Après cinq cents ans d’immersion dans le froid des Andes, L’Enfant des glaces réapparaît pour nous hanter… Il deviendra le fantôme de l’homme, les voix de la femme, les hantant jusqu’à la folie. Ne retenant aucune leçon de l’Histoire, le temps, tour à tour lent ou tourbillonnant, marquera de son passage la vie des personnages, les entraînant dans une course effrénée, désespérée, passionnée. Étourdis par l’excitation folle du seul moment, entraînes dans le tourbillon du futur, vont-ils entendre l’Histoire de L’Enfant des glaces, vont-ils se nourrir de son chant, sauront-ils retenir le temps qui passe? La vie s’acharne, s’agrippe, impitoyablement, incroyablement.
Invitée en résidence par le Musée d’art contemporain de Montréal en septembre 2000, Pauline Vaillancourt s’est inspirée d’un fait réel pour créer cet Électr’opéra métaphorique sur le double et le passage du temps. L’Enfant des glaces, cette momie victime d’un sacrifice rituel Inca est découverte au sommet des Andes, à la fin du XXe siècle.
Section vidéo
une vidéo disponible
par Pascale St-Onge
Dans le cadre du festival MONTRÉAL EN LUMIÈRE, la compagnie Chants libresproposait une reprise de l'électr'opéra L'enfant des glaces. L'œuvre, originalement composée en 2000 par Zack Settel et mise en scène par Pauline Vaillancourt, reprenait vie dans la salle du Gesù pour quelques soirs seulement.
Dans une langue inconnue créée à partir de fragments de textes traduits de Gérard de Nerval et Francisco Gomez de Quevedo, une fable librement inspirée d'une découverte archéologique prend forme. Un enfant, sacrifié dans les Andes il y a quelques siècles, reprend vie et vient hanter l'Homme de sa voix et de sa présence fantomatique.
Esthétiquement, le spectacle est grandement inspiré du « steampunk », comme on le constate dans les costumes, mais surtout dans cette grande machine étrange (création d'Alain Cadieux) qui sert de moyen de locomotion et autour de laquelle tourne une majeure partie de la mise en scène. Mis à part quelques bandes son préenregistrées, le travail sonore est complètement généré en direct, y compris la transformation de la voix des deux interprètes. Les corps s'adaptent à leur tour à cette musicalité grâce à une écoute attentive qui transparaît dans les chorégraphies très théâtrales. La musique, les éclairages et la vidéographie (malheureusement trop peu présente) sont orchestrés en symbiose ; l'aspect technologique de la conception de ce spectacle est tout simplement impeccable.
Là où le bât blesse est certainement au niveau de la mise en scène. Le choix artistique d'user de langage inventé nous force à porter une attention plus particulière au son créé naturellement par les voix et au son numérique régi par le compositeur à la console. Cet avantage pour la musique devient cependant un obstacle de taille pour la mise en scène qui doit en faire plus pour transmettre la fable au public. La mise en scène de Pauline Vaillancourt est axée davantage sur la relation entre les corps sans toutefois donner des outils au spectateur pour bien saisir les enjeux du récit, déjà difficile à cerner vu son aspect très philosophique, voire métaphysique, si l'on se fie aux notes du programme. Ce dernier est complètement floué et à un point tel que l'attention se pose rapidement ailleurs, sur la forme du spectacle davantage que sur ce qu'il aurait à nous dire.
Les interprètes sont justes et fidèles à la mise en scène, bien qu'ils semblent parfois tout aussi mal à l'aise que nous face à de trop nombreux moments au caractère inutilement sexuel inclus du début à la fin du spectacle ou à cette scène interminable et répétitive autour de la machine. Vocalement, Ghislaine Deschambault nous hypnotise tandis que Jean Maheux demeure fidèle à lui-même avec une assurance prédominante.
L'Enfant des glaces est une réussite technologique grâce à un travail brillant de ses concepteurs, mais s'adresse à un public initié en raison de l'accès difficile à l'aspect plus théâtral de l'oeuvre. Un bijou et une grande déception à la fois, comme si la mise en scène se détachait complètement du reste et que nous assistions à deux oeuvres indépendantes l'une de l'autre, avec deux interprètes liant le tout du mieux qu'ils le peuvent.