, dont Donatello, Rubens et Klimt. L'image la plus connue tirée de ce récit est assurément celle du tableau intitulé Judith et Holopherne, du peintre italien Michelangelo Merisi da Caravaggio, dit Le Caravage. Le texte de Baker se targue ici de fouiller et de questionner plutôt l'âme humaine, la barbarie, le rôle de la mort et sa signification, l'amour, la guerre, le mensonge et son contraire, la recherche de la perfection dans l'imperfection de son partenaire, le pouvoir du bourreau et celui de la victime. Mais la réflexion s'embourbe, meurt souvent dans l'oeuf en étant seulement qu'effleurée, ou alors frôle le cliché ou la cocasserie. Les écarts de langage désamorcent inutilement l'intrigue : certaines scènes, rappelant le discours racinien, se voient prendre des accents de banale comédie. Les répliques sont souvent familières, voire déplacées dans ce genre de situation. Des changements d'humeur subits, surtout chez Judith, sont parfois d'une incompréhension stupéfiante. Malheureusement, la mise en scène de Geneviève L. Blais ne réussit pas à corriger ces défauts. Pourtant, les positions et les déplacements dans ce huis clos sont bien étudiés, les corps sont placés dans l'espace de manière classique, mais efficace. La scénographie d'Angela Rassenti, utilisant tapis, rideaux diaphanes, chandelles et rangées de soldats de terre cuite, rappelant les Guerriers de Xi' An, ainsi que la bande sonore de Jimmie Leblanc, placent le spectateur dans l'ambiance adéquate.

S'il est dans le mandat de la compagnie À corps perdus d'investir des lieux urbains significatifs et d'amener le spectateur à expérimenter de nouvelles sensations théâtrales, l'utilisation, en mode fermé de tous côtés par des rideaux opaques, de l'environnement immédiat atypique du stationnement souterrain du Marché Jean-Talon, n'apporte pas grand-chose à l'entreprise. Mentionnons par contre le travail minutieux et impeccable de Stéphanie Raymond aux éclairages, qui a su donner une personnalité propre non seulement à l'endroit, mais à différentes scènes de la pièce.


Crédit photos : Maxime Côté

Pierre-Antoine Lasnier, en général Holopherne, manque de profondeur pour que l'on puisse réellement croire aux côtés sombre et tyrannique de son personnage, qui s'avère d'une fragilité - ou d'une légèreté - enfantine. En réponse à ceci, Catherine De Léan joue une Judith si frondeuse, si grossie, qu'elle donne l'impression de faire partie d'un mauvais tour, comme si ces deux-là se connaissaient depuis leur tendre jeunesse. Leur rapport est précipité, surréaliste : aucune tension, ni sexuelle, ni de terreur, ne s'installe entre les deux amants d'un soir. Sans cette tension, toute l'histoire, des prémisses aux conséquences funestes, ne tient finalement qu'à très peu de choses. Et la folie dans laquelle sombre Judith après son ultime assaut manque de crédibilité, malgré un soupçon de sympathie que l'assistance peut ressentir au moment où la jeune femme réagit de façon sexuelle face à la mort. Les phrases à moitié terminées, des deux côtés, manquent foncièrement de naturel.

Malgré certains écarts, essentiellement dus au texte, Élisabeth Chouvalidzé propose une servante plus crédible, persévérante, sommairement patiente, au patriotisme incarné. La dame de théâtre enfile la robe de ce personnage très physique avec aplomb et une certaine justesse.

Judith, l'adieu au corps s'avère malheureusement décevant ; le propos s'y trouve diffus, voire confus, et le jeu, inégal, ne permet pas d'entrer réellement en contact avec la réflexion qui semblait, au départ du moins, digne d’intérêt, ou même d’apprécier à sa juste valeur la personnification repensée de ces héros de l’Antiquité.

01-02-2011

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