21 mars, 16h - Théâtre Outremont
Du 1er au 10 avril 2010, jeudi au samedi 20h - Aux Écuries
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La Fugue

Texte : Félix Beaulieu-Duchesneau, Benoît Côté, Justin Laramée, Philippe Racine
Mise en scène : Qui Va Là
Avec : Félix Beaulieu-Duchesneau, Benoît Côté, Justin Laramée et Philippe Racine

En fugue depuis plusieurs semaines, Yohan cultive un amour secret pour Noémie, jeune adolescente affiliée à un gang de rue. Toujours sans nouvelles, son père reçoit une boîte de la main des policiers. En fouillant parmi les objets retrouvés, il reconstruira, morceau par morceau, l’histoire de cet adolescent dont il s’est éloigné.

Qui Va Là veut contribuer à l’idée de la responsabilité humaine face au monde. Il se questionne sur la notion du sacré. Et explore ce qui fait que le théâtre est le théâtre : une rencontre de l’ici et du maintenant.

Conseil à la conception :
Éclairages : Étienne Boucher
Marionnettes : Jean Cumming
Scénographie : Geneviève Lizotte
Musique : Michel Longtin
Régie et direction technique : Charlotte Ménard
Mise en scène : Benoît Vermeulen

Carte Premières
Date Premières (Aux Écruries) : toutes les représentations
Régulier 20$
Carte premières : 10$

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Une création Qui Va Là et la Société de musique contemporaine du Québec

Théâtre Outremont
1248, avenue Bernard Ouest
Billetterie : 514-908-9090

Aux Écuries
7285, rue Chabot
Billetterie : 514 328-7437

par Marie-Pierre Bouchard

Fuite et dérive sur fugue musicale

Sans paroles et sans détour, Qui Va Là et la SMCQ jeunesse livrent un poignant récit sur la révolte d’un adolescent, sur la détresse d’un père impuissant et sur l’impitoyable rudesse de cette jungle qu’est la rue. Une mer d’incompréhension fait sombrer l’homme et son fils dans le fossé qui s’est creusé entre eux. Comment en sont-ils arrivés là? Dans La Fugue, ce ne sont pas tant les causes qui importent, mais plutôt les conséquences, dont la dérive du fils qui déserte et rejette le nid familial, et l’errance du père inquiet, perdu, dépassé par les événements.

Le principal défi du théâtre sans paroles réside dans le pouvoir d’évocation. La trame musicale, livrée sur scène par d’excellents interprètes et musiciens, créé un dense climat dramatique empreint de solitude, de violence, de fragilité et de tendresse à fleur de peau. Yohan s’égare dans la fuite tandis que résonnent tour à tour les voix crues d’une pièce de hip-hop ou les échos d’une fugue de Bach. L’ambiance bruyante et chaotique de la rue est également mise à l’avant-plan, grâce à un environnement sonore aussi efficace qu’omniprésent.

Si le père de Yohan et les voyous prennent vie sous les traits des comédiens, les personnages de Yohan et Noémie sont quant à eux personnifiés de manière suggestive: deux manteaux à capuchons, manipulés à vue telles des marionnettes. À la fois ingénieuse et d’une grande simplicité, cette trouvaille constitue l’aspect le plus réussi du spectacle. On reconnaît ici l’influence du génie créatif de Jean Cumming, qui a conseillé l’équipe de Qui Va Là. La puissance de l’impact se décuple par la présence fantomatique et la gestuelle émouvante de ces personnages d’ados magistralement interprétés.

La mise en scène, sobre, toute en retenue, est ponctuée d’images percutantes, comme le cahier à dessin de l’adolescent, dont les croquis dévoilent sa vulnérabilité et cet ardent désir d’être aimé qui le poussent à poser des gestes extrêmes. Il y a aussi cette touchante scène où Yohan et Noémie, petits êtres blessés recroquevillés sur la froideur du trottoir, partagent une paire d’écouteurs, apaisant mutuellement les tourments de l’un et les démons de l’autre. 

Scénographie minimaliste et économie d’accessoires: des cordes à linge chenues qui servent de fils conducteurs entre les différents tableaux qui défilent; des guitares, des amplis, un clavier et une batterie meublant un poussiéreux local de musique de garage; et finalement, tel un vacillant symbole d’émancipation et d’espoir, apparaît un singulier papillon de nuit aux ailes de carton...

Libérée des contraintes de la narration, La Fugue ne s’encombre pas d’explications, mais le récit en souffre à certains moments. La dramaturgie manque parfois d’étoffe, et certains détails restés dans l’ombre peuvent semer la confusion. Si l’on met ce bémol de côté, le spectacle dans son essence regorge de qualités, dont celles de sensibiliser et de solliciter des questionnements nécessaires.

Qui Va Là s’est documenté sur les problématiques des gangs de rue et de la délinquance. Cela se sent notamment dans le réalisme et la lucidité qui se dégage du spectacle. La vie à la dure, les déceptions, l’errance, le doute, la poésie brute d’une réalité amère qui se déroule, sur scène comme dans la réalité, sans fioriture. D’où l’importance de souligner que, malgré le fait que les représentations soient ouvertes aux jeunes à partir de 10 ans, le sujet et la manière directe avec lequel il est abordé laisse croire que ce sont les adolescents qui seront touchés d’emblée.

05-04-2010

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