Phèdre est mariée à Thésée, mais est amoureuse du fils de ce dernier, Hippolyte.
Pour ne pas contrarier son époux, elle cache cet amour et l’enferme au fond de
son coeur.
À l’annonce de la mort de Thésée, elle déclare son amour à son beau-fils, qui s’en
voit bouleversé.
Coup de théâtre : Thésée, bien vivant, revient d’un long voyage!
Avec la complicité de sa suivante Oenone, Phèdre accuse Hippolyte d’être
amoureux d’elle.
Une série d’événements tragiques viendra marquer à jamais la vie de tous les
personnages.
Les Défricheurs-Théâtre est un regroupement théâtral fondé par Marc-André Bourgault et Jonathan Girard. Avec une équipe de comédiens et concepteurs talentueux, ils ont entamé leur travail sur Phèdre de Jean Racine à l’été 2009. C’est avec humilité et générosité qu’ils s’attellent tous à la fabuleuse tâche de porter à la scène ce monument théâtral.
Pour Les Défricheurs, le théâtre apparaît comme un outil politique : présenter des oeuvres qu’ils estiment nécessaires, que ce soit par les thèmes qu’elles abordent, leur style dramaturgique et/ou leur traitement.
Scénographie : Marc-André Bourgault
Assistance mise en scène, conception sonore : Mildred Bois
Costumes : Jonathan Girard
Le prix des billets est de 23$-adulte et 17$-étudiant
Une production Défricheurs-Théâtre
Les Défricheurs
5425 de Bordeaux suite 009
Billetterie : 514-632-5425
par Sara Fauteux
C’est dans un sous-sol désaffecté à l’allure abandonnée, éclairé par des néons incertains et avec comme seul décor une chaise et un tapis que Les Défricheurs ont choisi de nous présenter Phèdre. Cela s’avère un choix judicieux, puisque ce lieu étrange réussit mieux que n’importe quel décor réaliste à installer une atmosphère intrigante, presque envoûtante, qui sert les mots et les personnages de la tragédie de Racine.
Dans cet espace unique et ouvert, les comédiens, qui ne sont pas en scène, se trouvent juste derrière nous et l’on se sent comme inconsciemment contaminé de leur présence, de leur drame même, lorsqu’ils sont absents de l’espace jeu. Le metteur en scène et comédien Marc-André Bourgault a opté pour une mise en scène sobre et une scénographie dépouillée qui évite les artifices et les effets inutiles, déployant plutôt des signes précis et efficaces qui nous ramènent habilement aux bases de la représentation.
Comme cet espace si particulier, urbain, moderne, mais qu’on ressent comme intemporel par son utilisation, tous les éléments de ce spectacle s’assemblent dans un ensemble homogène qui porte les émotions du texte au-delà des époques et des vers. Les costumes, conçus par Jonathan Girard, sont contemporains, mais ne disent rien qui ne s’efface devant les personnages. Le choix musical actuel de Mildred Bois et l’intégration de cet univers sonore réduit, mais efficace à la mise en scène, viennent mettre en lumière les univers intérieurs de chaque personnage de façon pertinente. Il ne s’agit donc pas d’actualiser bêtement la tragédie de Racine, mais plutôt de faire ressentir sa force en évitant adroitement de s’encombrer de costumes d’époque ou de s’acharner inutilement à moderniser des personnages qui n’ont nul besoin d’être mis au goût du jour pour nous toucher.
Marc-André Bourgault, dans le rôle d’Hippolyte, a su s’entourer d’interprètes talentueux et techniquement irréprochables. La beauté de la poésie est intacte parce qu’elle est maîtrisée, mais aussi parce qu’on sent l’émotion bien présente, livrée à petites doses puissantes par des comédiens qui visiblement comprennent les enjeux de leurs personnages. Il faut souligner la performance de Dominique Leclerc qui interprète Phèdre avec la froideur de la royauté dans toute sa fureur et son désespoir. La reine et sa servante, Oenone (Julie de Lafrenière) nous offrent en outre les scènes les plus puissantes du spectacle, se débattant avec le destin tragique de la reine et le lien d’amour et de confiance qui les unissent.
Si l’économie des effets réussit très bien à cette production, on regrette parfois que ce minimalisme s’applique aussi rigoureusement au jeu des comédiens. À quelques moments, on aurait aimé voir les personnages s’affronter dans une gestuelle un peu plus élaborée. Pourtant, on préfère de loin ce choix de sobriété qui vise à mettre le texte de l’avant à une mise en scène chargée qui force le tragique sans le laisser s’installer de lui-même. C’est ce qui fait la force de cette production, rien n’y est trop appuyé, tout y a sa place juste et nécessaire, surtout les mots.