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Du 24 novembre au 6 décembre 2016, 20h, 28 novembre 19h, 5 décembre 14h et 19h, relâche vendredis et dimanches
Macbeth
En français et en créole haïtien.
Texte William Shakespeare
Traduction française de F.-V. Hugo
Traduction créole de Rodney St-Éloi
Mise en scène Stacey Christodoulou
Avec Cynthia Cantave, Maxime Mompérousse, Philippe Racine, Vanessa Schmit-Craan et Franck Sylvestre

Après deux séries de représentations à guichet fermé en 2010, The Other Theatre revient avec sa production intimiste de MACBETH dont l’action se déroule à Haïti. Sur une terre ravagée par la guerre, un fidèle soldat est tenté de s’emparer du pouvoir à tout prix. Macbeth, un homme honorable que l’avarice et le désir dresseront contre l’ordre naturel des choses, se verra transformé en tyran; son ascension et sa chute se déployant puis se précipitant grâce à la force et à la beauté du texte de Shakespeare. Une histoire où la vie et la mort troquent leurs visages, où le surnaturel et le mortel deviennent indissociables. MACBETH invite le spectateur au coeur des rêves et de la folie.

Fondé en 1991, The Other Theatre se consacre à la présentation de performances qui explorent les tensions entre l’individu et l’expérience collective. Sa mission est de présenter des oeuvres complexes qui portent à réflexion : adaptations, installations, textes dramatiques ou créations collectives, et d'établir avec le public un dialogue qui, même s’il porte sur la politique, est loin de tout didactisme et de solutions faciles. The Other Theatre donne des représentations en anglais, en français et bilingues. Ces créations collectives ont abordé des sujets aussi variés que les mathématiques fractales, le fascisme, la physique, la culture pop, la télévision, le terrorisme; elles ont été présentées dans des théâtres, des entrepôts, des galeries, une vitrine de centre commercial et un ascenseur en mouvement. Parmi les oeuvres les plus récentes présentées par la compagnie, il y a eu la création en anglais de PROVINCE de Mathieu Gosselin (sélection de la série Brave New Works du Theatre Centaur en 2015) et LOVE U LOVECRAFT, une pièce chargée d’atmosphère présentée à La Chapelle Scènes contemporaines.


Section vidéo


Scénograpgie Amy Keith
Costume Marija Djordjevic
Éclairages David Perreault Ninacs
Musique Serge Geoffroy et François Girouard

Billet
Régulier : 25 $
Étudiants et âge d’or : 20 $
Groupes de 10 personnes et plus : 15 $
Abonnés : 10% de rabais

A The Other Theatre Production


Studio du Théâtre Segal
5170 Cote St. Catherine Rd
Billetterie - Box Office: 514-739-7944

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Dates antérieures (entre autres)

Du 7 au 28 avril 2010 - Centre Segal

 
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Critique

critique publiée en 2010

Dans l’œuvre du grand William Shakespeare, Macbeth demeure probablement l’une des tragédies que l’on peut facilement adapter ou réinterpréter selon les plus folles fantaisies des metteurs en scène. Pièce sur la perfidie du pouvoir baignant dans un univers surnaturel et prophétique, elle a inspiré des réalisateurs du septième art aussi différents qu’Orson Wells, Roman Polanski (The Tragedy of Macbeth) ou encore Akira Kurosawa (Kumonosu Jô).

Ce classique shakespearien constitue donc un matériau idéal pour témoigner de la réalité moderne. Compagnie bilingue de la scène montréalaise, The Other Theatre a voulu témoigner des drames récents qui ont secoué le sol haïtien. Sans être mémorable, leur relecture de Macbeth comprend plusieurs moments captivants.

La metteure en scène Stacey Christodoulou a raccourci l’intrigue complexe à une durée d’environ une heure en coupant plusieurs scènes et en réduisant les personnages secondaires. Cinq comédiens noirs se partagent les différents rôles. Des répliques en créole s’amalgament à la traduction française de F.-V. Hugo. L’action dramatique initialement sur le continent européen se déroule ici dans le contexte d’une Haïti contemporaine rongée par de sordides conflits politiques et humains. Miroir des temps modernes, dans un monde pétrifié par la guerre et la corruption, Macbeth dresse un portrait de l’ascension et de la déchéance d’un tyran aveuglé par l’appétit insatiable du pouvoir.

The Other Theatre poursuit ici sa démarche artistique qui privilégie un théâtre physique sur un ton incantatoire avec de nombreuses références au vaudou. À l’exception d’un immense tronc d’arbres (une jolie réalisation de la scénographe Amy Keith) et de toiles blanches collées aux vitres du studio-théâtre du Centre Segal que les interprètes arrachent une à une, les artistes évoluent sur un plateau dépouillé avec une énergie du désespoir. La vue sur l’extérieur avec ses arbres, sa pénombre et ses voitures qui passent donnent l’impression d’être intégrée au décor. 

La réussite de ce Macbeth repose en grande partie sur une direction d’acteurs précise et rigoureuse. À cet effet, les interprètes témoignent d’une belle intensité, principalement durant la première moitié du spectacle. Les scènes de meurtre sont particulièrement ingénieuses. La chorégraphie des corps masculins conjugue à la fois une séduction troublante et une barbarie sanguinaire. Lorsqu’au début, les sorcières lancent leurs prophéties maléfiques en un rituel inspiré du vaudou, Vanessa Schmit-Cran et Cynthia Cantave s’imposent par leur mariage de gravité absurde et de machiavélisme félin. Dans le rôle de Macbeth, Philippe Racine sait illustrer les tourments et les abîmes de cette figure tragique. Ses partenaires masculins, Franck Sylvestre et Charles Smith-Métellus, incarnent tous les deux plusieurs rôles sans rupture de ton. Il ne faut passer sous silence la qualité de la conception musicale et sonore de Serge Geoffroy et de François Girouard qui donne un climat d’épouvante saisissant au spectacle.

Quant aux répliques traduites en créole par Rodney Saint-Éloy (poète et éditeur de plusieurs écrivains haïtiens dont Dany Laferrière), il est difficile pour les spectateurs qui ne connaissent pas cette langue d’en apprécier la qualité. Heureusement, ce choix artistique fonctionne parfaitement dans l’esprit et l’atmosphère voulue par les créateurs du spectacle.

Petite faiblesse, la projection des voix a été déficiente à quelques reprises. Le public éprouve du mal à comprendre certaines phrases, ce qui entraîne une légère baisse d’attention, surtout dans le dernier quart d’heure avant la tombée du rideau.

Avec Macbeth, The Other Theatre signe une production de qualité qui permet de renouer avec l’une des pièces les plus significatives du répertoire shakespearien.

12-04-2010