En 1969, des étudiants occupent le centre informatique situé au 9e étage du Henry F. Hall de l’Université Concordia pour protester contre la mauvaise gestion de l’Université suite à une plainte pour racisme déposée par des étudiants antillais contre leur professeur. Après deux semaines d’occupation, et face à l’échec d’un accord, l’escouade anti-émeute intervient pour disperser les protestataires. Le bilan est lourd, les dégâts considérables (plus de 2 millions en dommage) et la police procède à une centaine d’arrestations. Ce soulèvement étudiant est considéré comme l’un des plus important de toute l’histoire canadienne. Le professeur a été blanchi des accusations, mais les circonstances qui ont conduit à cette révolte vont toutefois amener les administrateurs de l’Université à réévaluer leur traitement des plaintes de racisme.
Mise en scène Mathieu Murphy-Perron
Avec Lucinda Davis, Kym Dominique Ferguson, Briauna James, Gita Miller, Michelle Rambharose, Sophie-Thérèse Stone-Richards, Shauna Thompson, Dakota Jamal Wellmen with Maryline Chery, Marie Hall, Justin Johnson et Jahlani Knorren
Crédits supplémentaires et autres informations
Chorégraphies Rodney Diverlus
Scénographie
Sophie El-Assaad
Son
Elena Stoodley et Rob Denton
Éclairages
Audrey-Anne Bouchard
Costumes
Noémi Poulin
Maquillages Pamela Warden
Projections Jaclyn Turner
Billet 27$
Tableau d'Hôte
En 1968, six étudiants et étudiantes caribéens de l’Université Georges Williams, maintenant connue sous le nom de Concordia, déposent une plainte contre un professeur de racisme, suite à ce qu’ils considèrent comme une injustice dans la gradation de leurs travaux. Devant l’absence de médiation, d’écoute et de tentatives de résolution de cet enjeu de la part de l’université, les étudiants à l’origine de la plainte, ainsi que des centaines d’autres, occupent pendant deux semaines le centre informatique du bâtiment F. Hall de l’université.
Voilà la prémisse de la pièce Blackout, présentée entre les murs du même bâtiment qui a vu ces événements avoir lieu il y a 50 ans. Le « Sir George Williams Computer Incident » est considéré comme la plus grande occupation étudiante de l’histoire canadienne. Près de 400 étudiants y ont participé.
Depuis plus d’un an, sous la direction de Mathieu Murphy-Perron, cofondateur de Tableau d’Hôte Theatre, producteur de la pièce, près d’une trentaine de comédiens, de créateurs et de conseillers travaillent à revisiter cet important événement historique.
...l’histoire qu’elle raconte, malheureusement encore actuelle sur bien des aspects, est importante et nécessaire, et nous rappelle un pan de notre histoire collective que nous ne devons pas oublier.
Ils ont épluché les archives historiques et médiatiques, ont travaillé et imaginé les événements de l’époque, les personnages, et surtout, ont pris position. Blackout est sans équivoque; la troupe qui la compose choisit de croire et d’être du côté des étudiants. « Vous n’êtes pas seuls, nous vous supportons, votre cause est la bonne », peut-on entendre à plusieurs reprises pendant les deux heures et demie de la pièce.
Suite au fait que l’administration universitaire ne les croit pas, les étudiants de l’époque, et ceux interprétés dans Blackout, prennent les grands moyens pour faire entendre leur voix; une occupation de deux semaines dans le centre informatique universitaire. Jetant par les fenêtres ordinateurs et milliers de cartes perforées récoltant des données, les étudiants auraient causé plus de deux millions de dollars de dommage à l’époque. Ultimement, les étudiants en cause seront arrêtés, et condamnés. Néanmoins, cet événement mène à l’adoption de la politique multiculturelle canadienne de 1971, et inspire plusieurs universités à se doter d’ombudsmen afin de régler les litiges entre étudiants et facultés.
Réinventer l’histoire
Blackout, bien que basé sur les faits réels de ce que l’on a notamment appelé « l’Affaire George Williams » n’est pas un docu-théâtre, mais une interprétation créative des événements de 1969. Cet aspect est d’ailleurs bien mis en place dans l’œuvre collective, qui s’est mise en place de façon collégiale grâce à l’apport de tout le monde qui y a travaillé. Par exemple, en plus des étudiants et différents professeurs, responsables et autres personnages historiques interprétés par la troupe qui compose Blackout, quatre figures représentant des ancêtres de descendance afro-caribéenne suivent tout au long de la pièce les interprètes. Comme pour assurer une présence, un support omniprésent à la cause des étudiants, leur rappelant leurs origines, leurs identités, les quatre ancêtres dansent, chuchotent, chantent, crient l’unicité et l’importance de la cause.
Blackout relate aussi la parole de figures noires importantes à travers l’histoire de Concordia, et fait aussi référence aux combats actuels des communautés noires comme le mouvement Black Lives Matter ou encore la controverse autour de SLAV.
Véritable chœur, les comédiens et comédiennes de Blackout unissent leurs voix, leur créativité et leur interprétation de l’occupation du centre informatique de 1969 pour témoigner de cet événement méconnu. Déjà dans l’air, mais accéléré par cet événement, l’Université Georges Williams, suite à sa fusion avec le collège Loyola en 1974, a changé de nom et d’identité pour devenir l’Université Concordia, qui tire son nom de la devise de Montréal Concordia salus (la prospérité par la concorde). Blackout ne raconte pas ce changement de nom exactement de la même façon, mais le fait tout en humour. On apprécie d’ailleurs beaucoup les blagues de Blackout, malgré qu’elle raconte somme toute des événements graves. Suite à l’intervention musclée de la police pour forcer son entrée dans le centre informatique et à l’arrestation de plusieurs étudiants, ces derniers ont été condamnés à des peines de prison de six mois à deux ans.
Malgré quelques longueurs et un jeu parfois inégal des comédiens et comédiennes, Blackout outrepasse grandement ces lacunes, car l’histoire qu’elle raconte, malheureusement encore actuelle sur bien des aspects, est importante et nécessaire, et nous rappelle un pan de notre histoire collective que nous ne devons pas oublier.