Un jeune homme québécois qui vit dans le moment tombe amoureux d’une Indienne. Elle, de son côté, se projette dans l’avenir. Leur destin, celé dans les étoiles, est bouleversé par le passé qui leur saute au visage ! Poutine Masala présente les hauts et les bas d’un couple inter-culturel, une interprétation hilarante qui chauffe le cœur et nourrit l’esprit. Trilingue (Anglais, Français avec une touche d’Hindi), cette pièce de théâtre est d’une part comédie et d’une autre, interprétation de danse. Bref, Poutine Masala est une création typiquement Montréalaise avec un style Bollywood authentique.
Dramaturgie Jeremy Hechtman
Musique Mathieu Beaudet
Lumière Maude Serrurier
Entrée 23$
Productions D'Est en Ouest
par David Lefebvre
Le jeune Minnie quitte son pays natal, l’Inde, pour s'établir à Montréal et y réaliser ses rêves : travailler dans le domaine de la danse. Lors d'un flash mob, elle fait la rencontre de Gab, Québécois typique, qui tombe amoureux d'elle. C'est le choc : deux mentalités qui entrent en collision, celle d'une société occidentale permissive et celle orientale, patriarcale, traditionnelle et restrictive. Malgré tout, les deux tourtereaux arriveront à s'entendre, faire découvrir les merveilles de leur société respective, jusqu'à ce que le passé débarque, une promesse faite que la jolie Indienne doit tenir.
Bollywood investit la petite salle du MainLine pour un spectacle dynamique, drôle et sans prétention. Soyons honnête, Poutine Masala, avec sa trame assez conventionnelle et ses coups de théâtre, ne brille pas par son originalité. Si l'histoire offre une saveur locale, grâce à l’amoureux (José Dufour), la recette est typiquement bollywoodienne et respecte bien certains de ses codes. Mais il serait plutôt dommage de bouder son plaisir. Car si la pièce, jouée en trois langues, a les défauts de ce style bien particulier, soit plusieurs longueurs et un caractère plutôt romancé, voire « cheezy », il a aussi ses qualités : de magnifiques costumes, des numéros de danse entraînants, chorégraphiés par Deepali Lindblom (Minnie) et exécutés par des membres de sa troupe de danse, Mix Masala (dont on a pu voir le travail lors du plus récent gala des Jutra), et une énergie contagieuse. Le numéro proposé lorsque le couple se déchire est assurément le plus réussi, sentant toute la frustration et la tristesse dans le corps en mouvement de Deepali. Néanmoins, l'un des sujets les plus intéressants du spectacle se situe au coeur de cette douce confrontation entre les deux cultures, soit la manière de voir la liberté de nos actes et l'indépendance de notre pensée, comparativement à l’imposition de certains choix par les parents. La tradition en opposition avec l'individualisme. Comme le dit le père de Minnie : je ne suis pas un homme si je ne peux même pas contrôler ma fille ! Mêlant une pincée de politique aux réflexions plus personnelles, ce sujet particulier aurait mérité une plus grande profondeur, même s’il n’est pas abordé de façon superficielle ou à la légère. Mais le propos est au divertissement plutôt qu’à la réflexion philosophie ou sociale : ce n’est certainement pas une coïncidence si les clichés y sont nombreux – poutine, jurons bien québécois, relations amoureuses…
La mise en scène d'Olivier Berthiaume se veut simple, mais efficace, éliminant tout accessoire qui pourrait nuire aux numéros dansés. Ainsi, les danseurs agissent comme meubles, se transformant en une table ou un comptoir lorsqu'ils ne performent pas ou ne jouent pas les figurants. Les transitions, dansées, sont sympathiques et dans le ton. Par contre, la configuration de la salle y est ici mal exploitée. Le public peut prendre place côté cour, côté jardin ainsi qu’au-devant de la scène. C'est cette portion du public qui est la plus choyée, ayant toujours bien en face le jeu et les chorégraphies. Les autres spectateurs, sur les côtés, ont souvent des comédiens de dos ; les numéros dansés ont aussi moins d’impact.
Plusieurs grands succès musicaux Bollywood sont réunis pour la cause, dont certaines pièces de la trame sonore de Slumdog Millionnaire, de A. R. Rahman, ou du groupe Kal Ho Naa Ho. Si les montages sont un peu laborieux et les finales abruptes, le choix des chansons est impeccable et offre quelques bonnes surprises. La chanson finale, une composition originale de Mathieu Beaudet, vient très bien fermer la boucle grâce à sa mélodie métissée.
Le terme masala désigne autant un mélange d'épices qu'un genre cinématographique indien, réunissant plusieurs styles différents. C'est un peu comme la poutine : trois ingrédients qui, mis ensemble, forment un mets unique. Sympathique, Poutine Masala offre un divertissement sans prétention qui se déguste avec plaisir, sans être trop épicé.